Quelques secondes avant de mourir
la mère tourna son visage vers nous
et d’une voix rauque s’écria :
Il n’y a rien !
Puis la voûte du silence s’éleva sur sa bouche.
Dans quel abîme se sont répandus
les grains de son chapelet
cent fois embrassés,
où sont tombés les mots de toutes ses prières
et le bruissement des chansons
qu’elle chantait depuis l’enfance ?
Que sont devenues la peur et l’angoisse
devant ses actes les plus menus ?
Ils portent les noms des péchés
sans être meilleurs ou pires
que les autres.
Quelle obscurité a-t-elle aperçue
dans cette cruelle seconde,
où, du talon, nous repoussons le sol
pour retomber aussitôt sur lui ?
e sortis sur le balcon
et de la chaise branlante de ma mère
je regardai quelque part,
dans les hauteurs célestes.
Durant toute notre longue vie
elles ne cessent de lorgner vers nos fenêtres,
elles n’ordonnent rien,
elles ne demandent rien
et, si vous voulez, elles
sont d’une beauté indicible.
Et nous, nous essayons de les acheter
par un grain d’encens par un grain du chapelet,
par des mots, par une larme !
Et à la fin
nous voulons soulever leurs barrières lumineuses
par notre dernier soupir,
celui qui, de tous nos gémissements,
est le plus vain.
(Jaroslav Seifert)
Recueil: Les danseuses passaient près d’ici
Traduction: Petr Kral et Jan Rubes
Editions: Actes Sud
Je voudrais vous dire une phrase apprise jadis,
le temps l’efface du tableau, elle n’est guère ;
c’est encore la pluie, mais seulement pour les petits
qui se serrent, heureux, sous la gouttière.
Dès que les gouttes s’attaquent à leurs capuches,
le moulinet du ruisseau se met à bruire ;
moi, je regarde leurs mains avec envie
et m’enfuis, en hâte, dans mes souvenirs.
Quand la pluie cessera, je voudrais dire à quelqu’un
avec qui, un long moment, je suis resté là
que l’eau coule encore brièvement des arbres
et qu’elle tombe encore longtemps du haut des cathédrales.
(Jaroslav Seifert)
Recueil: Les danseuses passaient près d’ici
Traduction: Petr Kral et Jan Rubes
Editions: Actes Sud
Un long fleuve traverse le centre de la ville,
de sept ponts-agrafes il se vante ;
mille belles filles se promènent sur les quais,
toutes différentes.
De coeur en coeur, tu cherches à réchauffer tes mains
aux rayons d’un grand amour plein de flamme ;
mille belles filles se promènent sur les quais
et toutes, elles se valent.
(Jaroslav Seifert)
Recueil: Les danseuses passaient près d’ici
Traduction: Petr Kral et Jan Rubes
Editions: Actes Sud
Entendant pleurer, je m’arrêtai sur le chemin en pente
et m’approchai jusqu’à la porte de la cabane.
Un enfant aux yeux de douceur me regarda de son lit
et une immense tendresse m’enivra comme vin!
Sa mère s’attardait, courbée sur le chaume;
l’enfant, à son réveil, avait cherché le sein
et s’était mis à pleurer. Je le pris dans mes bras
et une berceuse monta, tremblante, jusqu’à mes lèvres.
Par la fenêtre ouverte, la lune regardait.
L’enfant s’était rendormi et la chanson baignait
comme d’un autre éclat, mon sein riche de son faix.
Et lorsque la femme tremblante ouvrit la porte,
elle dut voir sur mon visage un bonheur si vrai
qu’elle laissa dans mes bras l’enfant endormi.
(Gabriela Mistral)
Recueil: Poèmes choisis Prix Nobel de littérature 1945
Editions: Rombaldi
Une chanson dort en toutes les choses
Qui poursuivent là un rêve sans fin,
Et tout l’univers au chant se dispose
Si d’un mot magique on l’éveille enfin.
