Les Quatre saisons (Charles Cros)
Posted by arbrealettres sur 1 mai 2020
Les Quatre saisons
I
Au printemps, c’est dans les bois nus
Qu’un jour nous nous sommes connus.
Les bourgeons poussaient, vapeur verte.
L’amour fut une découverte.
Grâce aux lilas, grâce aux muguets,
De rêveurs nous devînmes gais.
Sous la glycine et le cytise,
Tous deux seuls, que faut-il qu’on dise ?
Nous n’aurions rien dit, réséda,
Sans ton parfum qui nous aida.
II
En été les lis et les roses
Jalousaient ses tons et ses poses,
La nuit, par l’odeur des tilleuls
Nous nous en sommes allés seuls.
L’odeur de son corps, sur la mousse,
Est plus enivrante et plus douce.
En revenant le long des blés,
Nous étions tous deux bien troublés.
Comme les blés que le vent frôle,
Elle ployait sur mon épaule.
III
L’automne fait les bruits froissés
De nos tumultueux baisers.
Dans l’eau tombent les feuilles sèches
Et, sur ses yeux, les folles mèches.
Voici les pêches, les raisins,
J’aime mieux sa joue et ses seins.
Que me fait le soir triste et rouge,
Quand sa lèvre boudeuse bouge ?
Le vin qui coule des pressoirs
Est moins traître que ses yeux noirs.
IV
C’est l’hiver. Le charbon de terre
Flambe en ma chambre solitaire.
La neige tombe sur les toits,
Blanche ! Oh, ses beaux seins blancs et froids !
Même sillage aux cheminées
Qu’en ses tresses disséminées.
Au bal, chacun jette, poli,
Les mots féroces de l’oubli.
L’eau qui chantait s’est prise en glace.
Amour, quel ennui te remplace !
(Charles Cros)
filamots said
Je viens d’aller faire un tour sur la biographie de Charles Cros vu qu’a Bruxelles il existe une académie ou un institut, ce qui m’interpellait. J’en ai appris grâce à ce poème un peu étrange et primesautier, bien des choses sur ce monsieur.
Je n’ai pas encore vu l’illustration qui ma foi est pour moi fort belle.
filamots said
Pour le peintre j’aime beaucoup surtout la phrase : les couleurs chuchotent…. Comme c’est beau ces mots là !
arbrealettres said
couleurs pas … criardes! 😉
musnadjia423 said
A reblogué ceci sur musnadjia423wordpress.
Cochonfucius said
Yinbottle and Yangbottle
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Pinard du sage ou vin du fou,
Pour les deux ce breuvage est doux ;
Vin quotidien, vin de la fête,
C’est de nos repas l’exégète.
Mes amis, venez boire un coup,
J’ai ce qu’il faut pour votre goût ;
Les marchands de vin sont honnêtes,
Volontiers chez eux je m’arrête.
C’est du meilleur que nous voulons,
Du vin du Pays des Merveilles ;
Sur son drapeau sont deux bouteilles.
Que le repas soit court ou long,
Que Bacchus veille ou qu’il sommeille,
Vers ce dieu nous nous en allons.
Cochonfucius said
Feuille de gueules
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La tache rouge auprès d’un mur de pierre grise
Est une feuille morte à la vive couleur ;
Nous la voyons, songeuse et calme dans la brise,
Elle qui ne pourra voir le retour des fleurs.
Nous ne comprenons point ce que les feuilles disent,
Elles dont les propos ne sont pas sans valeur ;
Et vous n’y trouverez jamais de paillardise,
Car bien peu d’âmes sont plus pures que les leurs.
La jeune feuille pousse, et ça nous émerveille,
En la voyant venir le printemps se réveille ;
Sa couleur de sinople, elle dit notre espoir.
Les feuilles par milliers sont sur cet arbre immense,
Le soleil les caresse et la vie recommence,
Dont le grand coeur battra quand le ciel sera noir.