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Poésie

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PRINTEMPS (William Blake)

Posted by arbrealettres sur 11 mars 2024



Illustration: William Blake
    
PRINTEMPS

Chantez sur la flûte,
La voici muette.
Oiseaux ivres
Nuit et jour
Le rossignol
Dans le vallon
L’alouette
Dans les cieux
Gais, gais, gais,
Pour saluer l’année.

Petit garçon
Lourd de joie,
Petite fille
Douce et gentille
Le coq crie
Et vous aussi,
Voix de joie,
Cris d’enfant,
Gais, gais, gais,
Pour saluer l’année.

Agnelet, agnelet,
Me voici,
Viens lécher
Mon cou blanc,
Laisse-moi tirer
Ta toison plus douce,
Laisse-moi baiser
Ta tête plus douce,
Gais, gais, gais,
Saluons l’année.

(William Blake)

Recueil: Chants d’Innocence et d’Expérience
Traduction: traduction de l’anglais par Marie-Louise et Philippe Soupault
Editions: Les belles lettres

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LE PRÉ DES SONS (William Blake)

Posted by arbrealettres sur 11 mars 2024



Illustration: William Blake
    

LE PRÉ DES SONS

Le soleil se lève
Et tout le ciel est heureux.
Salué par les cloches joyeuses,
Le printemps s’approche ;
L’alouette et la grive
Et tous les oiseaux des buissons
Font une ronde de leur chant
Autour du carillon de joie,
Et le pré de nos jeux
Sera le pré des sons.

Jean le vieil homme aux cheveux blancs,
Rit et chasse les soucis
Sous un chêne,
Et tous les grands-parents
Ils rient, ils rient,
Disent et disent :
Même joie de notre temps,
Même joie en ce jeune temps
Où nous étions garçons et filles
Dans le pré des sons.

Puis voici les petits si las.
Que leur joie est tombée
Comme le soleil
Et nos jeux sont finis.
Sur les genoux des mères,
Les enfants, les petits enfants,
Comme des oiseaux dans un nid,
Vont s’endormir.
Et des jeux, on n’en verra plus
Sur le pré des ombres.

***

The Ecchoing Green

The sun does arise,
And make happy the skies.
The merry bells ring
To welcome the Spring.
The sky-lark and thrush,
The birds of the bush,
Sing louder around,
To the bells’ cheerful sound.
While our sports shall be seen
On the Ecchoing Green.

Old John, with white hair
Does laugh away care,
Sitting under the oak,
Among the old folk,
They laugh at our play,
And soon they all say.
Such, such were the joys.
When we all girls & boys,
In our youth-time were seen,
On the Ecchoing Green.

Till the little ones weary
No more can be merry
The sun does descend,
And our sports have an end:
Round the laps of their mothers,
Many sisters and brothers,
Like birds in their nest,
Are ready for rest;
And sport no more seen,
On the darkening Green.

(William Blake)

Recueil: Chants d’Innocence et d’Expérience
Traduction: traduction de l’anglais par Marie-Louise et Philippe Soupault
Editions: Les belles lettres

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Leçon de poésie niveau IV (Marc Guimo)

Posted by arbrealettres sur 5 mars 2024




    
Leçon de poésie niveau IV

Laisse les étoiles tranquilles
leur cadastre est déjà impeccable

Laisse le coeur dans la poitrine
tu n’es pas médecin

Laisse la nuit aux veilleurs
et la nature aux espèces disparues

Laisse ton être et ton âme
picoler dans un coin

Laisse la vie devenir capitaliste
et la mort communiste

Laisse l’éternité faire du stop
et se planter de route

Laisse les fleurs se vendre
et adoucir les couples

Laisse tes morceaux
mijoter une heure ou dix ans

Ça va aller
n’écris pas tout de suite

Tu es trop propre
tu n’es pas prêt

Ce n’est pas toi que tu cherches
on s’en fout de toi

Tu peux calculer tous les jours
le diamètre de ta sphère

Le petit vieux marrant du rez-de-chaussée
est plus important

Le jour des encombrants
est plus important

Des sachets plastique s’accrochent aux arbres
drapeaux blancs de ta banlieue

Si tu veux des signes va les chercher
négocie chaque chose que tu vois

Ne te laisse pas faire
Ne te laisse pas faire

(Marc Guimo)

Recueil: La poésie, personne n’en lit
Editions: la Boucherie littéraire

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Lettre à l’inconnue d’en face (Guy Goffette)

Posted by arbrealettres sur 5 mars 2024



    

Lettre à l’inconnue d’en face

1
Rideaux, tentures, voilages, non rien, Madame,
pour dérober à votre oeil de cyclope
dans l’ombre qui m’épie ce long corps nu
de faux gisant recru d’intempérances,
et qui se pâme aussi devant votre balcon
où sèche toute une lingerie de nonne aux abois —
fleurs vénéneuses pour le solitaire
que la mort affole dresse démoelle dans la nuit,
rivé à vos blanches cuisses.

