Le mouton vit de l’herbe
Le papillon de fleur
Le papillon de fleur
Et toi z’et moi Marianne
Nous nous mourons de langueur
Et toi z’et moi Marianne
Nous nous mourons de langueur.
Le mouton dans le pré
Est en danger du loup
Est en danger du loup
Et toi z’et moi Marianne
Sommes en danger d’amour.
J’ai un copain de frère
Qui me fait enrager
Qui me fait enrager
Il va dire à ma mère
Que j’aime mon berger.
Berger de mon village
Reviens me secourir
Reviens me secourir
Car ce serait dommage
Car ce serait dommage
De me faire languir.
Nous sommes-t-ici z’ensemble
Restons-y bien longtemps
Restons-y bien longtemps
L’amour est agréable
L’amour est agréable
Auprès de son amant.
(Anonyme)
Recueil: Les plus belles chansons du temps passé
Traduction:
Editions: Hachette
J’ me souviens d´un coin de rue
Aujourd´hui disparu
Mon enfance jouait par là
Je me souviens de cela
Il y avait une palissade
Un taillis d´embuscades
Les voyous de mon quartier
V’naient s´y batailler
A présent, il y a un café,
Un comptoir flambant qui fait d’ l´effet
Une fleuriste qui vend ses fleurs aux amants
Et même aux enterrements
Je revois mon coin de rue
Aujourd´hui disparu
Je me souviens d´un triste soir
Où le cœur sans espoir
Je pleurais en attendant
Un amour de quinze ans
Un amour qui fut perdu
Juste à ce coin de rue
Et depuis, j´ai beaucoup voyagé
Trop souvent en pays étrangers
Mondes neufs, constructions ou démolitions
Vous m’ donnez des visions
Je crois voir mon coin de rue
Et soudain apparus
Je retrouve ma palissade
Mes copains, mes glissades
Mon muguet d’deux sous d’printemps
Mes quinze ans… mes vingt ans
Tout c’ qui fut et qui n´est plus
Tout mon vieux coin de rue.
À notre place
On a posé
Des soldats frais
Pour amorcer
La mort d’en face.
Il a fallu toute la nuit pour s’évader.
Toute la nuit et ses ténèbres
Pour traverser, suant, glacé,
Le bois martyr et son bourbier
Cinglé d’obus.
Toute la nuit à se tapir,
À s’élancer éperdument,
Chacun choisissant le moment,
Selon ses nerfs et son instinct
Et son étoile.
Mais passé le dernier barrage,
Mais hors du jeu, sur la route solide,
Mais aussitôt le ralliement
Aux lueurs des pipes premières,
Dites, les copains, les heureux gagnants,
Quelle joie titubante et volubile !
Ce fut la joie des naufragés
Paumes et genoux sur la berge
Riant d’un douloureux bonheur
En recouvrant tout le trésor ;
Tout le trésor fait du vaste monde
Et de la mémoire insondable
Et de la soif qu’on peut éteindre
Et même du mal aux épaules
Qu’on sent depuis qu’on est sauvé.
Et l’avenir ! Ah ! l’avenir,
Il sourit maintenant dans l’aube :
Un avenir de deux longues semaines
À Neuvilly dans une étable…
*
Ah ! les pommiers qui sont en fleurs !
Je mettrai des fleurs dans mes lettres.
J’irai lire au milieu d’un pré.
J’irai laver à la rivière.
Celui qui marche devant moi
Siffle un air que son voisin chante ;
Un air qui est loin de la guerre :
Je le murmure et le savoure.
Et pourtant ! les tués d’hier !
Mais l’homme qui a trébuché
Entre les jambes de la Mort
Puis qui se relève et respire
Ne peut que rire ou sangloter :
Il n’a pas d’âme pour le deuil.
La lumière est trop enivrante
Pour le vivant de ce matin ;
Il est faible et tout au miracle
D’aller sans hâte sur la route.
Et s’il rêve, c’est au délice
D’ôter ses souliers pour dormir,
À Neuvilly, dans une étable.
(Charles Vildrac)
Recueil: Chants du désespéré (1914-1920) –
Traduction:
Editions: Gallimard
Seigneur plus haut que l’Himalaya
Toi qui as lancé Adam en enfer
Parce qu’il osa au paradis
Toucher la pomme
Qu’Eve, son copain, lui tendit,
Que vas-tu faire avec ma vie
Qui sur la terre a dévoré
Tout un grand panier de pommes ?
