Pierrot
Prit son coeur,
Et l’accrocha
Au mur du chemin.
Il dit:
« Regardez, les Passants,
Voici mon coeur! »
Mais aucun n’était curieux,
Personne ne se souciait
De voir accroché là
Le coeur de Pierrot
Sur le mur Public.
Aussi Pierrot
Prit son coeur
Et alla le cacher
Très loin.
Maintenant les gens se demandent
Où se trouve son coeur
Aujourd’hui.
***
HEART
Pierrot
Took his heart
And hung it
On a wayside wall.
He said,
« Look, Passers-by,
Here is my heart! »
But no one was curious.
No one cared at all
That there hung
Pierrot’s heart
On the public wall.
La vie passe
Alors que tu rassembles
Une seconde ici
Un moment là
Que tu caches dans un coffre
Entre les vêtements
Pour les jours de joie.
La vie passe
Alors que tu entends les secondes et les moments
Chanter dans le coffre de la joie
Dont tu as perdu la vieille clef
Accrochée autour de ton cou
A un fil vert
Comme font les vieillards.
***
(Hala Mohammad)
Recueil: Ce peu de vie
Traduction: Antoine Jockey
Editions: Al Manar
La main du soldat mort
est restée accrochée à l’arbre,
l’index sur la gâchette du fusil.
Tant d’étoiles, ses victimes.
Ohé, soldat,
tu nous fais un ciel de fête.
C’est l’été.
Les amoureux ont le plus beau toit.
Ohé, soldat, tu dors;
mais qui te voit?
Ah ! C’est ça.
C’est ça qui m’a perturbé
tant ce matin :
le désir m’est revenu
et j’ai de nouveau envie de toi.
Je m’en sortais si bien,
j’étais au-dessus de tout ça.
Garçons et filles étaient beaux
et j’étais un vieil homme, qui aime tout le monde.
Et voilà que j’ai de nouveau envie de toi,
j’ai envie de ton attention absolue,
de tes dessous roulés en hâte
encore accrochés à l’un de tes pieds
et de n’avoir rien à l’esprit
que d’être au-dedans
du seul endroit qui n’a
ni dedans,
ni dehors.
***
Disturbed This Morning
Ah. That.
That’s what I was so disturbed
about this morning:
my desire has come back,
and I want you again.
I was doing so fine,
I was above it all.
The boys and girls were beautiful
and I was an old man, loving everyone.
And now I want you again,
I want your absolute attention,
your underwear rolled down in a hurry
still hanging on one foot,
and nothing on my mind
but to be inside
the only place
that has
no inside,
and no outside.
(Leonard Cohen)
Recueil: Le livre du désir
Traduction: Jean-Dominique Brierre et Jacques Vassal
Editions: Cherche Midi
J’ai fait un voyage, ô Loegaire,
un voyage à la terre des Ombres.
La forteresse des Ombres avait des serrures de fer,
mais j’y ai posé la main.
Sept murs entouraient la cité,
haineuse était cette forteresse,
une palissade en fer sur chaque mur,
sur laquelle sept têtes étaient fichées.
Il y avait des portes de fer de chaque côté,
mais ce n’était pas même une défense contre des femmes,
je les ai frappées avec mon pied
si bien qu’elles sont tombées en morceaux.
Il y avait une fosse dans la forteresse,
celle du roi, disent-ils.
Dix serpents jaillissaient
de ses bords. Ce fut un haut fait.
Je courus vers eux,
et bien que leur nombre fut grand,
je les mis en morceaux
entre mes deux pouces.
Il y avait une maison pleine de crapauds
qui s’avancèrent vers nous.
C’étaient des bêtes à la tête pointue,
ils se collèrent à mon visage.
Des monstres horribles comme des dragons
furent lachés contre nous.
Puissants étaient leurs sortilèges.
Bien qu’ils (fussent terribles),
je courus vers eux
et lorsque je (les atteignis) ,
je les réduisis en petits morceaux
entre mes deux paumes
Il y avait un chaudron en cette forteresse.
Il ruisselait d’or et d’argent, quelle splendide découverte !
Ce chaudron (nous) fut donné
par la fille du roi.
Nous emmenâmes trois vaches.
Elles nagèrent sur la mer.
Il y avait un chargement d’or
pour deux hommes sur leur dos.
Quand nous partîmes sur l’océan
qui était vaste, vers le nord,
les hommes de mon bateau furent noyés
par la cruelle tempête.
Alors je portai,
bien que ce fût dangereux,
neuf hommes sur chacune de mes mains,
trois sur ma tête
et huit sur mes deux flancs,
accrochés à mon corps.
Ainsi je nageai sur la mer
jusqu’à parvenir au port.