Le vent est tombé, la poussière embaume, les fleurs sont déjà passées,
Il se fait tard et je suis lassée de me peigner.
Le monde est là, il n’y est pas, tout est fini.
Je voudrais parler, mais les larmes coulent en premier.
J’entends dire que sur les Deux-Rivières, le printemps reste beau,
Alors me vient le projet d’aller y canoter.
Je crains pourtant que sur les Deux-Rivières une sauterelle, ce frêle esquif,
Ne puisse emporter autant de chagrin.
***
(Li Qing Zhào) (1084 — après 1149)
Recueil: Quand mon âme vagabonde en ces anciens royaumes Poèmes Song illustrés par Dai Dunbang
Traduction: du Chinois par Bertrand Goujard
Editions: De la Cerise
LA GUERRE
LA CHANSON DE L’OURAGAN
L’empereur Kao-Ty
L’ouragan furieux, court par le ciel,
et pourchasse les nuages, qui roulent et s’enfuient.
C’est ainsi que ma puissance, a culbuté les ennemis et les a dispersés…
De tous les horizons, ils ont disparu,
maintenant, et je peux rentrer dans mon empire.
Mais où trouverai-je des braves, d’un souffle assez fort,
pour maintenir le ciel pur, autour de mes frontières ?
(Textes chinois)
Recueil: Le Livre de Jade
Traduction: Judith Gautier
Editions: Plon
Longue oreille, des crocs intacts, des vrais ivoires,
Le corps svelte quoique râblu,
Son beau pelage court et gris à barres noires
Lui faisant un maillot velu ;
Des yeux émeraudés, vieil or, mouillant leur flamme
Qui, doux énigmatiquement,
Donnent à son minois le mièvre et le charmant,
D’un joli visage de femme.
Avec cela rôdeur des gouttières, très brave,
Fort et subtil, tel est ce chat,
Pratiquant à loisir le bond et l’entrechat,
Au grenier comme dans la cave.
Un pauvre homme passait dans le givre et le vent.
Je cognai sur ma vitre ; il s’arrêta devant
Ma porte, que j’ouvris d’une façon civile.
Les ânes revenaient du marché de la ville,
Portant les paysans accroupis sur leurs bâts.
C’était le vieux qui vit dans une niche au bas
De la montée, et rêve, attendant, solitaire,
Un rayon du ciel triste, un liard de la terre,
Tendant les mains pour l’homme et les joignant pour Dieu.
je lui criai : « Venez vous réchauffer un peu.
Comment vous nommez-vous ? » Il me dit : « Je me nomme
Le pauvre. » Je lui pris la main : « Entrez, brave homme. »
Et je lui fis donner une jatte de lait.
Le vieillard grelottait de froid ; il me parlait,
Et je lui répondais, pensif et sans l’entendre.
« Vos habits sont mouillés », dis-je, « il faut les étendre ,
Devant la cheminée. » Il s’approcha du feu.
Son manteau, tout mangé des vers, et jadis bleu,
Etalé largement sur la chaude fournaise,
Piqué de mille trous par la lueur de braise,
Couvrait l’âtre, et semblait un ciel noir étoilé.
Et, pendant qu’il séchait ce haillon désolé
D’où ruisselait la pluie et l’eau des fondrières,
Je songeais que cet homme était plein de prières,
Et je regardais, sourd à ce que nous disions,
Sa bure où je voyais des constellations.
(Victor Hugo)
Recueil: Les rayons et les ombres
Traduction:
Editions: Bayard Jeunesse
{Refrain:}
Et si j’étais né en 17 à Leidenstadt
Sur les ruines d’un champ de bataille
Aurais-je été meilleur ou pire que ces gens
Si j’avais été allemand ?
Bercé d’humiliation, de haine et d’ignorance
Nourri de rêves de revanche
Aurais-je été de ces improbables consciences
Larmes au milieu d’un torrent
Si j’avais grandi dans les docklands de Belfast
Soldat d’une foi, d’une caste
Aurais-je eu la force envers et contre les miens
De trahir: tendre une main
Si j’étais née blanche et riche à Johannesburg
Entre le pouvoir et la peur
Aurais-je entendu ces cris portés par le vent
Rien ne sera comme avant
On saura jamais c’qu’on a vraiment dans nos ventres
Caché derrière nos apparences
L’âme d’un brave ou d’un complice ou d’un bourreau?
Ou le pire ou plus beau ?
Serions-nous de ceux qui résistent ou bien les moutons d’un troupeau
S’il fallait plus que des mots ?
{au Refrain}
Et qu’on nous épargne à toi et moi si possible très longtemps
D’avoir à choisir un camp
Bien que natif du Nord,
Ne suis brave ni fort.
La vie, je l’ai aimée
Et veux t’aimer, ô mort,
— Ma mort, et cependant
Je ne te choisirai.
D’amour j’eus dans ma vie
Autant qu’amour se peut :
J’aimai, sans être aimé,
Etant aimé, j’aimai.
Mort, en toi j’oublierai
Aujourd’hui qu’en ma vie
Je n’ai rien fait qu’aimer.
