1 – Dans ma rue, y a deux boutiques
Dans l´une on vend de l´eau dans l´autre on vend du lait
La première n´est pas sympathique
Mais la seconde en revanche où l´on vend du lait l´est
Et c´est pour ça que tous les passants
La montrent du doigt en disant
Ah qu´il est beau le débit de lait
Ah qu´il est laid le débit de l´eau
Débit de lait si beau débit de l´eau si laid
S´il est un débit beau c´est bien le beau débit de lait
Au débit d´eau y a le beau Boby
Au débit de lait y a la belle Babée
Ils sont vraiment gentils chacun dans leur débit
Mais le Boby et la Babée sont ennemis
Car les badauds sont emballés
Par les bidons de lait de Babée
Mais l´on maudit le lent débit
Le lent débit des longs bidons du débit d´eau de Boby
Aussi Babée ses bidons vidés
Elle les envoie sur le dos de Boby
Et Boby lui répond
En vidant les bidons
Les bidons d´eau de son débit et allez donc
Les bidons d´eau de son débit et allez donc.
2 – Dans ma rue y a un mariage
Celui du beau Boby et de la belle Babée
Les voilà tous deux en ménage
Le débit d´eau épouse le grand beau débit de lait
Ils ont repeint leur boutique en blanc
Et chacun dit en y allant
Ah qu´il est beau le débit de lait
Ah quel palais le débit de l´eau
Débit de lait si beau, débit de lait palais
S´il est un débit beau c´est bien le beau débit de lait
Boby a mis du lait dans son eau
Et la Babée de l´eau dans son lait
Ils ont enfin compris que leurs débits unis
Font le plus grand le plus joli des beaux débits
Et les badauds sont emballés
Par les bidons de lait de Babée
Oui mais Boby garde pour lui
Les deux plus beaux bidons de lait de la Babée jolie
Et maintenant si vous y alliez
Vous entendriez de joyeux babils
De deux beaux bébés blonds
Qui font tomber d´un bond
Tous les bidons d´eau et de lait de la maison
Tous les bidons d´eau et de lait de la maison.
Ils se battent à coups de beaux bidons
Chez Boby et chez Babée et allez donc.
Et voici la muraille, elle use le désir,
On ne sait où la prendre, elle est sans souvenirs,
Elle regarde ailleurs, et, lisse, sans pensées,
C’est un front sans visage, à l’écart des années.
Prisonniers de nos bras, de nos tristes genoux,
Et, le regard tondu, nous sommes devant nous
Comme l’eau d’un bidon qui coule dans le sable
Et qui dans un instant ne sera plus que sable.
Déjà nous ne pouvons regarder ni songer,
Tant notre âme est d’un poids qui nous est étranger.
Nos coeurs toujours visés par une carabine
Ne sauraient plus sans elle habiter nos poitrines.
Il leur faut ce trou noir, précis de plus en plus,
C’est l’oeil d’un domestique attentif, aux pieds nus.
Oeil plein de prévenance et profond, sans paupière.
A l’aise dans le noir et l’excès de lumière.
Connaissez-vous ce poids dur aux épaules
Ce vieux regret d’une mer à porter
Le monde oscille et bouge à chaque pôle
Et ces bidons, nous rêvons d’y plonger
Nos corps brûlés du grand vent des paroles.
Il tourne ici des souvenirs d’écume
Des poissons bleus tracent des ciels ici
Les écureuils ont perdu leurs coutumes
Des monstres d’eau baignent leur incendie
Et la forêt se perd dans son déluge.
Il suffisait d’une douceur extrême
D’aimer la mer pour revivre dans l’eau.
Nous retrouvons les chevaux du poème
Chacun se cabre et repart aussitôt
Dans la tribu des hippocampes blêmes.
Le cri de guerre est ici jeu de billes
Et l’agonie un mouvement berceur
Chacun revit poisson s’il veut la lune
Arbre marin s’il aime les couleurs
Les porteurs d’au portent des algues brunes
Et les oiseaux s’endorment dans leurs coeurs.