J’habite seul avec maman
Dans un très vieil appartement
Rue Sarasate
J’ai pour me tenir compagnie
Une tortue, deux canaris
Et une chatte
Pour laisser maman reposer
Très souvent je fais le marché
Et la cuisine
Je range, je lave, j’essuie
À l’occasion je pique aussi
À la machine
Le travail ne me fait pas peur
Je suis un peu décorateur
Un peu styliste
Mais mon vrai métier
C’est la nuit
Où je l’exerce travesti
Je suis artiste
J’ai un numéro très spécial
Qui finit a nu intégral
Après strip-tease
Et dans la salle je vois que
Les mâles n’en croient pas leurs yeux
Je suis un homme, oh!
Comme ils disent
Vers les trois heures du matin
On va manger entre copains
De tous les sexes
Dans un quelconque bar-tabac
Et là, on s’en donne a cœur joie
Et sans complexes
On déballe des vérités
Sur des gens qu’on a dans le nez
On les lapide
Mais on le fait avec humour
Enrobé dans des calembours
Mouillés d’acide
On rencontre des attardés
Qui pour épater leur tablée
Marchent et ondulent
Singeant ce qu’ils croient être nous
Et se couvrent, les pauvres fous
De ridicule
Ça gesticule et parle fort
Ça joue les divas, les ténors
De la bêtise
Moi, les lazzis, les quolibets
Me laissent froid, puisque c’est vrai
Je suis un homme, oh!
Comme ils disent
À l’heure où naît un jour nouveau
Je rentre retrouver mon lot
De solitude
J’ôte mes cils et mes cheveux
Comme un pauvre clown malheureux
De lassitude
Je me couche mais ne dors pas
Je pense à mes amours sans joie
Si dérisoires
À ce garçon beau comme un dieu
Qui sans rien faire a mis le feu
À ma mémoire
Ma bouche n’osera jamais
Lui avouer mon doux secret
Mon tendre drame
Car l’objet de tous mes tourments
Passe le plus clair de son temps
Au lits des femmes
Nul n’a le droit en vérité
De me blâmer, de me juger
Et je précise
Que c’est bien la nature qui
Est seule responsable si
Je suis un homme, oh!
Comme ils disent
Lettre ouverte aux copains et copines (14 janvier 2011)
Sur le point d’achever mon aventure terrestre et de pousser
mon dernier couac
Je vous remercie tous et toutes pour votre immense
gentillesse
Je partirai de ce monde totalement libéré
Ne resteront que notre indestructible amitié
Et mon œuvre
Laquelle pour l’instant demeure lettre morte
Enterrez-moi sous un dolmen
Sur lequel vous ferez graver : « Ici on se rince la dalle »
Pique-niquez sur lui avec bons vins et bonne chère
Mais ne me pissez pas dessus
Et n’oubliez pas : on survit à toutes les morts sauf à la sienne
1
Front commun! (bis)
Nous triompherons demain
Courage! (bis)
2
Front commun! (bis)
Aujourd’hui et pas demain
Bataille! (bis)
3
Front commun! (bis)
Nous nous tenons tous la main
Victoire! (bis)
4
Front commun! (bis)
Ouvrier fais ton chemin
Vengeance! (bis)
5
Front commun! (bis)
Paysan Bonn’ nous la main
En frère! (bis)
6
Front commun! (bis)
Les soldats sont nos copains
Nos frères! (bis)
***
Front commun
1
Si le pain est cher pour l’ouvrier
Si le travail est dur dans les champs
Camarade as-tu pas oublié
Pour qui le blé rapporte l’argent?
Tant de soucis et tant de peines
Et puis la famine en plaine
Pourquoi vivre, amis, si tristement
Quand nous pouvons cesser nos tourments
Et supprimer nos misères
Aujourd’hui! Pas demain! Aujourd’hui
Refrain
Pour combattre avec nos frères,
Aujourd’hui! Pas demain!
Aujourd’hui!
Contre l’exploiteur, Front Commun!
2
À chacun sa part et son labeur
Et à chacun aussi son repos
La machine enfin aux travailleurs
N’imposera plus de lourds fardeaux
Que moins longue soit la semaine,
Plus de travail à la chaîne,
Les barons de l’or et de l’acier
Seront forcés, amis, de plier
Dressons l’ordre populaire
Aujourd’hui! Pas demain! Aujourd’hui!
(Robert Desnos)
Recueil: Les Voix intérieures
Traduction:
Editions: L’Arganier
Si X. avait eu ce jour-là une forte migraine,
si sa femme avait eu besoin de lui pour l’accompagner à l’hôpital,
si le réveil n’avait pas sonné ce matin-là,
s’il avait pris la peine de se raser,
s’il avait renoontré un copain qui lui avait offert un café,
si, si, si…
Ismaël n’aurait pas été écrasé à 9 h 11 minutes
par le chauffeur du camion
qui passait devant chez lui à toute vitesse.
(Tahar Ben Jelloun)
Recueil: Que la Blessure se ferme
Editions: Gallimard