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Poésie

Posts Tagged ‘(Venus Khoury Ghata)’

Être berger (Vénus Khoury-Ghata)

Posted by arbrealettres sur 16 avril 2024



Illustration: Castanheira Amilcar
    
Être berger nécessite une parenté de sang avec un loup
des liens avec un brin d’orge ou de luzerne
on échange un fromage contre un bâton
un ballot de laine contre un calendrier
une brebis pleine contre une fille vierge
on apprend l’ignorance aux plantes savantes
l’addition au chien
et au feu de ne pas ronfler en présence des visiteurs

(Vénus Khoury-Ghata)

Recueil: Les mots étaient des loups Poèmes choisis
Traduction: de l’espagnol par Roger Munier
Editions: Gallimard

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Noire la page où je t’écris (Vénus Khoury-Ghata)

Posted by arbrealettres sur 15 mars 2021




    
[…]
noire la page où je t’écris
je t’écris parce que tu ne sais plus écrire que tu
récites sans te tromper l’alphabet du néant

je t’écris sans écrire
les passants marchent sur mes mots
mes consonnes sont rêches mes
voyelles sont nues

je t’écris pour éteindre le feu qui dévore mes doigts dès qu’ils
touchent ton nom

Dieu de l’oubli
dans quelle poche gardes-tu ceux qui partent
et pourquoi permets-tu que l’on se souvienne

(Vénus Khoury-Ghata)

 

Recueil: Demande à l’obscurité
Traduction:
Editions: Mercure de France

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La Dame de Syros (Vénus Khoury-Ghata)

Posted by arbrealettres sur 12 mars 2021



    
La Dame de Syros

Bras croisés sur moi-même
je suis ma propre cage
à la fois prison et prisonnière

Visage absent du visage
nez repérant les morts serrés dans leurs bandelettes
ma silhouette silencieuse régnait
sur toute une nécropole

Le sculpteur de Syros le voulait il
m’avait élaguée tel un arbre malade
tailié le superflu à ma survie
effacé l’excédent à ma
temporalité gardé le cri invisible
le regard gelé tourné vers l’intérieur

Le sculpteur de Syros m’a voulue longiligne
comme un pieu
muette comme l’argile
immobile dans mon ossature
bras croisés au seuil de l’infini

(Vénus Khoury-Ghata)

 

Recueil: La Dame de Syros
Traduction:
Editions: Ekphrasis

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Il est riche d’un soleil (Vénus Khoury-Ghata)

Posted by arbrealettres sur 29 janvier 2020



 

Duy Huynh (18) [1280x768]

Il possède une cage
mais pas de rossignol
un miroir
mais pas de visage
sa maison a un seul mur

Il est riche d’une bougie éteinte
et d’une échelle sans marches

Il détient une craie pour dessiner le vide
un charbon pour dessiner le plein
et des traits pour combler ses silences

Il est riche d’un soleil réduit à un point.

(Vénus Khoury-Ghata)

Illustration: Duy Huynh

 

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Accroupis sur la nuit d’août (Vénus Khoury-Ghata)

Posted by arbrealettres sur 8 octobre 2018




    
Accroupis sur la nuit d’août
les gens des terres creuses applaudissent à chaque chute d’étoile
l’univers disent-ils n’en a pas pour longtemps
les oiseaux qui assuraient l’équilibre entre le haut et le bas ont vieilli
l’horizon tangue à la moindre chute de feuille

un oiseau descendant d’une lignée prestigieuse suit les méandres
de sa plume sur ta page
comment choisir entre deux mots alors qu’il hésite à atterrir
la page est terre inhospitalière et la plume qui écrit fusil de chasseur.

(Vénus Khoury-Ghata)

Découvert ici: http://laboucheaoreilles.wordpress.com/

Recueil: Gens de l’eau
Traduction:
Editions: Mercure de France

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Je t’écris (Vénus Khoury-Ghata)

Posted by arbrealettres sur 6 octobre 2018



Illustration: Francine Van Hove
    
Je t’écris parce que tu ne sais pas lire
que tu récites sans te tromper l’alphabet de la peur
que tu reconnais au toucher l’herbe nourricière
au flair la source en amont du filet d’eau

je t’écris pour te dire mon manque de ta main sur le ventre blanc du bouleau
et de ton désarroi quand pâlissait le maïs

je t’écris sans écrire
les passants piétinent ce que j’écris
mes consonnes ont la peau rêche
mes voyelles sont nues
je t’écris pour éteindre le feu qui dévore mes doigts dès qu’ils touchent ton nom.

