Arbrealettres

Poésie

VOLUPTÉ (Pierre Louÿs)

Posted by arbrealettres sur 18 juillet 2018



Illustration: Philippe Zacharie
    
VOLUPTÉ

Sur une terrasse blanche, la nuit, ils nous laissèrent évanouies dans les roses.
La sueur chaude coulait comme des larmes, de nos aisselles sur nos seins.
Une volupté accablante empourprait nos têtes renversées.

Quatre colombes captives, baignées dans quatre parfums, voletèrent au-dessus de nous en silence.
De leurs ailes, sur les femmes nues, ruisselaient des gouttes de senteur. Je fus inondée d’essence d’iris.

Ô lassitude! je reposai ma joue sur le ventre d’une jeune fille qui s’enveloppa de fraîcheur avec ma chevelure humide.
L’odeur de sa peau safranée enivrait ma bouche ouverte. Elle ferma sa cuisse sur ma nuque.

Je dormis, mais un rêve épuisant m’éveilla : l’iynx, oiseau des désirs nocturnes, chantait éperdument au loin.
Je toussai avec un frisson. Un bras languissant comme une fleur s’élevait peu à peu vers la lune, dans l’air.

(Pierre Louÿs)

 

Recueil: Les chansons de Bilitis
Traduction:
Editions: Gallimard

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