Arbrealettres

Poésie

Posts Tagged ‘désobéissance’

HOMME MORT (René Guy Cadou)

Posted by arbrealettres sur 28 décembre 2022




    
HOMME MORT

Moi qui n’en suis pour rien dans ma venue sur terre
Qui n’ai jamais appris les mots que pour me taire
Et marche lentement de peur de tout briser
Croyez-vous que je puisse encor vous satisfaire

Tant de mains attendues n’en valent plus la peine
Une heure d’amitié ne fait pas la semaine
Est-ce mon sang déjà qui teinte le pavé
Mon coeur découragé qui tire sur sa chaîne

A quoi bon ces matins sans hâte de l’enfance
Ces fausses libertés mes désobéissances
Les grains d’or du soleil au fond du sablier
Puisque toute ma vie est faite de silence

C’est là dans mon grenier derrière la fenêtre
Avec le ciel qui bouge au fond pour me remettre
Un instant dans le cycle effarant du passé
Que je serai tenté un soir de disparaître

Alors que vous importe un cri dans le naufrage
Le fardeau de ma joie est un maigre bagage
De la douleur, mon Dieu, j’en eus toujours assez
Mon ombre fut mon seul compagnon de voyage

(René Guy Cadou)

 

Recueil: René Guy Cadou Poésie la vie entière oeuvres poétiques complètes
Traduction:
Editions: Seghers

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

Béni soit le serpent (Anise Koltz)

Posted by arbrealettres sur 21 juin 2018




    
Béni soit le serpent
qui m’apprit la désobéissance

Je me purifie
je ne prie plus

J’allume le feu de mon enfer
et je chante

(Anise Koltz)

 

Recueil: Somnambule du jour Poèmes choisis
Traduction:
Editions: Gallimard

Posted in méditations, poésie | Tagué: , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

IRISATIONS (Zéno Bianu)

Posted by arbrealettres sur 8 mars 2018



 

Anne Walker  April1995I [1280x768]

IRISATIONS
(sur un livre peint d’Anne Walker)

ce serait
fulgurer et trembler

ouvrir et rassembler
ébranler le temps

ce serait
changer le coeur
de l’adversaire

ce serait
un passage
vers le tout autre

ce serait
ranimer chaque instant

ne plus se posséder
abandonner tous les garde-fous

ce serait
une vigilance fraîche
en prise sur notre radar intime

un éloge du court-circuit

ce serait
une réincarnation permanente

ce serait
une désobéissance retrouvée

respirer respirer
loin des chaînes du connu

ce serait
forcer amoureusement toutes les portes

une immense ouverture
un déchirement du regard

ce serait
ne jamais ôter
son mystère à la réalité

ce serait
une plongée réenchantée

un corps-espace

ce serait
caresser l’indicible
capter le foisonnement

parier sans fin sur l’illimité

(Zéno Bianu)

Illustration: Anne Walker

 

 

Posted in poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

NE TE SUICIDE PAS, SEIGNEUR (Joë Bousquet)

Posted by arbrealettres sur 7 décembre 2017



Illustration: Salvador Dalí
    
NE TE SUICIDE PAS, SEIGNEUR

Ne te suicide pas, Seigneur,
voici qu’apparaît une orchidée parmi les ruines ;
ne te suicide pas, Seigneur,
voici que renaît le ruisseaux dans le cratère d’une bombe ;
ne te suicide pas, Seigneur,
le ciel a mis du givre sur sa balafre, l’océan a guéri sa blessure d’un bandage de corail.

Écoute, Seigneur, ton univers qui était enfantin comme le cartilage,
le voilà revenu de sa première fougue, de sa plus grande désobéissance ;
les comètes continuent de voyager, comme des berlines après une halte au carrefour de deux paniques ;
l’azur n’en est que plus profond, d’avoir été un rapace ;
l’aurore n’en est que plus belle, d’avoir failli ne jamais revenir.

Tout n’a pas tellement changé, Seigneur :
regarde ce hameau, combien de cascades pourraient naître dans sa mare,
combien de peupliers dans son ortie !

Tout n’a pas tellement souffert, Seigneur :
déjà l’épi de blé pousse dans l’orbite de ceux qui moururent de faim,
déjà les fillettes sautent à la corde sous les ombres de ceux que l’on décapita.

Tout n’est pas tellement tragique, Seigneur,
puisqu’il y a la route sans fin où même l’exil est oublié,
puisqu’il y a le vent si doux que même les soupirs y sont joyeux,
puisqu’il y a tout ce qui hurle l’immense plaisir d’être vivant.

(Joë Bousquet)

 

Recueil: Poèmes, un
Traduction:
Editions: Gallimard

Posted in méditations, poésie | Tagué: , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , | Leave a Comment »

 
%d blogueurs aiment cette page :