Moi l’Océan, sans but, sans repos, sans mémoire
J’efface le chemin des saisons et des mois,
Saoul de mes profondeurs, et nocturne est ma gloire
Et mes flots refermés n’entendent que leur voix.
Quand aux flancs du matin, tout armé, je m’élance,
Une sûre défaite enflamme mon plaisir.
Brisez en mille éclats les murs de mon silence
Et l’ombre des oiseaux si fragile à saisir,
Beaux astres inouïs éclos à ma ceinture.
Je fais de chaque instant la plus vaine aventure ;
Je suis le pouls hardi d’un vaste nulle part
Mais aux midis chargés d’une lente disgrâce
Quand monte une méduse et son soleil hagard
Oh le ciel reposé contre moi face à face !
Dans la pure lumière de l’aube qui point
je vis l’Univers ceint de la Couronne de Paix.
De leur tête inclinée les arbres lui donnaient leur bénédiction.
Solidement établie au coeur de l’Univers, la Paix
se garde elle-même à travers les luttes et la douleur au long des âges.
Dans ce monde tourmenté, elle se manifeste chaque jour, à l’aube et au crépuscule.
O Poète, héraut du Bien,
tu as sûrement reçu son invitation.
Si, ignorant son appel,
tu deviens le porte-parole du désespoir,
l’émissaire de la difformité,
si tu joues faux sur une harpe cassée,
défigurant l’éternelle vérité de l’Univers,
alors pourquoi as-tu été mis au monde ?
Dans les rizières pourquoi laisse-t-on les chardons prospérer,
pour insulter la faim de l’Homme ?
Si le malade considère la maladie comme l’ultime vérité,
mieux vaut mourir en silence.
Le poète dans l’Homme devrait-il ne devenir qu’objet de disgrâce
en suivant les sentiers d’une imagination sans pudeur,
et mettant un masque éhonté
devrait-il ternir l’éclat de la figure humaine ?
Ce soir mon amour je ne t´aime plus
Tu es plus loin que la distance qui nous sépare
Et d´autant plus absente que tu n´es nulle part
Plus étrangère que la première venue
Ce soir mon amour je ne te cherche plus
Parmi mes souvenirs au fond de ma mémoire
Je ne t´attends plus sur le quai d´aucune gare
Je me souviens à peine t´y avoir attendue
Je sais que nous buvions du vin après l´amour
Que nos nuits commençaient quand se levait le jour
Comme un torrent d´ébène tes cheveux sur ton cou
Et ton regard meurtri quand tu fais les yeux doux
Ce soir mon amour je ne te trompe plus
Avec cette fille qui dort à mes côtés
J´étais seul je lui ai demandé de rester
Je suis seul très souvent et je m´y habitue
Ce soir mon amour tu ne me manques plus
Tu ne me manques pas il me manque d´aimer
De ne plus être inutile inanimé
De n´avoir rien à perdre et d´avoir tout perdu
Je connais ta folie je connais ta pudeur
Je sais qu´on se ressemble comme frère et sœur
Je connais ton odeur je connais ton parfum
Je te connais par cœur et je ne sais plus rien
De toi mon amour que je n´aime plus
Sans arriver à me sentir enfin libre
Pareil à un danseur qui perdrait l´équilibre
Comme un prince en disgrâce comme un ange déchu