Avez-vous passé le virus à maman?
Voilà, voilà, comment on s’y prend
La toute première fois on n’pense pas à mal
Aujourd’hui l’virus ça semble banal
On va à l’EHPAD faire des embrassades
À sa pauv’ maman que le dentier fout le camp
En plus d’être cardiaque elle s’paye un cancer
Heureusement pour elle qu’elle a un Alzheimer
Virus passé, pour commencer
T’as des tuyaux plein les trous d’nez
S’il prolifère, là c’est plus moche
T’as plus qu’à faire sonner les cloches
Pour passer l’année sans choper le virus
Voilà, voilà, il faut de l’astuce
Avant qu’il n’attaque faut changer ton masque
Puis te faire tester toutes les cavités
Fais bien le contraire de c’qu’y disent de faire
Car on sait maintenant qu’ils se gourent tout l’temps
Après l’confinement, si y’a moins d’macchabés
Après l’couvre-feu y’a trois fois plus d’bébés
Leur confinement, leur couvre-feu
C’est blanc-bonnet mais pas blanc-bleu
La faute aux jeunes, la faute aux vieux
Faut un coupable, c’est jamais eux
Chez l’grand vizir et ses marquis
T’as l’remonte-pente mais pas les skis
Chez l’jupiter quoiqu’il goupille
On a l’bordel mais pas les filles
À l’Elysée la famille Tuche
Ils nous ont pris pour des nunuches
Vérantanplan et l’Salomon
Ils nous ont pris pour des couillons
Le temps passe. Écoute.
Le temps passe. Rapproche-toi.
Tu es le seul à pouvoir entendre le sommeil des maisons, dans les rues,
dans la nuit lente profonde salée et noire de silence, la nuit en bandelettes.
Toi seul peux voir, dans les chambres aveuglées de jalousies,
les combinaisons culottes et les jupons sur les chaises,
les brocs et les cuvettes, les verres à dentiers, le Nième Commandant au mur
et les portraits jaunissants des morts attendant le petit oiseau qui va sortir.
Toi seul peux entendre et voir, derrière les yeux des dormeurs,
les mouvements et les pays et les labyrinthes
et les couleurs et les constellations et les arcs-en-ciel
et les airs de chansons et les désirs et les envolées
et les chutes et les désespoirs et les mers immenses de leurs songes…
***
Under Milk Wood
Time passes. Listen. Time passes.
Come closer now.
Only you can hear the houses sleeping in the streets
in the slow deep salt and silent black, bandaged night.
Only you can see in the blinded bedrooms,
the combs and petticoats over the chairs,
the jugs and basins, the glasses of teeth, Thou Shalt Not on the wall,
and the yellowing, dickybird-watching pictures of the dead.
Only you can hear and see, behind the eyes of the sleepers,
the movements and countries and mazes
and colours and dismays and rainbows
and tunes and wishes and flight
and fall and despairs and big seas of their dreams.
Le virus à maman (Pierre Perret)
Posted by arbrealettres sur 11 janvier 2021
Le virus à maman
Avez-vous passé le virus à maman?
Voilà, voilà, comment on s’y prend
La toute première fois on n’pense pas à mal
Aujourd’hui l’virus ça semble banal
On va à l’EHPAD faire des embrassades
À sa pauv’ maman que le dentier fout le camp
En plus d’être cardiaque elle s’paye un cancer
Heureusement pour elle qu’elle a un Alzheimer
Virus passé, pour commencer
T’as des tuyaux plein les trous d’nez
S’il prolifère, là c’est plus moche
T’as plus qu’à faire sonner les cloches
Pour passer l’année sans choper le virus
Voilà, voilà, il faut de l’astuce
Avant qu’il n’attaque faut changer ton masque
Puis te faire tester toutes les cavités
Fais bien le contraire de c’qu’y disent de faire
Car on sait maintenant qu’ils se gourent tout l’temps
Après l’confinement, si y’a moins d’macchabés
Après l’couvre-feu y’a trois fois plus d’bébés
Leur confinement, leur couvre-feu
C’est blanc-bonnet mais pas blanc-bleu
La faute aux jeunes, la faute aux vieux
Faut un coupable, c’est jamais eux
Chez l’grand vizir et ses marquis
T’as l’remonte-pente mais pas les skis
Chez l’jupiter quoiqu’il goupille
On a l’bordel mais pas les filles
À l’Elysée la famille Tuche
Ils nous ont pris pour des nunuches
Vérantanplan et l’Salomon
Ils nous ont pris pour des couillons
(Pierre Perret)
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Posted in poésie | Tagué: (Pierre Perret), Alzheimer, année, astuce, attaquer, aujourd'hui, banal, bébé, blanc, bleu, bonner, bordel, cancer, cardiaque, cavité, changer, choper, cloche, commencer, comment, confinement, contraire, couillon, coupable, couvre-feu, dentier, dire, EHPAD, Elysée, embrassade, faute, fille, goupiller, heureusement, jeune, Jupiter, macchabée, mal, maman, marquis, masque, moche, nez, nunuche, passer, pauvre, penser, premier, proliférer, remonte-pente, se gourer, ski, sonner, tester, trou, tuyau, vieux, virus, vizir, voilà | 2 Comments »