Posted by arbrealettres sur 4 juillet 2022

Illustration: George Hyde Pownall
Nocturne
Des Irlandaises vendaient sous les portes
des pommes de terre qui me brûlaient les doigts.
Quel vent désolé vous apporte
Londres, mon Londres d’autrefois ?
Les chats cousaient les maisons l’une à l’autre
d’un fil noir, d’un fil roux, d’un fil blanc.
Ils faufilaient le jour et la nuit l’un à l’autre.
Des « derelicts » dormaient, distingués, sur des bancs.
La Tamise montait, mais en nappes légères
d’odeurs et de brouillards ténus.
Que de songes ainsi, dans l’ombre, sont venus
se prendre à vos chapeaux, nocturnes passagères !
L’Adelphi, vers le flot glissait en froides pentes
qu’une lanterne transperçait.
Et l’ivresse nouait sa forme titubante
aux « street lamps » qu’elle enlaçait.
Parfois un rat, qu’un bruit insolite déloge
s’enfonçait dans la vase avec un sifflement.
L’éternité bat dans vos cœurs comme une horloge,
Pèlerins de la nuit qui marchez en dormant.
J’ai frôlé, jeune encor, sans mesurer le risque,
ces épaves du temps perdu,
Cléopâtre dressant sa petite obélisque,
montrait le ciel d’un doigt tendu.
Elle perçait de l’aiguille,
votre opaque intensité,
nuit de Londres où scintille,
l’astre du déshérité.
Le bruit d’un pas, ce tendre ami des rues désertes
sonne encor dans mon souvenir.
Mon cœur attend au seuil d’une porte entrouverte,
ce qui ne peut plus revenir.
Mon cœur perçoit au loin le convoi qui déraille
avec ses morts et ses vivants.
Quelqu’un court dans la nuit derrière un brin de paille
mais c’est le vent, mais c’est le vent.
(Germaine Beaumont)
Recueil: Poésie au féminin
Traduction:
Editions: Folio
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Posted in poésie | Tagué: (Germaine Beaumont), aiguille, ami, apporter, attendre, autrefois, épave, éternité, banc, battre, blanc, brûler, brin, brouillard, bruit, chapeau, chat, ciel, Cléopâtre, coeur, convoi, coudre, courir, déloger, dérailler, désert, désolé, derrière, distingué, doigt, dormir, enlacer, entr'ouvrir, faufiler, fil, flot, forme, frôler, froid, glisser, horloge, insolite, intensité, irlandais, ivresse, jeune, jour, lanterne, léger, loin, Londres, maison, marcher, monter, montrer, mort, mseurer, nappe, nocturne, nouer, nuit, obélisque, odeur, ombre, opaque, paille, pas, passager, pélerin, pente, percer, percevoir, perdu, pomme, porte, rat, revenir, risque, roux, rue, s'enfoncer, scintiller, se prendre, seuil, sifflement, songe, sonner, souvenir, ténu, temps, tendre, terre, tituber, transpercer, vase, vendre, venir, vent, vivant | Leave a Comment »
Posted by arbrealettres sur 23 août 2017

Les germes, souvent presque invisibles, ne semblent rien,
et cependant ils portent en eux déjà leur splendeur ou leur malédiction futures,
en eux, dans cette force interne, mystérieuse,
qui les appelle à vivre, les fait monter vers la lumière, leur impose une forme,
— la forme d’où naîtra leur destinée à venir, leur joie et leur orgueil,
ou leur indicible misère, la joie, l’orgueil d’Hélène et de Cléopâtre,
ou la misère du pauvre, de l’idiot, du lépreux, du scrofuleux couvert d’ulcères.
(Henri Cazalis)
Recueil: Le livre du Néant
Editions: Alphonse Lemerre
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Posted in méditations, poésie | Tagué: (Henri Cazalis), appeler, Cléopâtre, destinée, force, forme, germe, Hélène, idiot, indicible, invisible, joie, lépreux, lumière, malédiction, misère, monter, mystérieux, orgueil, pauvre, porter, rien, sembler, splendeur, ulcéré, vivre | 1 Comment »
Posted by arbrealettres sur 18 janvier 2017

Si le bon Dieu l’avait voulu
Si le bon Dieu l’avait voulu — lanturlurette, lanturlu
— j’aurais connu la Cléopâtre, et je ne t’aurais pas connue.
Las ! que fussè-je devenu sans ton amour que j’idolâtre ?
Mais le bon Dieu n’a pas voulu — lanturlurette et lanturlu
— que je connaisse Cléopâtre.
Gloire à Dieu au plus haut des nues !
Si le bon Dieu l’avait voulu — lanturlurette, lanturlu
— j’aurais connu, vêtues ou nues,
j’aurais connu la Messaline, Agnès, Odette et Mélusine,
Ève plus belle que le jour, Noémie, Sarah, Rebecca,
j’aurais connu la Pompadour,
la Fille du Royal-Tambour, et la Mogador et Clara.
Mais le bon Dieu a bien voulu — lanturlurette, lanturlu
— que je connaisse mes amours.
Tu m’as connu, je t’ai connue.
Las ! que fussé-je devenu sans toi la nuit, sans toi le jour ?
Mais le bon Dieu a bien voulu —
gloire à Dieu au plus haut des nues !
— que je connaisse mes amours, lanturlurette, lanturlu !
(Paul Fort)
Illustration: Massimo Stanzione
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Posted in poésie | Tagué: (Paul Fort), amour, Cléopâtre, devenir, Dieu, Eve, gloire, idôlatrer, jour, nu, nuit, vêtu | 3 Comments »
Posted by arbrealettres sur 10 novembre 2016
Ne crains pas que le Temps sçache les cieux briser ;
Ni qu’en ses mains varient les fleurs ou les Empires.
Rien ne change. Le même lys tu le respires
Qu’autrefois Cléopâtre, — et le même baiser.
(Paul-Jean To ulet)
Illustration
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Posted in poésie | Tagué: (Paul-Jean Toulet), baiser, briser, changer, Cléopâtre, craindre, empires, fleurs, lys, mains, respirer, temps | 4 Comments »