Les pétales mouillés s’agitent sur les tempes
dans les rameaux secrets des coquilles intimes
du clignement de l’oeil aux chemins de halage
les courbes discourent dans les épis de la neige
La rosée
Le calice tendre frémit
délicieusement entre le cuivre et l’orangé
dans l’écrin des paupières vertes
baisers de seins clairs
germent avec les ongles sombres
sur les nuques saupoudrées de pollen
L’étamine
le parfum brille
je t’aime
La corolle striée grandit chante
les roues marbrées des veines caressantes
le duvet des lueurs les liqueurs d’émoi
rouillent dans les ruines où tremblent nos brumes
Le pistil
rosée de fièvre
la neige de soie tombe
respire
Tout autour de nous
tout proche
le scintillement des découvertes
Respire encore
Le sang vif perle
autour du fard dans les coquilles
caressantes entre le bronze et les rameaux
charmeurs de soies passagères
valsent en lèvres
niellées dans la lueur des pétales
(Michel Butor)
Recueil: Collation précédé de HORS-D’OEUVRE scandés par les SOUVENIRS ILLUSOIRES D’UN JAPON TRES ANCIEN
Traduction:
Editions: Seghers
La sueur des ailes tourne
délicate vertigineuse intime
tourbillonne entre le jade séducteur
et la sombre goutte brûlante
mûrit parmi les pédoncules sensibles
improvise en émois de cristaux de sang
Les pétales
Les bijoux grandissent et s’agitent mouillés
des rameaux du café aux coques de la vigne
des clignements lointains aux chemins des nervures
les rubans se faufilent parmi les vagues des écailles
Le calice
la rosée des ailes
je t’aime
Le sexe oscille entre le fauve et le roux
les baisers des truites glissent dans leurs dentelles
entre les pépiements des rives et les galets ocellés
tandis que les cheveux se nouent dans les bijoux
La corolle
viens avec moi
vitrail d’aube
le parfum brille entre les roses
respire
Tout autour de nous
tout proche
le bonheur des sommeils
Respire encore
L’émail tourne entre le rose et le jaune
du sursaut vert aux volets doucement
lentement la mésange explore les remblais
lissant ses plumes dans les flaques de sueur
(Michel Butor)
Recueil: Collation précédé de HORS-D’OEUVRE scandés par les SOUVENIRS ILLUSOIRES D’UN JAPON TRES ANCIEN
Traduction:
Editions: Seghers
Ton corps s’ouvre comme un regard
Comme une fleur au soleil d’un regard
Tu t’ouvres
Beauté sans appui
Un clignement
Tout se précipite dans un oeil sans fond
Un clignement
Tout reparaît dans le même oeil
Le monde brille
Tu resplendis à la limite de l’eau et de la lumière
Tu es le beau masque du jour.
J’ai beau faire et beau dire et tout illuminer
D’un soleil qui pourrait être à ma fantaisie
Si demain j’acceptais d’être nu, d’être né,
De passer du côté chaleureux de la vie,
Je ne vis que d’attendre et nul ne me convie
A franchir la lisière en larmes de l’espoir.
Je ne vis que d’attendre, épuisant mon pouvoir
Sur quelques vains lambeaux qu’en hâte je relie :
Un regard de feu noir, une jambe jolie.
Mais chacun a sa place et chacun a sa part
Dans ces cantons du ciel où caille la lumière,
Où toute nourriture est un effet de l’art,
Le désir ; alchimie — une rouge lanière,
La mémoire : un sursis — plus tard, toujours plus tard !
J’ai beau faire et beau dire, à mon poignet surprendre
Un clignement blafard qui faufile mon sort,
A chaque heure suffit l’impatience tendre
D’une vie acharnée à refuser la mort.