Posts Tagged ‘branler’
Posted by arbrealettres sur 12 mars 2023

Illustration: Ron Mueck
LES BARRIÈRES CÉLESTES
Quelques secondes avant de mourir
la mère tourna son visage vers nous
et d’une voix rauque s’écria :
Il n’y a rien !
Puis la voûte du silence s’éleva sur sa bouche.
Dans quel abîme se sont répandus
les grains de son chapelet
cent fois embrassés,
où sont tombés les mots de toutes ses prières
et le bruissement des chansons
qu’elle chantait depuis l’enfance ?
Que sont devenues la peur et l’angoisse
devant ses actes les plus menus ?
Ils portent les noms des péchés
sans être meilleurs ou pires
que les autres.
Quelle obscurité a-t-elle aperçue
dans cette cruelle seconde,
où, du talon, nous repoussons le sol
pour retomber aussitôt sur lui ?
e sortis sur le balcon
et de la chaise branlante de ma mère
je regardai quelque part,
dans les hauteurs célestes.
Durant toute notre longue vie
elles ne cessent de lorgner vers nos fenêtres,
elles n’ordonnent rien,
elles ne demandent rien
et, si vous voulez, elles
sont d’une beauté indicible.
Et nous, nous essayons de les acheter
par un grain d’encens par un grain du chapelet,
par des mots, par une larme !
Et à la fin
nous voulons soulever leurs barrières lumineuses
par notre dernier soupir,
celui qui, de tous nos gémissements,
est le plus vain.
(Jaroslav Seifert)
Recueil: Les danseuses passaient près d’ici
Traduction: Petr Kral et Jan Rubes
Editions: Actes Sud
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Posted in poésie | Tagué: (Jaroslav Seifert), abîme, acheter, acte, angoisse, balcon, barrière, beauté, bouche, branler, bruire, céleste, chaise, chanson, chanter, chapelet, cruel, demander, dernier, devenir, embrasser, encens, enfance, essayer, fenêtre, fin, gémissement, grain, hauteur, indicible, larme, lorgner, lumineux, mère, meilleur, menu, mot, mourir, nom, obscurité, ordonner, pêche, peur, pire, porter, prière, rauque, regarder, repousser, retomber, rien, s'écrier, s'élever, se répandre, seconde, silence, sol, sortir, soulever, soupir, talon, tomber, tourner, vain, vie, visage, voûte, voix, vouloir, zpercevoir | Leave a Comment »
Posted by arbrealettres sur 27 février 2022

La Rue
Deux vieilles causent à l’angle d’un mur,
elles font des gestes avec leurs mains sèches à mitaines noires,
un petit chat blanc frotte en ronronnant son beau poil luisant
à leurs jupes rêches et on voit branler leurs mentons pointus.
Une femme attend vers la laiterie,
une autre à la fontaine où son seau se remplit;
des laveuses lavent le linge:
elles rient, le seau grince,
on entend leurs rires et grincer le seau
dans le bruit de l’eau;
des hommes entrent boire à La Croix Fédérale,
le pasteur passe, le régent;
et les petites filles rentrent de l’école
avec leurs cheveux moussus de soleil
et leurs mollets maigres.
(Charles-Ferdinand Ramuz)
Recueil: Le Petit Village
Traduction:
Editions: Héros-Limite
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Posted in poésie | Tagué: (Charles-Ferdinand Ramuz), angle, attendre, école, blanc, boire, branler, causer, chat, cheveux, entendre, femme, fontaine, frotter, geste, grincer, homme, jupe, laiterie, laver, laveuse, linge, luisant, maigre, main, menton, mitaine, mollet, moussu, mur, noir, passer, pasteur, petite fille, poil, pointu, régent, rêche, rentrer, rire, ronronner, se remplir, seau, sec, soleil, vieux | Leave a Comment »
Posted by arbrealettres sur 24 décembre 2020

