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Poésie

Posts Tagged ‘ascète’

Apparition (Titi Robin)

Posted by arbrealettres sur 19 septembre 2022




    
Apparition

La beauté est divine
et, plus qu’humaine,
elle naît pourtant d’un simple regard,
des gestes de la servante,
du reflet de sa silhouette dans le lac de Pushkar,
du souvenir de son parfum mêlé à la sueur laiteuse,
du chant du qawwal, prière passionnée,
de l’abandon et de la possession des corps,
de la fatigue qui suit l’effort,
du sourire du gamin édenté comme du silence de l’ascète,
de ton refus digne comme de ma confiance inébranlable.
Hafez l’a si bien dit,
elle est comme la nouvelle lune qui éclaire doucement le chemin des égarés,
puis se retire sous le voile des nuages.

(Titi Robin)

Rajasthan, un voyage aux sources gitanes, 2004.

 

Recueil: La Beauté Éphéméride poétique pour chanter la vie
Traduction:
Editions: Bruno Doucey

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Un homme voulait se faire ascète (Rabindranath Tagore)

Posted by arbrealettres sur 1 juillet 2021




    
Un homme voulait se faire ascète. Une belle nuit, il déclara :
« Le moment est venu pour moi d’abandonner ma demeure et de chercher Dieu.
Ah! qui donc m’a retenu si longtemps ici dans les trompeuses illusions? »

Dieu murmura : « Moi »; mais l’homme ne comprit pas.
Il dit : « Où es-tu, Toi qui t’es joué si longtemps de moi? »
A ses côtés sa femme était paisiblement étendue sur le lit, un bébé endormi sur son sein.

La voix reprit : «Dieu, il est là », mais l’homme n’entendit pas.
Le bébé pleura en rêve, se pelotonnant plus près de sa mère.

Dieu ordonna : « Arrête, insensé, ne quitte pas ta maison »
— mais il n’entendit pas encore.

Dieu soupira et dit avec tristesse :
« Pourquoi mon serviteur croit-il me chercher quand il s’éloigne de moi? »

(Rabindranath Tagore)

 

Recueil: Le jardinier d’amour La jeune Lune
Traduction: Mme Sturge Moore
Editions: Gallimard

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Dies irae (Leconte de Lisle)

Posted by arbrealettres sur 27 janvier 2019



Dies irae

Il est un jour, une heure, où dans le chemin rude,
Courbé sous le fardeau des ans multipliés,
L’Esprit humain s’arrête, et, pris de lassitude,
Se retourne pensif vers les jours oubliés.

La vie a fatigué son attente inféconde ;
Désabusé du Dieu qui ne doit point venir,
Il sent renaître en lui la jeunesse du monde ;
Il écoute ta voix, ô sacré Souvenir !

Les astres qu’il aima, d’un rayon pacifique
Argentent dans la nuit les bois mystérieux,
Et la sainte montagne et la vallée antique
Où sous les noirs palmiers dormaient ses premiers Dieux.

Il voit la Terre libre et les verdeurs sauvages
Flotter comme un encens sur les fleuves sacrés,
Et les bleus Océans, chantant sur leurs rivages,
Vers l’inconnu divin rouler immesurés.

De la hauteur des monts, berceaux des races pures,
Au murmure des flots, au bruit des dômes verts,
Il écoute grandir, vierge encor de souillures,
La jeune Humanité sur le jeune Univers.

Bienheureux ! Il croyait la Terre impérissable,
Il entendait parler au prochain firmament,
Il n’avait point taché sa robe irréprochable ;
Dans la beauté du monde il vivait fortement.

L’éclair qui fait aimer et qui nous illumine
Le brûlait sans faiblir un siècle comme un jour ;
Et la foi confiante et la candeur divine
Veillaient au sanctuaire où rayonnait l’amour.

Pourquoi s’est-il lassé des voluptés connues ?
Pourquoi les vains labeurs et l’avenir tenté ?
Les vents ont épaissi là-haut les noires nues ;
Dans une heure d’orage ils ont tout emporté.

Les grandes visions sous les cèdres pensifs,
Et la Liberté vierge et ses cris magnanimes,
Et le débordement des transports primitifs !

L’angoisse du désir vainement nous convie :
Au livre originel qui lira désormais ?
L’homme a perdu le sens des paroles de vie :
L’esprit se tait, la lettre est morte pour jamais.

Nul n’écartera plus vers les couchants mystiques
La pourpre suspendue au devant de l’autel,
Et n’entendra passer dans les vents prophétiques
Les premiers entretiens de la Terre et du Ciel.

