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Poésie

Posts Tagged ‘alourdir’

La traversée du Fongmu Ling (Gu Lin)

Posted by arbrealettres sur 13 décembre 2022




Illustration: Shan Sa
    
La traversée du Fongmu Ling

Le doigt tendu vers la cime embrumée
Indique la haute frontière indécise, entre terre et ciel.
Voilà la montagne magnifique
Qu’aucun oiseau en son vol n’a jamais dépassée.
Qui saurait franchir ces hauts degrés de pierre ?
Nos mains s’agrippent le long des sentiers sinueux.
À chaque pas gagné, l’abîme grandit devant mes yeux terrifiés
Et la brume généreuse empoisse mes vêtements alourdis.
Je m’empourpre des derniers traits du soleil qui meurt,
Tandis qu’à mesure, c’est la vallée qui s’enténèbre.
Mon pays natal me rappelle alors et détourne vers lui mon regard.
Je vois les flots hardis du grand fleuve ;
Je sens le souffle vif des confins du monde.
Comment rester debout quand tout vous porte à être à genoux.

(Gu Lin)

(1476-1545)

 

Recueil: Nuages immobiles Les plus beaux poèmes des seize dynasties chinoises
Traduction: Alexis Lavis
Editions: l’Archipel

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Chant du départ (Yang Jiong)

Posted by arbrealettres sur 13 décembre 2022



Illustration: Shan Sa
    
Chant du départ

Les feux de guerre ont illuminé la capitale de l’ouest,
Il n’est personne aujourd’hui dont le coeur soit tranquille ;
La tablette d’ivoire a fait ses adieux à la porte du phénix,
Des cavaliers bardés de fer entourent la ville impériale.
La neige alourdit de ses flocons les étendards glacés ;
La voix furieuse du vent se mêle au bruit des tambours.
Voici donc revenu ce temps, où le chef de cent soldats
Est tenu en plus haute estime qu’un lettré de science et de talent !

(Yang Jiong)

(622-690)

Recueil: Nuages immobiles Les plus beaux poèmes des seize dynasties chinoises
Traduction: Alexis Lavis
Editions: l’Archipel

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Si tu as touché mon corps (Guy Lévis Mano)

Posted by arbrealettres sur 16 mai 2019



 

Lauri Blank -    (1)

Si tu as touché mon corps
draine dans tes doigts beaucoup de lumière
ne t’en va pas avec le désir
alourdissant tes reins comme une obsession de plomb
si tu as touché mon corps
éteins tes prunelles et laisse vierge le silence

celles qui sont parties sans rien dire
avec leurs mains chaudes et humides
ont eu autre chose que mon sourire

(Guy Lévis Mano)

Illustration: Lauri Blank

 

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LE VILLAGE (Roland Brachetto)

Posted by arbrealettres sur 24 décembre 2018



LE VILLAGE

Le village quadrille le soleil
damier de soufre et de salpêtre
pêcherie des souffrances tues

Le long apprentissage à n’être rien
en nos veines descend monacale brûlure
et l’orgueil se consume
et chaque ombre ferme son poing
sur un vacillement de vie
telle une lampe à jamais sous le vent
s’enferme en sa fragilité

Ô ces longs regards sous la pierre
qu’ouvre tout grand la lourde obscurité
toujours prompte à peser dans les choses
L’absence d’espérer alourdit les paupières
jusqu’au nocturne poids du végétal

Amère finitude
qui restreint l’âme à la chair
la chair à la faim la faim à la nuit

(Roland Brachetto)

Illustration

 

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Joyeuse (Jean Pérol)

Posted by arbrealettres sur 3 novembre 2018




    
Joyeuse

Souviens-toi de septembre La saveur des sourires
alourdissait nos jours comme aucun fruit les branches
cet automne où soudain le verbe désunir
disparut sous la joie comme sous l’avalanche

Moi je fermais les yeux ce jour dont je te parle
de nuit je descendais les escaliers secrets
de ton corps et j’entendais dans la haute salle
de ton coeur des femmes surprises qui riaient.

(Jean Pérol)

 

Recueil: Poésie I (1953-1978)
Traduction:
Editions: De la Différence

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Le chardon mauve (Hédi Kaddour)

Posted by arbrealettres sur 9 mars 2018



Le chardon mauve

dans l’heure grise
la brume
alourdit un bruit lointain de pas
les objets
se carrent dans l’oubli
à ras de terre
un chardon capte seul
de quoi rester mauve

(Hédi Kaddour)

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Ne passez pas le temps à mentir à la mort (Claude Roy)

Posted by arbrealettres sur 7 février 2018



 

Antoine Wiertz   Deux-jeunes-filles-La-Belle-Rosine-1847-Antoine-Wiertz

Ne passez pas le temps à mentir à la mort
c’est un jeu décevant
Ne passez pas vos jours à vous passer de vie
Ne passez pas l’amour à vous passer de temps
Ne passez pas le temps à attendre la nuit
ni les neiges d’antan
Car votre mort en vous se moque de vos pièges
et se glisse au serré du plus tendre baiser
remonte à la surface et plus vive que liège
plus souple que l’osier
s’empare de ce coeur qui se croyait léger
l’alourdit le surprend le presse et le défait
et fait de ce vivant de vivre soulagé
un mort très stupéfait.

