Quand tout renaît à l’espérance,
Et que l’hiver fuit loin de nous,
Sous le beau ciel de notre France,
Quand le soleil revient plus doux,
Quand la nature est reverdie,
Quand l’hirondelle est de retour,
J’aime à revoir ma Normandie,
C’est le pays qui m’a donné le jour.
J’ai vu les champs de l’Helvétie
Et ses chalets et ses glaciers,
J’ai vu le ciel de l’Italie,
Et Venise et ses gondoliers.
En saluant chaque patrie,
Je me disais : « Aucun séjour
N’est plus beau que ma Normandie,
C’est le pays qui m’a donné le jour. »
Il est un âge dans la vie,
Où chaque rêve doit finir,
Un âge où l’âme recueillie
A besoin de se souvenir.
Lorsque ma muse refroidie
Aura fini, ses chants d’amour,
J’irai revoir ma Normandie,
C’est le pays qui m’a donné le jour.
Pendant les longues journées d’été
Dans l’ombre épaisse des arbres
Un étang reflète mon chalet
Avec son balcon
Le rideau vert frissonne au moindre vent
Les roses grimpant sur la balustrade
Répandent leur parfum dans toute la cour
CELUI QUI FUT RÉVEILLÉ PAR LES CHANTS AU-DESSUS DES TOITS
Matin, pluie de mai. La ville est encore silencieuse
comme un chalet de montagne. Les rues le sont aussi.
Et dans
le ciel un moteur d’avion qui gronde en bleu et gris. –
La fenêtre est ouverte.
Le rêve où repose le dormeur
est alors transparent. L’homme s’agite, cherche
à tâtons les outils de l’attention – presque dans l’espace.
J’aurais bien voulu vivre en doux ermite,
Vivre d’un radis et de l’eau qui court.
Mais l’art est si long et le temps si court !
Je rêve, poignards, poisons, dynamite.
Avoir un chalet en bois de sapin !
J’ai de beaux enfants (l’avenir), leur mère
M’aime bien, malgré cette idée amère
Que je ne sais pas gagner notre pain.
Le monde nouveau me voit à sa tête.
Si j’étais anglais, chinois, allemand,
Ou russe, oh ! alors on verrait comment
La France ferait pour moi la coquette.
J’ai tout rêvé, tout dit, dans mon pays
J’ai joué du feu, de l’air, de la lyre.
On a pu m’entendre, on a pu me lire
Et les gens s’en vont dormir, ébahis…
Nos routes, les routes pour nos souliers et nos pneus,
contournent toujours, même si droites, ce bouquet de lauriers,
ce chalet en ruine, cette rivière flâneuse où quelqu’un, jadis,
nous a fixé rendez-vous…