OISEAUX DU MATIN (Tomas Tranströmer)
Posted by arbrealettres sur 17 mai 2016
OISEAUX DU MATIN
Je réveille la voiture
au pare-brise saupoudré de farine.
Je revêts mes lunettes de soleil.
Le chant des oiseaux s’obscurcit.
Tandis qu’un autre homme achète un journal
au kiosque de la gare
non loin d’un grand wagon de marchandises
entièrement rougi par la rouille
et qui scintille au soleil.
Pas de vides nulle part ici.
À travers la tiédeur printanière, un corridor glacial
où quelqu’un vient à grands pas
nous dire qu’on le diffame
même en plus haut lieu.
Par une porte dérobée dans le paysage
la pie arrive
noire et blanche. Oiseau de Hel.
Et le merle qui s’agite de-ci, de-là
jusqu’à charbonner tout le dessin,
à part ces habits blancs sur une corde à linge :
un choeur de Palestrina.
Pas de vides nulle part ici.
Merveille que de sentir mon poème qui grandit
alors que je rétrécis.
Il grandit, il prend ma place.
Il m’évince.
Il me jette hors du nid.
Le poème est fini.
(Tomas Tranströmer)
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