Arbrealettres

Poésie

Le démoniaque (Jean Moréas)

Posted by arbrealettres sur 23 septembre 2022



Le démoniaque

Ai-je sucé les sucs d’innommés magistères ?
Quel succube au pied bot m’a-t-il donc envoûté ?
Oh ! Ne l’être plus, oh ! Ne l’avoir pas été !
Suc maléfique, ô magistères délétères !

Point d’holocauste offert sur les autels des Tyrs,
Point d’âpres cauchemars, d’affres épileptiques !
Seuls les rêves pareils aux ciels clairs des tryptiques,
Seuls les désirs nimbés du halo des martyrs !

Qui me rendra jamais l’hermine primitive,
Et le lis virginal, et la sainte forêt
Où, dans le chant des luths, Viviane apparaît
Versant les philtres de sa lèvre fugitive !

Hélas ! Hélas ! Au fond de l’Erèbe épaissi,
J’entends râler mon coeur criblé comme une cible.
Viendra-t-on te briser, sortilège invincible ? –
Hâte-toi, hâte-toi, bon Devin, car voici

Que l’automne se met à secouer les roses,
Et que les jours rieurs s’effacent au lointain,
Et qu’il va s’éteignant le suave matin :
Et demain, c’est trop tard pour les métamorphoses !

(Jean Moréas)

Illustration

 

2 Réponses vers “Le démoniaque (Jean Moréas)”

  1. Démon-tortue
    ——

    Le diable-tortue chante, et ça nous fait frémir,
    Il réveille les morts au fond des sépultures ;
    C’est très inconfortable, et c’est contre nature,
    Les pauvres trépassés ne peuvent que gémir.

    Aucun ange du ciel ne les vient secourir,
    Ils n’échapperont pas au son qui les torture ;
    Au démon ces défunts sont jetés en pâture,
    Ce n’est pas un cadeau, pour ceux-là, de mourir.

    Un pareil châtiment pour deux ou trois bévues,
    Ils estiment que c’est une peine imprévue ;
    Car ils croyaient trouver le repos dans la mort.

    Nul ne sait apaiser la bête inassouvie
    Ni mettre à la raison ce monstre sans remords ;
    Nous en viendrions presque à regretter la vie.

  2. Diable exoplanétaire
    ————

    Les cornes du démon sont de chrysobéryl,
    Son coeur fut tourmenté par l’amour d’une rose ;
    Il rêve chaque nuit que ses larmes l’arrosent,
    Ses frères, ses amis le trouvent moins viril.

    Cupidon l’interpelle aux premiers jours d’avril,
    Adressant à son âme une allumeuse prose ;
    Mais il ne répond rien, du fond de sa névrose,
    À force de tristesse il se met en péril.

    La démone sourit, mais ça ne sert à rien,
    Ça ne fait qu’aggraver son spleen baudelairien ;
    En vain cette coquine auprès de lui se couche.

    Son malheur divertit les anges dans les cieux,
    Ils se disent entre eux que c’est voulu par Dieu ;
    Pour vrai, ces oiseaux-là m’ont toujours paru louches.

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