(Claude Roy)

Illustration: Antoine Wiertz 

 

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Nuit d’exil (Jean Joubert)

Posted by arbrealettres sur 1 décembre 2017



Ainsi je fus, dans cette nuit d’exil,
prison et prisonnier et lueur à la fissure,
indéchiffrable signe en moi-même gravé,

exilé dans mon corps, dans ce fuseau de pierre,
oisif et prisonnier de lianes et de nerfs,
aveugle, traversant une secrète nuit

de bêtes enlacées, d’insectes et de dards,
où s’effrite la pierre, où s’usent le regard
et la bouche et le coeur à des limes funèbres,

m’alourdissant de tous mes songes, terrassé
par des meutes sorties de l’eau, dont les abois
cernaient, traquaient les gestes et les voix.

Je poursuivais un souvenir de branche
et de neige, un souvenir d’oiseau volant bas
dans le silence pourpre d un ciel pulmonaire,

sur un rivage où neige, branche, oiseau
n’étaient que l’ombre exsangue et plus lointaine
d’une beauté violente en fuite sur les eaux.

(Jean Joubert)

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PLAISIR D’UNE NUIT D’ÉTÉ (La Flûte de Jade)

Posted by arbrealettres sur 10 janvier 2017



Shizuo Ashikaga Fauvette D

PLAISIR D’UNE NUIT D’ÉTÉ

Nous nous éloignons de la montagne bleue, et la lune nous suit.
La rosée alourdit nos manches.
Nous nous retournons
afin d’évaluer la distance que nous avons parcourue,
mais une brume blanchâtre noie la campagne.

La main dans la main,
nous voici devant la barrière de la rustique demeure
où des amis nous attendent.

A présent, nous cheminons dans un sentier bordé de bambous
qui nous frôlent au passage.

Nous sommes tous réunis. Quel bonheur!
On me verse du vin parfumé.
Je chante la Chanson du Vent dans les Pins.
Les rossignols, les grenouilles et les insectes chantent aussi.

(La Flûte de Jade)

 Illustration: Shizuo Ashikaga 

 

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HYMNE A LA PITIE (Giuseppe Ungaretti)

Posted by arbrealettres sur 16 juillet 2016



 

HYMNE A LA PITIE

Je suis un homme blessé.

J’aurais besoin de m’enfuir
là, où tu écoutes
Pitié, l’homme seul.

Je n’ai qu’orgueil et que bonté.

*

Je vis en exil chez les hommes,
et d’eux seuls je suis en souci.

Suis-je indigne d’entrer en moi ?

*

J’ai peuplé de noms le silence,
j’ai dépecé coeur et esprit
pour m’enchaîner aux mots

Et je règne sur les fantômes.

*

Feuilles sèches, âme qui s’en va
de-ci de-là…
Non, je hais le vent, et sa voix
de bête immémoriale.

*

0 mon Dieu, tous ceux qui t’implorent
ne connaissent plus que ton nom.

Toi qui m’as chassé de la vie,
me chasseras-tu de la mort ?

L’homme n’est-il même plus
digne d’espérer ?

Périsse le monde, si tu te penches
au balcon bleu du paradis.

*

Tarie la source du remords ?

Qu’importe le péché, s’il ne mène
A la pureté.

*

La chair se rappelle à peine
qu’elle était forte jadis,
la vieille âme est vague et folle.

Dieu, regarde notre faiblesse.

*

Nous voulons quelque certitude.

Tu ne ris même plus de nous ?

Et plains-nous donc, cruauté,
nous voulons souffrir et chanter.

*

Je n’en peux plus, d’être muré
dans un désir sans amour.

Montre-nous donc quelques traces
de justice.

Où sont les lois ? quelle est ta loi ?
Et foudroie nos pauvres émois.

*

Accorde-moi le silence,
délivre-moi de l’inquiétude.

Je suis las de chanter sans voix.

Veux-tu m’apprendre à prier.

*

Et toi, chair mélancolique
où jadis pullulait la joie,
OEil mi-clos de l’éveil las,
rêves-tu, âme trop mûre,
d’un nid de terre ?

*

Le chemin des morts est en nous.

Nous sommes le fleuve des ombres.

Elles sont le grain qui éclate dans nos rêves,

elles ont la légèreté des vues lointaines.

La seule distance qui nous reste nous vient d’elles.

Leur ombre alourdit nos mots.

*

Ne pouvons-nous espérer
qu’amas d’ombre ?

N’es-tu qu’un songe,
Dieu ?

Ma démence
plus claire l’enfante.

Il ne tremble pas au fil des paupières
comme les moineaux surgis
du secret des branches.

Il demeure et languit en nous,
plaie mystérieuse.

*
Nous perçons le réel
d’un fil de lumière
de plus en plus subtil.

Ne sais-tu plus éblouir
sans tuer ?

Alors donne-nous
cette joie suprême.

*

Ame, pauvre âme, chair encore vorace
sous le tourment oblique…

Homme, morne univers,
tu crois élargir ton domaine
et sans cesse tes mains ne produisent
que bornes.

*

Suspendue sur l’abîme
à un fil toujours plus frêle,
elle ne craint tour à tour
et ne charme,
âme bercée, âme perdue,
que son cri.

Pour réparer l’usure,
nous dressons des tombeaux,
et pour te penser, Eternel,
nous n’avons que blasphèmes.

(Giuseppe Ungaretti)

Illustration: Gilbert Garcin

 

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