Arbrealettres

Poésie

Posts Tagged ‘clos’

Nous sommes les rossignols (Zatî)

Posted by arbrealettres sur 6 avril 2023



    

Nous sommes les rossignols du plus haut des cieux,
notre roseraie est un clos d’amis

Nous sommes les amoureux au coeur épris,
notre vigueur est souffrance.

Sur l’arène du Seigneur chacun de nous est une noctuelle
Devant le soleil de la Face, toujours nous menons notre ronde.

Le dévot nous croit fous, nous croit pleins de révolte
Nous sommes libres de pure liberté, nos ruines sont florissantes.

Nous venons de nulle part, nous venons d’une grande souche
Au delà de la voûte céleste, au delà du trône nous mènent nos pas.

Le secret de la confiance est en nous, en nous l’éclat de la volonté
La grâce du bonheur est en nous, nombreux sont nos titres.

Qui n’est pas le vrai Salomon, qui ne connaît pas le langage des oiseaux
Celui-là est un indifférent, ô Zatî ! Il ne connaît pas notre savoir.

(Zatî)

Recueil: Poèmes des derviches anatoliens
Traduction: Guzine Dino,Michèle Aquien,Pierre Chuvin
Editions: Fata Morgana

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

RETOUCHE A OUESSANT (Daniel Boulanger)

Posted by arbrealettres sur 25 mars 2023



escalier-dans-le-rocher-jpg

RETOUCHE A OUESSANT

L’escalier en jade
derrière la grêle
monte à la porte close du ciel.
aucun homme n’est entré dans ce tableau
aucune voix n’a demandé que l’on ouvre.

L’instant s’efforce de durer,
d’une pâleur de spectre.

(Daniel Boulanger)

Illustration

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

CHOSES (Gabriela Mistral)

Posted by arbrealettres sur 26 février 2023



Gabriela Mistral
    
CHOSES
A Max Daireaux.

J’aime les choses jamais eues,
avec celles que je n’ai plus.

Je palpe une eau silencieuse,
étale sur des prés frileux,
frissonnant sans la moindre brise,
dans un clos qui fut mon enclos.

Je la vois comme la voyais,
une étrange pensée me vient
et je joue, lente, avec cette eau,
comme avec poisson ou mystère.

Je pense au lieu où j’ai laissé
des pas joyeux que je n’ai plus
et sur le seuil, vois une plaie,
pleine de mousse et de silence.

Je cherche un vers que j’ai perdu
et que m’avait dit à sept ans
une femme faisant le pain,
dont je vois la bouche bénie.

Un parfum défait en rafales
m’apporte bonheur quand il vient,
si ténu qu’il n’est pas parfum,
et c’est l’odeur des amandiers.

Il redonne enfance à mes sens,
je lui cherche un nom et ne trouve
et flaire l’air et les villages,
en quête d’amandiers absents.

J’entends tout près une rivière;
je l’entends depuis quarante ans :
c’est le murmure de mon sang,
ou quelque rythme à moi donné;

ou bien l’Elqui de mon enfance,
que je remonte et passe à gué,
jamais perdu, coeur contre coeur,
nous allons comme deux enfants.

Lorsque je rêve de mes Andes,
j’avance par des défilés
où me parvient un sifflement,
presque une conjuration.

Je vois à ras de Pacifique
mon archipel violet sombre,
avec l’île qui m’a laissé
une âcre odeur d’alcyon mort.

Un dos, un dos grave et paisible
au bout du rêve que je fais
marque la fin de mon chemin;
je m’y repose quand j’arrive.

Tronc d’arbre mort ou bien mon père
est ce vague dos couleur cendre;
je ne l’interroge ni trouble,
je me couche à côté et dors.

J’aime une pierre d’Oaxaca
ou Guatemala; j’en approche;
fixe et rouge, elle me ressemble;
la crevasse en expire un souffle.

Dans son sommeil, je la vois nue,
et ne sais pourquoi la retourne.
Je ne l’ai pas eue peut-être :
c’est mon sépulcre que je vois.

(Gabriela Mistral)

Recueil: Poèmes choisis Prix Nobel de littérature 1945
Editions: Rombaldi

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

Lasse du jardin (Sappho)

Posted by arbrealettres sur 24 février 2023



Illustration: William Bouguereau
    
Lasse du jardin où je me souviens d’Elle,
J’écoute mon cœur oppressé de parfum.
Pourquoi m’obséder de ton vol importun,
Divine hirondelle ?

Tu rôdes, ainsi qu’un désir obstiné,
Réveillant en moi l’éternelle amoureuse,
Douloureuse amante, épouse douloureuse,
Ô pâle Procné !

Tu fuis sans espoir vers la rive qui t’aime,
Vers la mer aux pieds d’argent, vers le soleil.
Je hais le Printemps qui vient, toujours pareil
Et jamais le même !

Ah ! me rendra-t-il les langueurs de jadis,
L’ardente douleur des trahisons apprises,
L’attente et l’espoir des caresses promises,
Les lèvres d’Atthis ?

J’évoque le pli de ses paupières closes,
La fleur de ses yeux, le sanglot de sa voix,
Et je pleure Atthis que j’aimais autrefois,
Sous l’ombre des roses.

(Sappho)

 

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | 1 Comment »

Des yeux de ma dame s’envole (Dante)

Posted by arbrealettres sur 18 février 2023



    

Des yeux de ma dame s’envole
une lumière si belle que lorsqu’elle apparaît
on voit des choses qu’on ne peut décrire
pour leur noblesse et pour leur nouveauté ;
et de ses rayons pleut sur mon coeur
une telle peur qu’elle me fait trembler
et dire : « Ici je ne veux jamais revenir » ;
mais bientôt je perds toutes mes forces :

et je reviens là où je suis vaincu,
réconfortant mes yeux épouvantés,
qui ont d’abord senti cette grande valeur.
Quand j’arrive, hélas, ils sont clos ;
le désir qui les mène ici est éteint :
qu’Amour pourvoie donc à ma survie.