Les lumières d’en haut s’en vont diminuées,
L’impénétrable Nuit tombe déjà des cieux,
L’astre du vieil Ormuzd est mort sous les nuées ;
L’Orient s’est couché dans la cendre des Dieux.

L’Esprit ne descend plus sur la race choisie ;
Il ne consacre plus les Justes et les Forts.
Dans le sein desséché de l’immobile Asie
Les soleils inféconds brûlent les germes morts.

Les Ascètes, assis dans les roseaux du fleuve,
Écoutent murmurer le flot tardif et pur.
Pleurez, Contemplateurs ! votre sagesse est veuve :
Viçnou ne siège plus sur le Lotus d’azur.

L’harmonieuse Hellas, vierge aux tresses dorées,
À qui l’amour d’un monde a dressé des autels,
Gît, muette à jamais, au bord des mers sacrées,
Sur les membres divins de ses blancs Immortels.

Plus de charbon ardent sur la lèvre-prophète !
Adônaï, les vents ont emporté ta voix ;
Et le Nazaréen, pâle et baissant la tête,
Pousse un cri de détresse une dernière fois.

Figure aux cheveux roux, d’ombre et de paix voilée,
Errante au bord des lacs sous ton nimbe de feu,
Salut ! l’Humanité, dans ta tombe scellée,
Ô jeune Essénien, garde son dernier Dieu !

Et l’Occident barbare est saisi de vertige.
Les âmes sans vertu dorment d’un lourd sommeil,
Comme des arbrisseaux, viciés dans leur tige,
Qui n’ont verdi qu’un jour et n’ont vu qu’un soleil.

Et les sages, couchés sous les secrets portiques,
Regardent, possédant le calme souhaité,
Les époques d’orage et les temps pacifiques
Rouler d’un cours égal l’homme à l’Éternité.

Mais nous, nous, consumés d’une impossible envie,
En proie au mal de croire et d’aimer sans retour,
Répondez, jours nouveaux ! nous rendrez-vous la vie ?
Dites, ô jours anciens ! nous rendrez-vous l’amour ?

Où sont nos lyres d’or, d’hyacinthe fleuries,
Et l’hymne aux Dieux heureux et les vierges en choeur,
Eleusis et Délos, les jeunes Théories,
Et les poèmes saints qui jaillissent du coeur ?

Oh ! la tente au désert et sur les monts sublimes,
Où sont les Dieux promis, les formes idéales,
Les grands cultes de pourpre et de gloire vêtus,
Et dans les cieux ouvrant ses ailes triomphales
La blanche ascension des sereines Vertus ?

Les Muses, à pas lents, Mendiantes divines,
S’en vont par les cités en proie au rire amer.
Ah ! c’est assez saigner sous le bandeau d’épines,
Et pousser un sanglot sans fin comme la Mer !

Oui ! le Mal éternel est dans sa plénitude !
L’air du siècle est mauvais aux esprits ulcérés.
Salut, Oubli du monde et de la multitude !
Reprends-nous, ô Nature, entre tes bras sacrés !

Dans ta khlamyde d’or, Aube mystérieuse,
Éveille un chant d’amour au fond des bois épais !
Déroule encor, Soleil, ta robe glorieuse !
Montagne, ouvre ton sein plein d’arôme et de paix !

Soupirs majestueux des ondes apaisées,
Murmurez plus profonds en nos coeurs soucieux !
Répandez, ô forêts, vos urnes de rosées !
Ruisselle en nous, silence étincelant des cieux !

Consolez-nous enfin des espérances vaines :
La route infructueuse a blessé nos pieds nus.
Du sommet des grands caps, loin des rumeurs humaines,
Ô vents ! emportez-nous vers les Dieux inconnus !

Mais si rien ne répond dans l’immense étendue,
Que le stérile écho de l’éternel Désir,
Adieu, déserts, où l’âme ouvre une aile éperdue !
Adieu, songe sublime, impossible à saisir !

Et toi, divine Mort, où tout rentre et s’efface,
Accueille tes enfants dans ton sein étoilé ;
Affranchis-nous du temps, du nombre et de l’espace,
Et rends-nous le repos que la vie a troublé !

(Leconte de Lisle)

Illustration: Jean-Claude Forez

 

 

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Collectionneur d’étoiles (Alexàndra Galanou)

Posted by arbrealettres sur 15 avril 2018



Illustration: Alain Chayer
    
Collectionneur d’étoiles le Poète
Pêcheur de rêves
Ascète de l’infime
Danseur de la transparence
Initiateur de l’instant hors du temps

(Alexàndra Galanou)

 

Recueil: Dans les recoins des mots
Traduction:
Editions: Circé

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Ladakh (André Velter)

Posted by arbrealettres sur 15 décembre 2017



Ladakh

Hors limite, hors refuge,
oubliés bergers, ascètes, vautours,
l’acharnement du vivace,
la floraison en longue attente
de semailles in-extremis,
avec armoises aux lèvres des glaciers
et lichens pareils à de la cendre d’étoile.
C’est au pays des cols,
au pays sans repos,
royaume toujours perdu,
que l’on passe par le haut.