(Vénus Khoury-Ghata)

Découvert ici: http://laboucheaoreilles.wordpress.com/

Recueil: Gens de l’eau
Traduction:
Editions: Mercure de France

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Ne crie pas… (Vénus Khoury-Ghata)

Posted by arbrealettres sur 4 septembre 2018



 Illustration: Pascal Renoux
    
Ne crie pas…

Ne crie pas
sollicite à voix basse la sueur écarlate
traîne-la par les cheveux hors du mur circulaire
et de sa rouge meurtrière

Humecte la ligne de partage entre aine et plaine
là où guette l’abeille
celle qui perce le vide
étourdit le sang
enfume labyrinthe et gosier

Ne crie pas te dis-je si tu veux entraîner le monde dans ta noyade
nage en amont en abysses dans un bruit de vagues et de vasques

Refoule l’écume
elle encombre le seuil
obstrue la voûte
réveille par son clapotis barque et timonier

À main basse te dis-je

(Vénus Khoury-Ghata)

 

Recueil: L’Ardeur ABC poétique du vivre plus
Traduction:
Editions: Bruno Doucey

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Septembre attaché au figuier (Vénus Khoury-Ghata)

Posted by arbrealettres sur 31 juillet 2018



Illustration: Marina Katsaros
    
Septembre attaché au figuier
On tournait le dos à l’été ramasseur de noix vides
Siffleur de jeunes abeilles
Les derniers feux de la saint-jean enfumaient les lampes insomniaques
Les encriers

Suspendus à la ceinture du père
On courait moins vite que le paysage
Le chemin risquait d’arriver sans nous à la maison
se lover dans nos lits
renverser l’écuelle du chat
manger les graines jaunes du canari

Mais le père se disait plus long que le chemin
Plus fort que le train
Des épaules de loup au long cours
Des bras hauts comme des madriers
Le père trayait la forêt le fleuve entre chien et crépuscule
fendait d’un coup de hache le froid récalcitrant

Une forge dans sa poitrine le père abritait le feu

Seule l’odeur blanche de la neige le calmait
Ses coulées sur nos murs avaient la douceur du ventre de l’alouette
La compassion des pierres du cimetière

(Vénus Khoury-Ghata)

Découvert ici: https://eleonoreb.wordpress.com/

Recueil: Poème sur « Enfances »
Traduction:
Editions: Printemps des poètes 2012

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C’était novembre (Vénus Khoury-Ghata)

Posted by arbrealettres sur 22 juillet 2018



Illustration: Ivan Renkov
    
C’était novembre

C’était novembre de tous les vacillements
Le crépuscule n’allumait plus les lampes coutumières
Les mains tendues pour arracher un peu de leur lueur à l’obscurité ramassaient des battements d’ailes
La mère ouvrait les bûches froides avec ses ciseaux comme ventre de volaille pour les farcir de crépitements
on essorait du même geste le seuil et le linge
on s’inventait des voisins grandiloquents avec des feux volubiles
on leur inventait des visages et une vaisselle au tintement solennel
stupeur lorsqu’ils déclinaient leurs noms gavés de pierres et le cimetière comme point de ralliement

(Vénus Khoury-Ghata)

Découvert ici: https://eleonoreb.wordpress.com/

Recueil: Où vont les arbres ?
Traduction:
Editions: Mercure de France

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La forêt a peur (Vénus Khoury-Ghata)

Posted by arbrealettres sur 23 mars 2018



 

La forêt a peur
Une forêt peureuse
panique à la vue du soir
Tout l’angoisse
les cris des chouettes
leur silence
Le regard froid de la Lune
et l’ombre de son sourcil sur le lac
Le bouleau claque des dents
en se cachant derrière le garde-champêtre
Le frêne s’emmitoufle dans son écorce
et retient sa respiration jusqu’au matin
Le pin essuie sa sueur
et appelle son père le pin parasol
La tête entre les jambes
le saule pleure à chaudes feuilles
et fait déborder le ruisseau
Le roseau qui ne le quitte pas des yeux
L’entend supplier le ver luisant
d’éclairer les ténèbres
Seul le chêne garde sa dignité
à genoux dans son tronc
il prie le dieu de la forêt
de hâter l’arrivée du jour ..

(Vénus Khoury-Ghata)

Découvert chez Lara ici

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