***

De gli occhi de la mia donna si move
un lume si gentil che, dove appare,
si veggion cose ch’uom non pò ritrare
per loro altezza e per for esser nove :
e de’ suoi razzi sovra ‘1 meo cor piove
tanta paura che mi fa tremare
e dicer : « Qui non voglio mai tornare » ;
ma poscia perdo tutte le mie prove :

e tornomi colà dov’io son vinto,
riconfortando gli occhi päurusi,
che sentier prima questo gran valore.
Quando son giunto, lasso, ed e’ son chiusi ;
lo disio che li mena quivi è stinto :
però proveggia a lo mio stato Amore.

(Dante)

 

Recueil: Rimes
Traduction: Jacqueline Risset
Editions: Flammarion

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

Le ciel s’est tu depuis longtemps (Mireille Fargier-Caruso)

Posted by arbrealettres sur 16 février 2023



Illustration: Françoise Naudet
    
Le ciel s’est tu depuis longtemps

seuls quelques bégaiements insomniaques
épreuves chagrins quelques braises

un peu de noir au coin de l’aube

une histoire d’étoiles et d’encre sur les doigts
ogre caché au grenier

l’amour à refaire toujours

sous nos peaux craquelées nous
frappons encore et encore contre
des portes à jamais closes

le ciel s’est tu depuis longtemps

la vie se gagne

(Mireille Fargier-Caruso)

Recueil: Comme une promesse abandonnée
Traduction:
Editions: Bruno Doucey

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

LE DON (Paul Éluard)

Posted by arbrealettres sur 16 février 2023




Illustration: Man Ray
    
LE DON

Elle est noyau figue pensée
Elle est le plein soleil sous mes paupières closes
Et la chaleur brillante dans mes mains tendues

Elle est la fille noire et son sang fait la roue
Dans la nuit d’un feu mûr.

(Paul Éluard)

Recueil: Les mains libres
Traduction:
Editions: Gallimard

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

VIEILLIR VI (Andrée Chedid)

Posted by arbrealettres sur 15 janvier 2023



Illustration: Ron Mueck
    
VIEILLIR VI

Cette maladie
Si difficile
A affronter
Cette perte de liens
Avec l’univers
Cette confrontation
De la mort
Ce passage si bref
Cette demeure si close
Bientôt infinie

Cette perte des liens
Avec l’univers
Cette confrontation
De la mort
Ce temps si court
Ces souvenirs
Bientôt finis
Cette absurdité
Cette ouverture
Sur l’infini
Cette interruption

(Andrée Chedid)

 

Recueil: L’Étoffe de l’univers
Traduction:
Editions: Flammarion

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

La forme de ma pensée (Lokenath Bhattacharya)

Posted by arbrealettres sur 25 novembre 2022




    
La forme de ma pensée

Cette chambre est fermée de tous côtés.
Cependant, un éclair l’a traversée.
Il me semble du moins en avoir aperçu un.
Ou est-ce la merveilleuse réalité
que nous percevons de l’endroit où nous sommes ?
Cet éclair, est-il désormais
ailleurs, hors d’ici ?

Est-ce chose possible ?
Il n’y a en ce lieu aucun passage.
Et les vitres des fenêtres sont couvertes d’épais rideaux.
Cela ne fut-il qu’une intime illusion?
Cet éclair, n’est-il passé qu’en moi?

Ce malentendu entre dedans et dehors
m’a fait entendre un grondement violent.
Pendant qu’en ce vide obscur
la respiration est à peine sensible,
un silence imperturbable demeure
couché et endormi à mes pieds sur lui : un couvre-pied.

Ce frémissement, qui a parcouru coins et recoins de ce lieu,
a provoqué dans les forêts environnantes un cri de douleur soudain,
audible jusqu’à cette chambre si bien fermée,
cri apparu pour s’éteindre aussitôt, sans disparaître pour autant.

Les rayons, qui pénétrèrent et lacérèrent cet instant fragile,
se sont enfuis et s’enfuient encore,
vers le haut et le bas, le nord, le sud.
S’agit-il du vaste ciel où je me tiens assis maintenant?
Quelle étrange vision pour mes yeux clos !

Mon siège tourne, et en tournant
m’entraîne dans une orbite circulaire,
planète au mouvement semblable
à des milliers d’autres en cet espace infini.

Est-ce donc ainsi la forme de ma pensée,
ainsi ce monde :
un royaume céleste dans la chambre ?

***

(Lokenath Bhattacharya)

Traduction de l’auteur et de Marc Blanchet

 

Recueil: Poésies du Monde
Traduction:
Editions: Seghers

Posted in méditations, poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

Triste est ta lyre, Orphée (Adonis)

Posted by arbrealettres sur 23 novembre 2022



Illustration: Chagall
    
Triste est ta lyre, Orphée.
Elle ne peut changer le cours des choses
et pour la captive bien-aimée dans la cage close des morts
elle ne peut créer
un lit d’amour, ni bras, ni tresse.

meurent ceux qui meurent, Orphée.
Le temps qui accourt dans tes yeux s’effondre
et dans tes mains
la lyre s’est brisée.

La mort maintenant est sur la rive
— rien qu’une tête — et chaque fleur
chante et l’eau est une voix.

Je t’écoute maintenant
Je te vois, ombre qui fuit hors du centre.
Et commente l’errante giration.

***

(Adonis)

Traduction de Lionel Ray

Recueil: Poésies du Monde
Traduction:
Editions: Seghers

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

 
%d blogueurs aiment cette page :