(André Velter)

 

 

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Le Poète (Renée Vivien)

Posted by arbrealettres sur 17 août 2017



Illustration  
    
Le Poète

Il porte obscurément la pourpre du poète,
Ce passant qu’on rencontre au détour du chemin,
Vers lequel nul ne tend sa secourable main
Et qui lève vers l’aube un front large d’ascète.

Mais sous le grand manteau percé de mille trous,
Si vieux qu’il est pareil aux innombrables toiles
Que l’araignée a su tramer sous les étoiles,
S’ouvrent ses yeux divins, prophétiques et fous.

Cet inconnu c’est le poète en son passage,
Et le vent du chemin lui dicte, ainsi qu’un dieu
Dicte un ordre divin, son chant impérieux…
… Mais, hélas ! nul n’entend le merveilleux message.

Toi, dont le vent clément rafraîchit le front nu,
Tu n’oses même pas solliciter l’Aumône,
Mais les siècles futurs te verront sur un trône,
Couronné de rayons, ô divin Inconnu !

(Renée Vivien)

 

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Dans chaque demeure (Kabîr)

Posted by arbrealettres sur 22 mai 2017



 

    
Dans chaque demeure brûlent des lampes;
Aveugle que tu es, tu ne les vois pas.

Un jour, tes yeux s’ouvriront soudain et tu verras;
et les chaînes de la mort tomberont d’elles-mêmes.

Il n’y a rien à dire et rien à entendre; il n’y a rien à faire :
c’est celui qui vit, bien que mort, qui ne mourra plus jamais.

Parce qu’il vit dans la solitude,
l’ascète déclare que Sa maison est lointaine.

Ton Seigneur est près de toi
et cependant tu montes en haut du palmier pour Le chercher.

Le prêtre Brahmane va de maison en maison
et initie le peuple à la foi musulmane;

Hélas ! la vraie fontaine de vie est à tes côtés
et tu adores la pierre que tu as dressée.

Kabîr dit : « Je ne puis dire combien mon Seigneur est adorable.
— L’ascétisme, le chapelet qu’on égrène, les vertus et les vices,
rien de tout cela n’existe pour Lui. »

(Kabîr)

 

 

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Ô Seigneur (Kabîr)

Posted by arbrealettres sur 19 avril 2017



Ô Seigneur incréé qui Te servira ?
Chaque fidèle adore le Dieu qu’il se crée;
chaque jour il en reçoit des faveurs.

Aucuns ne le cherchent Lui,
le Parfait, Brahma, l’indivisible Seigneur.

Ils croient en dix Avatars;
mais un Avatar, endurant les conséquences de ses actes,
ne peut être l’Esprit infini.
L’Un Suprême doit être autre.

Les Yogi, les Sangasi,
les Ascètes se disputent entre eux.

Kabîr dit : « Ô frère celui qui a vu le rayonnement de son amour, celui-là est sauvé. »

(Kabîr)

 

 

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La victoire sur son âme (Kabîr)

Posted by arbrealettres sur 7 novembre 2016



Le caractère est inhérent à l’âme :
Qui donc a jamais obtenu le salut en triomphant de son âme?
Où donc est l’ascète qui a vaincu son âme?
Dis-moi, qui donc a jamais obtenu la Délivrance par la défaite de l’âme?

Pourtant, chacun éprouve cette certitude au fond de l’âme :
Le prix de l’amour divin, c’est la victoire sur son âme…

Ceux qui ont pénétré ce mystère, dit Kabîr,
Contemplent en leur âme le Seigneur, le Maître de l’Univers.

(Kabîr)


Illustration: Eugène Delacroix

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Le Singe, est éveillé (Kabîr)

Posted by arbrealettres sur 7 novembre 2016



Tous sont égarés, nul n’est éveillé,
Ainsi le Voleur en profite pour piller la maison!

Les Pandit se sont égarés en lisant les Purâna,
Les Yogî se sont égarés dans leurs méditations;

Les ascètes se sont égarés dans leur orgueil,
Les pénitents se sont égarés dans leurs pratiques de pénitence;

Seuls sont éveillés Cukadeva, Udhâva, Akrûra,
Hanumat, le Singe, est éveillé

(Kabîr)

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