SÉCHERESSE (Jacob-Zvi Sharguel)
Posted by arbrealettres sur 15 décembre 2019
SÉCHERESSE
Deux bonzes japonais font tinter leurs clochettes
Et de la canicule égrènent la chanson.
Chacun porte un lotus à sa robe accroché
Afin de conjurer la mauvaise moisson.
Deux curés en soutane noire prient en choeur,
Agenouillés devant de pieuses images :
Jésus que tout le sang qui coule de ton coeur
Au-dessus du pays se transforme en nuage.
Deux rabbins sont blottis au profond de leur être
Et pleurent en priant la résurrection :
Ô Toi qu’ils ont trouvé, que nos lointains ancêtres
Plaident pour nous Ta grâce et Ta compassion.
Tandis que tout là-haut le visage solaire
Scintille – ardent buisson dans l’azur embrasé,
Et que deux arbrisseaux, la bouche grande ouverte
Semblent, à l’agonie, attendre la rosée.
(Jacob-Zvi Sharguel)
Traduction:
Editions: Gallimard
Cochonfucius said
Paysage frit
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La vague de chaleur a cramé l’Univers,
De stérilité sont les planètes frappées ;
Tu retrouveras peu de bêtes rescapées,
Dont nul raton laveur, n’en déplaise à Prévert.
Jamais ne reviendront l’automne ni l’hiver,
De neige ne sera plus la plaine nappée ;
Des preux de Charlemagne ont fondu les épées,
Ce qui a satisfait quelques démons pervers.
Ces diables par ce temps conservent leur sang-froid,
Disant « Le sol revient enfin à qui de droit »
Sans regretter l’humain, cet apprenti despote.
Or, deux petits canards ont surgi tout à coup,
Hérissant joliment les plumes de leur cou ;
Ils ont donc survécu, tant mieux pour ces deux potes.