2
Si peu de lumière sur ma table,
si peu que les mots comme fleurs rabougrissent
— et ma chair, si vous n’y portez remède par saoules salives,
si votre ventre fougueusement ne l’enroule,
ma chair vive et veuve livrée nue chaque nuit à votre délectation
s’en ira elle aussi pétale à pétale avant que nous n’ayons trouvé,
belle inconnue, cette bête qui voyage beaucoup.

3
Reconnaissez Madame
que mourir hors du dérèglement de tous les sens
est triste et sans aucun profit
(présent gâché que la vertu, la nuit vient vite
et la plus belle rose est du fumier).
Ouvrez vos ombres votre giron vos lèvres :
le clou du spectacle est en bas dans la rue où,
preste comme une main sous les robes,
le vent réveille les beaux orages qui nous étaient promis.

(Guy Goffette)

Recueil: Un manteau de fourrures suivi de L’adieu aux lisières et de Tombeau du Capricorne
Editions: POINTS

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RETOUR (Luba Yakymtchouk)

Posted by arbrealettres sur 3 mars 2024




    
RETOUR

Nous rentrons à la maison qui garde nos cheveux blancs
Là où le ciel s’engouffre dans les fenêtres en flots bleus
Où on a planté un arbre et élevé un fils
où on a construit la maison devenue humide sans nous

Notre chemin fleurit de mines
Le stipa et le brouillard recouvrent les cratères
Nous rentrons amers, taiseux, coupables
Il nous faudrait juste une maison et un peu de paix

Il nous faudrait juste être là, respirer l’humidité
Extraire les photos des albums familiaux
Nous rentrons à la maison où nous avons grandi
Attendus par les parents, les tombes et les murs

Nous marcherons, même les pieds nus
Si nous ne retrouvons pas notre maison
Nous en construirons une autre au-dessus des abricots
Du ciel bleu, des nuages généreux

***

(Luba Yakymtchouk)

Recueil: Les Abricots du Donbas
Traduction: de l’ukrainien par Iryna Dmytrychyn et Agathe Bonin
Editions: des femmes

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IL DIT QUE TOUT IRA BIEN (Luba Yakymtchouk)

Posted by arbrealettres sur 3 mars 2024




    
IL DIT QUE TOUT IRA BIEN

Il dit : les bombes ont détruit ton école
Il dit : la nourriture disparaît, l’argent manque
Il dit : l’aide humanitaire dans les camions blancs est notre unique salut
Il dit : l’aide humanitaire vient de voler en éclats

Il n’y a plus d’école
Comment ça, plus d’école ?
Elle est vide, trouée ou il n’en reste plus rien ?
Qu’est devenue ma photo, accrochée au tableau d’honneur ?
Qu’est devenue ma maîtresse, qui faisait la classe ?

Il dit : ta photo ? qui a besoin de ta photo ?
Il dit : ton école a fondu, cet hiver est trop brûlant
Il dit : je n’ai pas vu ta maîtresse et ne me demande pas d’aller voir
Il dit : j’ai vu ta marraine, elle n’est plus de ce monde

Fuyez
Laissez tout tomber et fuyez
Abandonnez la maison, la cave et les confitures d’abricots
Les chrysanthèmes roses dans la véranda
Abattez les chiens, pour leur éviter de souffrir
Abandonnez cette terre, quittez-la

Il dit : arrête tes bêtises, tous les jours nous en jetons de la terre sur les cercueils
Il dit : tout ira bien, le salut est proche
Il dit : l’aide humanitaire est déjà en route

***

(Luba Yakymtchouk)

Recueil: Les Abricots du Donbas
Traduction: de l’ukrainien par Iryna Dmytrychyn et Agathe Bonin
Editions: des femmes

