I
Ma France à moi elle est joyeuse
Elle dit bonjour et comment allez-vous
Mais elle sait dire non elle est frondeuse
On ne la f’ra jamais mettre à genoux
Ma France à moi celle que j’adore
Celle qui chantait le chant des partisans
Celle des Klarsfeld celle de Senghor
Celle de Prévert et la France des paysans
France de Stendhal Chamfort Molière
France de Balzac La Fontaine et Victor
Des frères Lumière d’Apollinaire
D’Alfred Jarry des chants de Maldoror
Ma France à moi qu’avant tout j’aime
C’est celle de la liberté d’expression
Les mots d’amour voire les blasphèmes
Sont l’essentiel de ma respiration
II
France de Matisse Monet Soulages
France de Desproges et des tweets de Pivot
France de Coluche France du partage
France de Daumier Gotlib et Picasso
Ma France à moi peut-êt’ croyante
Mais a parfaitement le droit d’être athée
Bible ou Coran si ça lui chante
Elle dit pardon c’est pas ma tasse de thé
Ma France à moi elle est gourmande
D’accordéon de jazz et de Verdi
Elle chérit ses enfants d’légende
Ceux du Vel’ d’hiv’ et ceux du paradis
L’obscurantisme d’un autre âge
Les fanatismes elle en a fait son deuil
Aucun racisme aucun clivage
Ne sont bienv’nus sur sa terre d’accueil
III
Nos femmes en France embrassent et dansent
Libres d’aimer d’faire valser les textos
Z’apprécient guère qu’on les tabasse
Ni d’êt’ voilées ce n’sont pas des bateaux
Eh oui ma France adore ses femmes
Les Barbara Colette Marie Curie
Les De Beauvoir celles qui s’enflamment
Lucie Aubrac Simone Veil Adjani
Ma France de Jaurès fût compagne
Et des savants des chercheurs elle raffole
Jules Ferry Pasteur Charlemagne
C’est grâce à eux qu’on va tous à l’école
Bien sûr ma France elle est laïque
De penser libre et libre de parole
C’est la France de la république
Les religions s’apprenn’ pas à l’école
IV
Cette France que certains haïssez
A ceux qui l’aiment il vous faut la laisser
Cette chanson libre jaillie d’mon cœur
J’aim’rais qu’les écoliers l’apprenn’ par cœur
Car cette Franc’-là tel est mon vœu
Je souhait’ qu’elle soit demain leur France à eux
Que l’Imam prie
Que le prêtre jeûne
Et que l’athée dorme
Quelle importance
Chacun voit son Dieu dans le ciel
Il lui parle en silence
Il lui crie ses souffrances
Gardez vos croyances dans vos âmes
Et aimez-vous pardon
Dans les tombes, vous êtes tous poussière
Et puis quoi?
Kadjatou Xialong Yung
Je déjeune en mafé
Je dîne en sushi
Les yeux émincés
Le nez gros
Une pincée de sel dans mon identité
Quelle chance!
Il paraît que Paris c’est la crise
Et que la France est faillite
Haa, reprenons nos valises
Il paraît que là-bas c’est le paradis
L’hiver fait six mois, quelle importance
Ici les cinquante degrés durent une éternité
Il paraît qu’il y a assurance maladie là-bas
Haa Ébola et sida on s’en fout
Ici l’hôpital c’est la morgue
Et la morgue un reposoir
J’ai vu mon frère offrir sa femme
Pour payer la traversée
J’ai vu ma soeur s’ouvrir à l’inconnu
J’ai vu le viol consenti
Pour fuir le dénuement
La voix libératrice
S’est tue
Depuis, je maudis
Le langage du silence
(Adelle Barry)
Recueil: 120 nuances d’Afrique
Traduction:
Editions: Bruno Doucey
la planète serait bien plus pacifique si nous étions tous athées.
La nature humaine étant ce qu’elle est,
il est clair que d’autres prétextes ne manqueraient pas à toutes les bisbilles possibles et imaginables,
mais nous serions libérés de cette idée infantile et ridicule de croire
que notre Dieu est le meilleur de tous les dieux qu’on trouve par ici
et que le paradis qui nous attend est un hôtel cinq étoiles.
Plus encore, je crois que nous réinventerions la philosophie.
(José Saramago)
Recueil: Le Cahier
Traduction: Marie Hautbergue
Editions: Le Cherche Midi