UN NOM FAUFILÉ DE SILENCES
avec le bout de ma langue j’allaitais les fautes.
ZEYNEP KOYLU
I
Le hennissement d’un cheval
déchire la housse du sommeil,
réajuste les images
et le tilleul bréhaigne frémit.
Le maçon, un homme sans visage,
décharge des briques crues et des pierres
devant la porte branlante.
Le muret et le four ancien
reviennent à leurs places
et moi, fillette de cinq ans,
je cours autour de la claie et je pleure
pendant que le cochon mord à belles dents
ma poupée de chiffon,
l’unique,
comme toutes les amours uniques
que le temps disjoint,
comme s’il voulait vérifier
l’endurance du cœur.
Personne ne m’entend.
Les araignées tissent des voiles de mariée
sur le poirier en fleur,
le maçon, impassible, taille
des pierres pour une nouvelle maison
dans laquelle il n’entrera pas.
Si je l’avais appelé,
si j’avais dit grand-père,
aurait-il entendu le sang ?
II
Je n’ai jamais prononcé à haute voix
son nom
que j’apprenais d’une photo,
clouée sur une poutre au grenier.
Les silences de mon père,
les oiseaux de l’accusation
dans les yeux de maman
à cause d’un péché d’autrui
rongeant le sang de la descendance.
Le sommeil rend des mots oubliés
et m’apprend les mantras de la nuit
que la vie passe sous silence.
Son nom est un chaton apeuré
enfoui sous le lit de ma langue.
Je l’épelle en sourdine
avec la persistance de quelqu’un
qui ne veut pas se réveiller
avant de réécrire le songe
de sa vie.
(Aksinia Mihaylova)
Recueil: Le baiser du temps
Traduction:
Editions: Gallimard
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Posted in poésie | Tagué: (Aksinia Mihaylova), accusation, amour, ancien, apeuré, appeler, apprendre, araignée, épelée, branler, brique, chaton, cheval, chiffon, claie, clouer, coeur, courir, cru, décharger, déchirer, descendance, disjoindre, endurance, enfouir, entendre, entrer, faufiler, fillette, four, frémir, grand-père, grenier, haut, hennir, housse, image, langue, lit, maçon, maison, maman, Marie, mot, muret, nom, nuit, oiseau, pêche, persistance, photo, pierre, place, pleurer, porte, poupée, poutre, prononcer, réajuster, réécrire, revenir, sang, se réveiller, silence, sommeil, songer, sourdine, temps, tilleul, tisser, unique, vérifier, vie, visage, voile, voix, yeux | Leave a Comment »
Posted by arbrealettres sur 19 août 2020

Illustration
RONDEAU DE LA CHAIR TROP LOURDE
Toujours ce poids qui t’attache à la terre,
Ce pied de plomb tirant sur le genou,
Et cette tête à ton tronc peu légère,
Mal emmanchée à ton douloureux cou;
Toujours le fiel dans cette bouche amère,
Des yeux piquants l’âcre larme qui sourd,
La cire épaisse au creux du tympan sourd;
Du gros cerveau que la tempe resserre
Toujours ce poids!
Toujours ces dents dont l’ivoire s’altère,
Ce crin hirsute en guerre avec le pou,
Toujours ce ventre enflant en demi-sphère
La pommaison de son grotesque chou.
A sa grinçante et peineuse charnière
Toujours ce bras qui pend débile et gourd,
Cette main moite où toute crasse accourt;
Du sang, de l’os, du muscle et du viscère
Toujours ce poids!
Nul réconfort au fond de ta misère
Que de presser un être encor plus mou,
Encor plus creux : tel lard en souricière,
Offrant l’appât de son funeste trou.
Lors sans bonnet sur ton occiput glabre,
Sans gant le carpe et le fémur sans bas,
En toute paix par les luneux sabbats
Tu branleras le tarse au bal macabre.
Courage encor!
(André Berry)
Recueil: Poèmes involontaires suivi du Petit Ecclésiaste
Traduction:
Editions: René Julliard
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Posted in poésie | Tagué: (André Berry), accourir, amer, appât, attacher, âcre, épais, être, bal, bas, bonnet, bouche, branler, bras, carpe, cerveau, chair, charnière, chou, ciré, cou, courage, crasse, creux, crin, débile, dent, douloureux, emmancher, enfler, fémur, fiel, funeste, gant, genou, glabre, gourd, grincer, grotesque, guerre, hirsute, ivoire, lard, larme, léger, lourd, luneux, macabre, main, misère, moite, mou, muscle, occiput, offrir, os, paix, peineux, pendre, pied, piquer, plomb, poids, pommaison, pou, presser, réconfort, rondeau, s'altérer, sabbat, sang, se resserrer, sourdre, souricière, sphère, tarse, tête, tempe, terre, tirer, toujours, tronc, trou, tympan, ventre, viscère, yeux | Leave a Comment »
Posted by arbrealettres sur 30 juillet 2019

