À PRIME (Marie Noël)
Posted by arbrealettres sur 24 septembre 2018
À PRIME
Fiat…
Père, porte mon âme en son insouciance
Jusqu’où tu veux et qu’elle dorme dans ta main
Sans demander le sens et le but du chemin.
Qu’elle soit, n’ayant plus ni dessein ni science.
Légère, détachée et joueuse au réveil
Comme des moucherons qui dansent au soleil.
Détourne d’elle une inquiète défiance
qui mesure avant toi le fil de l’avenir
Et qui pèse l’espoir avec le souvenir ;
Et l’analyse accroupie en la conscience
Dont l’ongle sans repos fouille de son labour
L’ombre, l’ombre de l’ombre, et n’y fait pas de jour.
Je m’abandonne à Toi, divine Sapience,
Ma force sera prête à l’heure du besoin
Comme un manteau d’enfant dont la mère a pris soin.
Je ferai ce que tu voudras de confiance,
J’espère tout, mon Dieu : Tu règnes sur le Bien.
Tu règnes sur le Mal et je n’ai peur de rien.
Ce que j’attends, je l’attends sans impatience,
Ô mon Père, ô ma Mère, ô mon unique foi !
Au destin qu’il me faut loin ou près porte-moi.
Tu vois le Temps et tout s’offre à ta prescience :
Mes fruits en moi comme le germe dans le grain.
Tu connais ma fatigue, et ma soif, et ma faim…
Et ton enfant n’a pas besoin d’expérience.
(Marie Noël)
Traduction:
Editions: Gallimard
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