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Poésie

Posts Tagged ‘aux aguets’

L’étendue vibre (Andrée Chedid)

Posted by arbrealettres sur 23 décembre 2023




    
L’étendue vibre

Au fond des criques intimes
Où les ressacs rongent nos fibres et nos tissus
Nous oublions
tapis dans nos chagrins
Qu’au loin qu’autour
L’étendue vibre

Comment y pénétrer ?
Comment surgir de ces ravages ?
Extirper l’âme de ses dégâts ?

Comment restituer beauté à la beauté ?

Comment soutenir
même d’un coeur en fracture
Le jeu précaire et prodigue
De cette vie
Aux aguets ?

(Andrée Chedid)

Recueil: Andrée Chedid Poèmes
Editions: Flammarion

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Jardin sauvage (Sagiterra)

Posted by arbrealettres sur 17 janvier 2019



 

Mante_religieuse_

Jardin sauvage ~
aux aguets sur un muret
la mante religieuse

(Sagiterra)

Illustration

 

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La bougie (Katherine Mansfield)

Posted by arbrealettres sur 8 janvier 2018



La bougie

Sur une petite table ronde, à côté de mon lit,
Ma Grand-mère posa une bougie.
Trois baisers elle me donna,
Les appelant trois rêves,
Et me borda comme j’aimais être bordée.
Puis elle quitta la chambre et referma la porte.
Je ne bougeai pas, attendant que mes trois rêves parlent,
Mais ils restèrent silencieux.
Soudain je me rappelai lui avoir rendu ses trois baisers.
Peut-être par mégarde lui avais-je donné mes rêves…
Je m’assis toute droite dans le lit.
La chambre s’agrandit, devint plus vaste qu’une église;
L’armoire à elle seule était plus haute qu’une maison
Et la cruche sur le lavabo m’adressa un sourire:
Un sourire peu amical.
Je regardai la chaise d’osier sur laquelle
Mes vêtements reposaient pliés.
Elle craqua comme si elle se tenait aux aguets.
Peut-être allait-elle s’animer, s’habiller de mes vêtements.
Mais le pire c’était la fenêtre:
Impossible d’imaginer ce qu’il y avait dehors.
Pas d’arbre en vue, de cela j’étais sûre,
Pas de plante familière ni d’allée de gravier rassurante.
Pourquoi baissait-on le store chaque nuit?
Il fallait que je sache.
Serrant les dents, je sortis du lit;
A travers une fente du store je jetai un coup d’oeil:
Il n’y avait rien à voir
Que des centaines de bougies clignotant dans le ciel
A la mémoire d’enfants apeurés.
Je me recouchai.
C’est alors que les trois rêves se mirent à chanter.

***

The candle

By my bed, on a little round table
The Grandmother placed a candle.
She gave me three kisses telling me they were three dreams
And tucked me in just where I loved being tucked.
Then she went out of the room and the door was shut.
I lay still, waiting for my three dreams to talk ;
But they were silent.
Suddenly I remembered giving her three kisses back.
Perhaps, by mistake, I had given my three little dreams.
I sat up in bed.
The room grew big, oh, bigger far than a church.
The wardrobe, quite by itself, as big as a house.
And the jug on the washstand smiled at me:
It was not a friendly smile.
I looked at the basket-chair where my clothes lay folded:
The chair gave a creak as though it were listening for something
Perhaps it was coming alive and going to dress in my clothes.
But the awful thing was the window :
I could not think what was outside.
No tree to be seen, I was sure,
No nice little plant or friendly pebbly path.
Why did she pull the blind down every night?
It was better to know.
I crunched my teeth and crept out of bed,
I peeped through a slit of the blind.
There was nothing at all to be seen.
But hundreds of friendly candles all over the sky
In remembrance of frightened children.
I went back to bed…
The three dreams started singing a little song.

(Katherine Mansfield)


Illustration: Christine Pultz

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Promenade (Anna Akhmatova)

Posted by arbrealettres sur 11 octobre 2017



Promenade

Mon aigrette heurtait le toit de la voiture.
J’ai regardé ses yeux.
Mon coeur languissait sans même savoir
Les raisons de son chagrin.

Le soir sans vent se figeait de tristesse
Sous la voûte d’un ciel tout en nuages,
Le Bois de Boulogne avait l’air
D’un dessin à l’encre dans un vieil album.

Odeur d’essence et de lilas,
Calme constamment aux aguets…
Il a encore touché mes genoux
D’une main qui tremblait à peine.

(Anna Akhmatova)

Illustration: Henri de Toulouse-Lautrec

 

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La maison des crânes (Claude Adelen)

Posted by arbrealettres sur 2 mars 2017



la maison des crânes
montre aux fenêtres
le sombre
entassement
peste famine ou guerre

toujours tournée vers nous
non regard
ces orbites ce silence aux
aguets

(Claude Adelen)

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L’Île (Carlos Drummond de Andrade)

Posted by arbrealettres sur 17 avril 2016



L’Île

Dessus les quatre bancs de ciment
de l’île du Parc sont installés
avec tenue des plus réservées
pudiques quatre couples d’amants.

Les îles toujours sont une invite
à des idylles sans simagrées
mais ici l’on trace la limite
des actes et de la volonté.

Les couples se regardent, discrets,
en espérant que l’un d’entre eux ose
délivrer les instincts aux aguets
et mettre un terme à ces fausses poses.

Nul ne s’enhardit à délivrer
tant de caresses qui rêvent d’être.
Un lourd rideau de bure est tiré
voilant le frémissement de vivre.

Jour si léger! L’écureuil, le vert,
ciel favorable, en complicité…
Mais on voit bien que tout cela sert
de décor à la duplicité.

L’amour y perd encore un pari
dans cette Cythère provinciale.
Il est tard. On ferme le Parc. Rien
ne se produit en bien ni en mal.

(Carlos Drummond de Andrade)

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Siramour (Robert Desnos)

Posted by arbrealettres sur 22 novembre 2015



 

Siramour

Semez, semez la graine
Aux jardins que j’avais.
Je parle ici de la sirène idéale et vivante,
De la maîtresse de l’écume et des moissons de la nuit
Où les constellations profondes comme des puits grincent de toutes
leurs poulies et renversent à pleins seaux sur la terre et le sommeil
un tonnerre de marguerites et de pervenches.
Nous irons à Lisbonne, âme lourde et coeur gai
Cueillir la belladone aux jardins que j’avais.
Je parle ici de la sirène idéale et vivante,
Pas la figure de proue mais la figure de chair,
La vivante et l’insatiable,
Vous que nul ne pardonne,
Âme lourde et coeur gai,
Sirène de Lisbonne,
Lionne rousse aux aguets.
Je parle ici de la sirène idéale et vivante.
Jadis une sirène
A Lisbonne vivait.
Semez, semez la graine
Aux jardins que j’avais.

Que Lisbonne est jolie.
La fumée des vapeurs
Sous la brise mollie
Prend des formes de fleurs.

Nous irons à Lisbonne
Âme lourde et coeur gai,
Vous que nul ne pardonne,
Lionne rousse aux aguets.

(Robert Desnos)

Illustration

 

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