DEUX CHEVAUX
Deux chevaux arrêtés au sommet d’une côte.
L’un d’eux, avec douceur, s’est rapproché de l’autre
Et lui a raconté quelque chose à l’oreille.
Son propos pacifique évoquait des merveilles
Et j’ai vu son haut front d’animal s’éclairer.
— « Patience, a-t-il dit. Gardons-nous d’oublier
Qu’il est un monde où les chevaux n’ont plus de charge,
Un monde où l’on est libre, où l’horizon est large,
Un monde où l’on peut vivre heureux, à gambader
Avec d’autres chevaux amis, dans les vergers.
Ne dors pas, cette nuit, dans l’écurie obscure.
Détourne tes regards des misérables murs
Et de la crèche oblique où ta faim se repaît.
Ne mange pas, non plus, comme un cheval épais.
Veille longtemps, et tu verras, par la lucarne,
Des chevaux bleus courir dans le ciel plein d’étoiles ».
Ce voeu d’évasion, hélas, s’arrête ici.
Un homme est survenu. L’attelage est parti.
Les chevaux, dans le vent, branlaient leurs lourdes têtes
Emportant, loin de moi, leur univers de bêtes.
(Armand Bernier)
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Posted in méditations, poésie | Tagué: (Armand Bernier), arrêté, attelage, étoile, bête, branler, côte, chargé, cheval, courir, douceur, emporter, heureux, lucarne, merveille, oublier, pacifique, patience, raconter, se rapprocher, univers, veiller, vent, verger | Leave a Comment »
Posted by arbrealettres sur 3 mai 2019

Les yeux d’Amaranthe
Beaux yeux que j’aime tant, hé quelle est votre essence,
Car l’on vous pense feux à mon embrasement,
Puis l’on vous juge cieux par votre mouvement,
Mais non, vous êtes Dieux selon votre puissance.
Ces yeux n’ont que des feux toujours en influence,
Comme s’ils n’étaient faits que de cet élément :
Mais ces yeux étant dieux, leur branlant règlement
N’a que leur volonté pour toute intelligence.
Feux germains et gémeaux qui me donnez le jour,
Tandis que vous luirez dedans le ciel d’amour,
En tout temps et tout lieu je veux cueillir la rose.
Et quoi que le Démon avec ses appareils,
De rage et de noirceur à mes beaux jours oppose,
Je ne crains point l’éclipse avecque deux soleils.
(Pierre de Marbeuf)
Illustration: Fernand Khnopff
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Posted in poésie | Tagué: (Pierre de Marbeuf), aimer, éclipse, branler, craindre, cueillir, Dieu, embrasement, essence, intelligence, luire, mouvement, noirceur, opposer, puissance, rage, rose, soleil, volonté, yeux | Leave a Comment »
Posted by arbrealettres sur 20 octobre 2018
Au seuil du foyer
Par la ronde et haute fenêtre
Je te voyais branler,
Branche d’hiver décharnée,
Et ne pouvais ou ne voulais comprendre
Si c’était message ou menace.
Etait-ce le vent
Qui te secouait par moments ?
Etait-ce le mouvement
De la faux moissonneuse de la mort ?
D’une indicible angoisse
Je t’étais redevable :
Ne pas m’abandonner à la tiédeur
Provisoire du feu et percevoir le gel
De ce pauvre ciel.
Alors, il n’était pas clair ton message.
Maintenant, devenu sage, je sais
Maintenant je sais
Que tu me disais non.
***
Dalla soglia del focolare
Attraverso la tonda, alta finestra
Ti vedevo brandire,
Spoglio ramo invernale,
Né potevo o volevo capire
Cosa tu m’annunciassi o minacciassi.
Era il vento
Che ti scoteva a tratti ?
Era il movimento
Della falce fienaia della morte
Ma di un’invincibile angoscia
Io t’ero debitore,
Ché non m’abbandonassi al tepore
Provvisorio del fuoco, ché percepissi il gelo
Di quel povero cielo.
Pure, non m’era chiaro il tuo messaggio.
Ora so, the son saggio,
Ora so
Che mi dicevi di no.
(Tommaso Landolfi)
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Posted in poésie | Tagué: (Tommaso Landolfi), abandonner, branche, branler, comprendre, décharnée, fenêtre, feu, foyer, gel, hiver, moissonneuse, mort, non, percevoir, ronde, sage, secouer, seuil, tiédeur | Leave a Comment »
Posted by arbrealettres sur 6 décembre 2017

BOIS, POURQUOI ME FAIRE GRISE MINE?
Bois, pourquoi me faire grise mine?
Spectres branchus qui, dolemment,
Branlez du chef dans le ciel morne,
Pourquoi me railler méchamment?
***
WOODS, YOU NEED NOT FROWN ON ME
Woods, you need not frown on me;
Spectral trees, that so dolefully
Shake your heads in the dreary sky,
You need not mock so bitterly.
(Emily Brontë)
Recueil: Poèmes
Traduction: Pierre Leyris
Editions: Gallimard
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Posted in poésie | Tagué: (Emily Brontë), bois, branchu, branler, ciel, dolemment, gris, méchamment, mine, morne, pourquoi, railler, spectre | Leave a Comment »