Je sais, c’est ennuyeux
De mourir, mais mourrai
— Quand tu seras servie —
Sans d’immenses regrets
De cette amère vie,
Que j’ai, pourtant, aimée.
Les armaillis des Colombettes
De bon matin se sont levés.
2
Quand ils sont arrivés aux Basses-Eaux
Le chancre me ronge! Ils n’ont pu passer.
3
Pauvre Pierre, que faisons-nous ici?
Nous ne sommes pas mal embourbés
4
Il te faut aller frapper à la porte,
A la porte du curé.
5
Que voulez-vous que je lui dise
A notre brave curé.
6
Il faut qu’il dise une messe
Pour que nous puissions passer
7
Il est allé frapper à la porte
Et il a dit ceci au curé:
8
Il faut que vous disiez une messe
Pour que nous puissions passer
9
Le curé lui fit sa réponse:
Pauvre frère, si tu veux passer
10
Il te faut me donner un petit fromage
Mais sans écrémer le lait.
11
Envoyez-nous votre servante
Nous lui ferons un bon fromage gras.
12
Ma servante est trop jolie
Vous pourriez bien la garder
13
N’ayez pas peur, notre curé
Nous n’en sommes pas si affamés
14
De trop « moler » votre servante
Il faudra bien nous confesser
15
De prendre le bien de l’Eglise
Nous ne serions pas pardonnés
16
Retourne-t’en, mon pauvre Pierre
Je dirai pour vous un Ave Maria.
17
Beaucoup de biens et de fromages vous souhaite
Mais venez souvent me trouver.
18
Pierre revient aux Basses-Eaux
Et tout le train a pu passer
19
Ils ont mis le kio à la chaudière
Avant d’avoir à moitié trait
REFRAIN
1-3-5-7-9-11-13-15-17-19: Lyôba (appel des vaches) pour traire (bis).
Venez toutes, les blanches, les noires,
les rouges, les étoilés sur la tête les jeunes, les autres,
Sous ce chêne où je vous traie,
sous ce tremble où je fabrique le fromage, Lyôba, lyôba, pour la traite (bis).
***
Lè j’armayi di Kolonbètè
TITRE DU CHANT EN FRANCAIS:
Le Ranz des Vaches
1
Lè j’armayi di Kolonbètè
Dè bon matin chè chon lèvâ.
2
Kan chon vinyê i Bachè j’Ivouè
Tsankro lo mè! n’an pu pachâ.
3
Tyè fan no ché mon pouro Piéro?
No no chin pâ mô l’inrinbyâ.
4
Tè fô alâ fiêr a la pouârta,
A la pouârta dè l’inkourâ.
5
Tyè voli vo ke li dyécho?
A nouthron brâvo l’inkourâ.
6
I fô ke dyéchè ouna mècha
Po ke no l’y pouéchan pachâ.
7
L’y è j’elâ fiêr a la pouârta
È l’a de dinche a l’inkourâ:
8
I fô ke vo dyécho ouna mècha
Po ke no l’y puéchan pachâ.
9
L’inkourâ li fâ la rèponcha:
Pouro frârè che te vou pachâ,
10
Tè fô mè bayi ouna motèta
Ma ne tè fô pâ l’èhyorâ.
11
Invouyi no vouthra chèrvinta
No li farin on bon pri grâ.
12
Ma chèrvinta l’è tru galéja
Vo porâ bin la vo vouêrdâ.
13
N’ôchi pâ pouêre, nouthron prithre,
No n’in chin pâ tan afamâ.
14
Dè tru molâ* vouthra chèrvinta
Fudrè èpè no konfèchâ.
15
Dè prindre le bin dè l’èlyije
No ne cherin pâ pèrdenâ.
16
Rètouârna t’in mou pouro Piéro
Deri por vo on’Avé Maria.
17
Prou bin, prou pri i vo chouèto
Ma vinyi mè chovin trovâ.
18
Piéro rèvin i Bâchè j’Ivouè
È to le trin l’a pu pachâ.
19
L’y an mè le kiô a la tsoudêre
Ke n’avan pâ la mityi aryâ.
Redzingon
1-3-5-7-9-11-13-15-17-19: Lyôba, lyôba, por aryâ (bis). Vinyidè totè, byantsè, nêre, Rodzè, mothêlè, dzouvenè ôtrè,
Dèjo chti tsâno, yô vo j’âryo, Dèjo chti trinbyo, yô i trintso, Lyôba, lyôba, por aryâ (bis).
Ils cohabitent en moi.
Se battent sans qu’on le voie :
Le passé le présent
Le futur et maintenant
L’illusion et le vrai
Le maussade et le gai
La bêtise la raison
Et les oui et les non
L’amour de ma personne
Les dégoûts qu’elle me donne
Les façades qu’on se fait
Et ce qui derrière est
Et les peurs qu’on avale
Les courages qu’on étale
Les envies de dire zut
Et les besoins de lutte
Et l’humain et la bête
Et le ventre et la tête
Les sens et la vertu
Le caché et le nu
L’aimable et le sévère
Le prude et le vulgaire
Le parleur le taiseux
Le brave et le peureux
Et le fier et le veule…