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Poésie

Archive for 28 novembre 2016

LE POÈTE A SON AIMÉE (César Vallejo)

Posted by arbrealettres sur 28 novembre 2016



LE POÈTE A SON AIMÉE

Aimée, en cette nuit crucifiée tu t’es
sur les deux madriers cintrés de mon baiser;
et ta peine m’a dit que Jésus avait pleuré
et qu’il était un vendredi-saint plus doux que ce baiser.

En cette nuit étrange où tant regardé tu m’as,
la Mort fut joyeuse et a chanté dans son squelette.
En cette nuit de septembre on a célébré
ma seconde chute et le plus humain des baisers.

Aimée, nous mourrons côte à côte ; serrés l’un contre l’autre ;
éminente, notre amertume par intervalles se desséchera;
au fond de l’ombre, nos lèvres défuntes noyées se seront.

Alors, nulle trace de reproches dans tes yeux béats ;
alors, je ne t’offenserai plus. Alors, comme deux petits enfants
dans le tombeau, serrés l’un contre l’autre, nous nous endormirons.

***

EL POETA A SU AMADA

Amada, en esta noche tú me has crucificado
sobre los dos maderos curvados de mi beso;
y tu pena me ha dicho que Jesús ha llorado,
y que hay un viernesanto más dulce que ese beso.

En esta noche rara que tanta me has mirado,
la Muerte he estado alegre y ha cantado en su hueso.
En esta noche de setiembre se ha oficiado
mi segunda caída y el más humano beso.

Amada, moriremos los dos juntos, muy juntos;
se irá secando a pausas nuestra excelsa amargura;
y habrán tocado a sombra nuestros labios difuntos.

Y ya no habrán reproches en tus ojos benditos;
ni volveré a ofenderte. Y en una sepultura
los dos dos dormiremos, como dos hermanitos.

(César Vallejo)

Illustration: Odd Nerdrum

 

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LOGE ÉTROITE (César Vallejo)

Posted by arbrealettres sur 28 novembre 2016



LOGE ÉTROITE

Plus près, plus près. Je suis très bien.
Il pleut ; il fait une limitation cruelle.
Avance, avance le pied.

Jusque quand ces mains simulant la ronceraie
laisseront-elles les courtines baissées?
Tu vois? Les autres, quelle facilité, quelle effigie.
Plus près, plus près.

Il pleut. Et ce soir une autre nef glissera
chargée de crêpe ;
comme l’aréole noire et difforme
arrachée à l’illusion sphingique.

Plus près, plus près. Tu es au bord
et la nef peut t’entraîner sur la mer.
Ah, courtines immobiles, symboliques…
Mes applaudissements sont un festin de roses noires :
te céder ma place!
Et dans le fracas de mon renoncement
saignera un fil d’infini.

Je ne dois pas être si bien;
avance, avance le pied!

***

EL PALCO ESTRECHO

Más acá, más acá. Yo estoy muy bien.
Llueve; y hace una cruel limitación.
Avanza, avanza el pie.

Hasta qué hora no suben las cortinas
esas manos que fingen un zarzal?
Ves? Los otros, qué cómodos, qué efigies.
Más acá, más acá!

Llueve. Y hoy pasará otra nave
cargada de crespón;
será como un pezón negro y deforme
arrancado a la esfíngica Ilusión.

Más acá, más acá. Tú estás al borde
y la nave arrastrarte puede al mar.
Ah, cortinas inmóviles, simbólicas…
Mi aplauso es un festín de rosas negras:
cederte mi lugar!
Y en el fragor de mi renuncia,
un hilo de infinito sangrará.

Yo no debo estar tan bien;
avanza, avanza el piel!

(César Vallejo)

 

 

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PARDON (César Vallejo)

Posted by arbrealettres sur 28 novembre 2016



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PARDON

Nous passons ensemble. Le rêve
lèche nos pieds quelle douceur ;
et tout se déplace, sans douceur,
en hâves renoncements.

Nous passons ensemble. Les âmes
mortes, celles qui, comme nous,
ont traversé l’amour,
en de malades pas opales,
revêtent leurs crêpes rigides
et ondulent à notre endroit.

Aimée, allons au bord
fragile d’un tas de terre.
Ointe d’huile et de pureté,
l’aile va. Mais le coup
en tombant je ne sais où,
fait chaque larme
dent hostile qu’il affûte.

Et un soldat, un soldat valeureux,
aux épaulettes-blessures,
s’anime dans le soir héroïque ;
A ses pieds, comme un horrible caparaçon
funèbre, montrant parmi les rires
le cerveau de la Vie.