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POMPES FUNÈBRES (Luba Yakymtchouk)

Posted by arbrealettres sur 3 mars 2024




    
POMPES FUNÈBRES

Ce terroriste ressemble à de la broussaille
II tremble dans le vent et perd ses dernières feuilles
Mais de son nez s’échappe de l’air — il respire —
C’est un désavantage pour
Qui veut être comme la broussaille

Ce terroriste prétend être de la neige
Il est laineux et blanc, mais
Une peau chaude est un désavantage pour
Qui veut se confondre avec la neige

Ce terroriste ressemble à une belle fille
Qui me sourit
Espérant que j’aie envie de l’embrasser
Peut-être, et peut-être que je m’intéresse à son terrorisme
Immédiatement
Mais j’aime les garçons, ainsi cela la désavantage

Ce terroriste roule dans un catafalque
Marqué « pompes funèbres »
Et sans conteste, ses pompes — sont funèbres
Et il ne se réjouit pas du fait
Qu’il est allongé dans un cercueil
Il est très pâle, comme un défunt
Est devenu froid, comme la neige
Il ne respire pas, comme la broussaille
Même son coeur a appris à s’arrêter au block post
Même son coeur a appris à s’arrêter
Et s’est arrêté par hasard pour toujours

Ce terroriste : est idéal
Si on ne le voit pas comme un humain
Mais seulement terroriste

***

(Luba Yakymtchouk)

Recueil: Les Abricots du Donbas
Traduction: de l’ukrainien par Iryna Dmytrychyn et Agathe Bonin
Editions: des femmes

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LES GRATTE-CIEL (Luba Yakymtchouk)

Posted by arbrealettres sur 2 mars 2024




    
LES GRATTE-CIEL

Peigne mes cheveux
Parce que les gratte-ciel ne pourront plus
peigner les nuages

Recouds les plaies de l’immeuble
Recouvre de petites croix blanches
Cette peau brûlée

De ta main — calmement —
Recouvre les dents cassées des fenêtres
Pour protéger contre les pilleurs

Sois prudente
Garde près de ton lit
Tout ce qui peut couper
Et s’il le faut, coupe, coupe
Mais survis

***

(Luba Yakymtchouk)

Recueil: Les Abricots du Donbas
Traduction: de l’ukrainien par Iryna Dmytrychyn et Agathe Bonin)
Editions: des femmes

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LES OBUS (Luba Yakymtchouk)

Posted by arbrealettres sur 2 mars 2024



 

    

LES OBUS

Inspiration-explosion
Inspiration-explosion

Je sursaute des bruits sonores
Et des sourds aussi
Je sursaute des sons calmes
Et de la respiration
Je sursaute comme un tremble
Comme un frelon jeté dans le froid
Là où attend ma douleur
Ma mort blanche
Sans explosion
Ni inspiration

***

(Luba Yakymtchouk)

Recueil: Les Abricots du Donbas
Traduction: de l’ukrainien par Iryna Dmytrychyn et Agathe Bonin)
Editions: des femmes

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Orage d’hiver (Hans Magnus Enzensberger)

Posted by arbrealettres sur 25 février 2024




    

Orage d’hiver

Quand l’air devient blanc,
que la vision perd la vue,
que le ciel tonne et fulmine,
que dans les bureaux s’éteint la lumière,
et que seule la sirène des pompiers
traverse le voile de neige
qui s’amoncelle en congères lumineuses,

les soucis, les affaires, les urgences
disparaissent pour un quart d’heure,
et sans penser à rien, enfin,
tu laisses ton regard se perdre
dans ce monde d’une aveuglante obscurité.

***

Wintergewitter

Wenn die Luft weiß wird,
die Sicht erblindet,
der Himmel knallt und blitzt,
das Licht in den Büros erlischt,
und nur die Sirene der Feuerwehr
durch den stiebenden Vorhang dringt,
der helle Wächten vor sich her treibt,

verschwinden für eine Viertelstunde Sorgen,
Geschäfte, Dringlichkeiten,
und du schaust hinaus,
endlich gedankenlos,
in die blendend verdunkelte Welt.

(Hans Magnus Enzensberger)

Recueil: L’HISTOIRE DES NUAGES 99 méditations
Traduction: de l’allemand par Frédéric Joly et Patrick Charbonneau
Editions: Vagabonde

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