La sieste (Robert Desnos)
Posted by arbrealettres sur 19 juillet 2022
La sieste
Cent mille années dans mon sommeil d’après-midi
Ont duré moins longtemps qu’une exacte seconde.
Je reparais du fond d’un rêve incontredit
Dans la réalité de ma chair et du monde.
Je retrouve en ma bouche une ancienne saveur
Et des noms de jadis et des baisers si tendres
Que je ne sais plus qui je suis ni si mon coeur
Bat dans le sûr présent ou le passé de cendres.
Éclatez! Ô volcans! du fond des souvenirs,
Noyez sous votre lave un esprit qui se lasse,
Brûlez les vieux billets et puissiez-vous ternir
À jamais le miroir dont le tain mord la glace.
(Robert Desnos)
Cochonfucius said
Robert le moine
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Robert se fait ermite, et dort l’après-midi.
Ce sommeil lui fait voir la nature seconde,
Contrepoint du réel, cosmos qui contredit
Le bon sens illusoire, aberration des mondes.
La règle de Robert a meilleure saveur
Que celle de Benoît ; c’est une règle tendre
Qui soulage, l’esprit, qui renforce le coeur
Et qui ne laisse point en bouche un goût de cendres.
Règle de poésie, règle du souvenir,
Prière dont jamais les orants ne se lassent,
Firmament dont l’éclat ne saurait se ternir
Si tu n’en cherches point le reflet dans la glace.
arbrealettres said
😉
Cochonfucius said
Robert le consolateur
——–
Tu ne crains point, Robert, qu’on renverse le sel ;
Tu ne crains point non plus qu’un sablier se brise,
Ni que d’une bouteille une ration soit prise,
Ni tous ces accidents qui ne sont point mortels.
Car, si nos résultats ne sont pas les meilleurs,
Ne le prenons pas mal, cela nous encourage
À mettre de la poigne et du coeur à l’ouvrage :
À mieux nous comporter, en éternels veilleurs.
Salière et sablier nous donnent des leçons ;
Les objets sont tous là pour nous apprendre à vivre,
On peut les annoter, tels les marges d’un livre,
Ou bien en profiter, les prendre comme ils sont.