Nous passons ensemble, l’un contre l’autre,
lumière invaincue, pas malade;
nous frôlons ensemble les lilas
moutarde d’un cimetière.

***

ROMERÍA

Pasamos juntos. El sueño
lame nuestros pies qué dulce;
y todo se desplaza en pálidas
renunciaciones sin dulce.

Pasamos juntos. Las muertas
almas, las que, cual nosotros,
cruzaron por el amor,
con enfermos pasos ópalos,
salen en sus lutos rígidos
y se ondulan en nosotros.
Amada, vamos al borde
frágil de un montón de tierra.
Va en aceite ungida el ala,
y en pureza. Pero un golpe,
al caer yo no sé dónde,
afila de cada lágrima
un diente hostil.

Y un soldado, un gran soldado,
heridas por charreteras,
se anima en la tarde heroica,
y a sus pies muestra entre risas,
como una gualdrapa horrenda,
el cerebro de la Vida.

Pasamos juntos, muy juntos,
invicta Luz, paso enfermo;
pasamos juntos las lilas
mostazas de un cementerio.

(César Vallejo)

 

 

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Demande à la flamme pourquoi elle brûle (Paol Keineg)

Posted by arbrealettres sur 28 novembre 2016



Demande à la flamme
pourquoi elle brûle

les chats de novembre
ne craignent pas la pluie

de seuil en deuil
l’amour te déchire

la joie saigne
et remplit la joue

cherches-tu sur cette herbe
à convoquer les morts ?

tourneras-tu toujours les yeux
vers la voie lactée de l’enfance ?

les mains sur le feu
je suis né pour vaincre.

(Paol Keineg)

Découvert ici: http://www.ipernity.com/blog/lara-alpha

 

 

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Quand (Paol Keineg)

Posted by arbrealettres sur 28 novembre 2016



quand j’aurai paré tes poignets des mille cailloux du chemin
quand j’aurai plongé dans les spirales bleutées de l’escalier de tes yeux
quand j’aurai écarté les barreaux solides de nos cages thoraciques trop étroites
quand j’aurai transmuté en oiseaux de paradis les minéraux coupants de nos éclats de voix
quand j’aurai changé en rouge liberté les voyelles et les consonnes qui s’épanouissent en nous
quand j’aurai senti en nos ventres dilatés s’épaissir l’espoir capricieux comme un troupeau de chèvres
quand j’aurai vu s’éloigner de notre peuple les pontons de l’accoutumance pour gagner les mille langues de l’océan
quand j’aurai paré tes flancs des mille mousses d’un ciel de neige
alors je serai digne de toi
mon amour

(Paol Keineg)

Découvert ici: http://www.ipernity.com/blog/lara-alpha

Illustration

 

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Je n’irai pas aujourd’hui (Paol Keineg)

Posted by arbrealettres sur 28 novembre 2016



Je n’irai pas aujourd’hui vers ce pays de grand gel et de vent,
déchiré d’une bourrasque de lumière
— et les prairies roses s’embrasent d’herbes coupantes.
Aussi vieux et sec qu’un siècle d’échecs,
je veux m’asseoir sur les bancs vernis parmi les gens
prendre souffle et réconciliation,
écarter de ton front une mèche de ronces
et m’attarder dans l’énergie de la nuit maternelle
faite à nos ressemblances.

(Paol Keineg)

Découvert ici: http://www.ipernity.com/blog/lara-alpha

Illustration

 

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Un chat perdu miaule (Richard Wright)

Posted by arbrealettres sur 28 novembre 2016



 

Coton [1280x768]

Un chat perdu miaule
Sous le couchant moutonneux
D’un champ de coton.

***

A lost cat mews
et fleeciness
tton field.

(Richard Wright)

 

 

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Au creux d’un vallon (Richard Wright)

Posted by arbrealettres sur 28 novembre 2016



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Au creux d’un vallon,
Un bourg étreint par la lune —
Quelle solitude.

***

A valley village
Lies in the grip of moonlight:
How lonely it is.

(Richard Wright)

Illustration

 

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Dans l’air de l’été (Richard Wright)

Posted by arbrealettres sur 28 novembre 2016



vache [1280x768]

Dans l’air de l’été,
Coulant comme un lait crémeux,
La voix d’une vache.

***

On the summer air,
Flowing like rich creamy milk,
The low of a cow.

(Richard Wright)

 

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Le chat fermant les yeux (Richard Wright)

Posted by arbrealettres sur 28 novembre 2016



 

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Le chat fermant les yeux
Baille comme s’il voulait
Avaler l’printemps.

***

Squeezing his eyes shut,
The cat yawns as if about
To eat the spring world.

(Richard Wright)

Illustration

 

 

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