(Joseph von Eichendorff)
Recueil: L’Allemagne en Poésie
Traduction: Rémi Laureillard
Editions: Folio Junior
Elle me dit que j’ pleure tout le temps
Que j’ suis comme un tout p’tit enfant
Qu’aime plus ses jeux, sa vie, sa maman
Elle dit que j’ pleure tout le temps
Que j’ suis carrément méchant
Jamais content
Carrément méchant
Jamais content
Déjà mes parents, dans le temps
Voulaient que j’aille faire le charmant
Chez des amis d’ mon grand-père
Des pharmaciens, des notaires
Qui me trouvaient carrément vulgaire
Très ordinaire
Carrément vulgaire
Très ordinaire
Puis on m’a enrôlé d’office
À Pau, dans les parachutistes
Ils voulaient que j’ tombe des avions
Accroché à un champignon
Je leur ai carrément dit Non
Pas beau, l’avion
Carrément dit Non
Pas beau, l’avion
Je me suis sauvé en Angleterre
J’ faisais le frenchman, super lover
Je me teignais les cheveux, les sourcils
Pour être plus brun, pour faire viril
Carrément débile
J’trouve pas mon style
Carrément débile
J’trouve pas mon style
J’ai chopé la mélancolie
En faisant des chansons sur mon lit
Une commande pour chanteur pas bien
Fallait que j’dise France Américain
Ça m’a carrément miné
Tout dégoûté
Carrément miné
Tout dégoûté
Promoteurs, ils voulaient, canailles
Que j’ fasse dessous d’ table, homme de paille
Construire des tours de carton bleu
Pour que les petits garçons mettent leurs jeux
J’y ai carrément mis le feu
Bien fait pour eux
Carrément mis le feu
Bien fait pour eux
Elle me dit que j’ pleure tout le temps
Que j’ suis comme un tout p’tit enfant
Qu’aime plus ses jeux, sa vie, sa maman
Elle dit que j’ pleure tout le temps
Que je suis
Carrément méchant
Jamais content
Carrément méchant
Jamais content
Carrément méchant
Jamais content
Carrément méchant
Jamais content
Carrément méchant
Jamais content
Carrément méchant
Jamais content
Carrément méchant
Jamais content
Carrément méchant
Jamais content
Carrément méchant
Jamais content
Carrément méchant
Jamais content
Carrément méchant
Jamais content
Carrément méchant
Jamais content
Carrément méchant
Jamais content
Carrément méchant
Jamais content
Carrément méchant
Jamais content (jamais content)
Carrément méchant
Jamais content
Carrément méchant
Jamais content
Carrément méchant
Jamais content (jamais content)
(Carrément méchant
Jamais content
Carrément méchant)
Elle croyait qu’j’étais James Dean,
américain d’origine – le fils de Buffalo Bill,
Alors admiration
Faut dire qu’j’avais la chemise à carreaux,
la guitare derrière dans l’dos
Pour faire le cow-boy très beau
Mais composition
Elle me parlait anglais tout l’temps
J’lui répondais 2, 3 mots bidon
Des trucs entendus dans des chansons,
Consternation
Elle croyait qu’j’étais coureur,
qu’j’arrivais des 24 heures
Avec mon casque en couleur,
Alors admiration
J’lui disais drapeau à damiers dérapage bien contrôlé
Admirateurs fascinés,
Télévision
Elle me dit partons à la mer, dans ton bolide fendons l’air
Elle passe pas l’80 ma traction,
Consternation
J’suis mal dans ma peau en coureur très beau
And I just go with my pince à vélo
J’suis bidon, j’suis bidon
J’suis qu’un mec à frime, bourré d’aspirine
And I just go with my pince à vélo
J’suis bidon, j’suis bidon
Elle croyait qu’j’étais chanteur,
incognito voyageur, tournées, sonos, filles en pleurs,
Alors admiration
Faut dire qu’j’avais des talons aiguilles,
le manteau d’lapin d’une fille
Des micro-bracelets aux chevilles,
Exhibition
Elle me dit chante moi une chanson
J’ai avalé 2, 3 maxitons
Puis j’ai bousillé « Satisfaction »,
Consternation
J’suis mal dans ma peau en chanteur très beau
And I just go with my pince a vélo
J’suis bidon, j’suis bidon
J’suis qu’un mec à frime bourré d’aspirine
And I just go with my pince à vélo
J’suis bidon, j’suis bidon
J’habite chez ma grand-mère, derrière le garde-barrière
And I just go with ma pince à vélo
Je suis bidon, je suis bidon
J’suis mal dans ma peau en chanteur très beau
And I just go with my pince a vélo
J’suis bidon, j’suis bidon
J’suis mal dans ma peau en coureur très beau
And I just go with my pince à vélo
J’suis bidon, j’suis bidon
Je suis qu’un mec à frime, bourré d’aspirine
And I just go with my pince a vélo
J’suis bidon, j’suis bidon
J’habite chez ma grand-mère, derrière le garde-barrière
And I just go with my pince à vélo
J’suis bidon, j’suis bidon
J’suis bidon