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Posts Tagged ‘ébène’

Vénus noire (Franz Hellens)

Posted by arbrealettres sur 7 octobre 2021



 

eau noire

Vénus noire à l’étreinte squameuse et froide…
Tous les murs se sont renversés dans l’eau, les pignons ont coulé a fond,
et les cheminées, comme des pilotis, sont fichées dans la vase.
C’est l’eau noire qui vit maintenant
pour tous ceux qui dorment un sommeil de mort entre les murs.

[…]

oh! la belle eau, noire comme une bohémienne, lisse et luisante comme l’ébène…
Pas une détresse qui ne souhaite d’y finir avec volupté.
Pas une joie qui ne rêve de s’étirer dans ce baiser…
Elle s’obscurcit de cette nuit qu’elle surpasse,
comme un amant qui prend au contact de l’autre le feu dont il le dévore.

(Franz Hellens)

 

 

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Dans l’angle obscur de la chambre, le piano Songe (Georges Rodenbach)

Posted by arbrealettres sur 25 mars 2021


 

Dans l’angle obscur de la chambre, le piano
Songe, attendant des mains pâles de fiancée

De qui les doigts sont sans reproche et sans anneau,
Des mains douces par qui sa douleur soit pansée
Et qui rompent un peu son abandon de veuf,
Car il refrémirait sous des mains élargies

Puisqu’en lui dort encor l’espoir d’un bonheur neuf.
Après tant de silence, après tant d’élégies
Que le deuil de l’ébène enferma si longtemps,
Quelle ivresse si, par un soir doux de printemps,

Quelque vierge attirée à sa mélancolie
Ressuscitait de lui tous les rythmes latents :
Gerbe de lis blessés que son jeu lent délie;
Eau pâle du clavier où son geste amusé

— Rafraîchi comme ayant joué dans une eau claire —
Ferait surgir un blanc cortège apprivoisé,
Cygnes vêtus de clair de lune en scapulaire,
Cygnes de Lohengrin dans l’ivoire nageant

Hélas! le piano reste seul et morose
Et défaille d’ennui par ce soir affligeant
Où dans la chambre meurt une suprême rose.

La nuit tombe; le vent fraîchit; nul n’est venu
Et, résigné parmi cette ombre qui le noie,
Il refoule dans le clavier désormais nu
Les possibilités de musique et de joie !

(Georges Rodenbach)

Illustration

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Griot de ma race (Ndèye Coumba Diakhaté)

Posted by arbrealettres sur 30 octobre 2020



Ndèye Coumba Diakhaté
    
Griot de ma race

Je suis griot de ma race :
Poète, troubadour;
Je chante très haut ma race, mon sang,
Qui clame qui je suis.

Je suis… bois d’ébène,
Que ne consume le feu lent du mensonge.
Je suis… la latérite rouge du sang farouche de mes ancêtres.

Je suis… la brousse inviolée,
Royaume des singes hurleurs.

Pas le Nègre des bas quartiers,
Relégué dans la fange fétide, la suie qui colle;
Là-bas, dans la ville grise, qui accable, qui tue.

Je suis… qui tu ignores :
Soleil sans leurre; pas de néon hypocrite.
Je suis… le clair de lune serein, complice des ébats nocturnes,

Je suis le sang qui galope, se cabre d’impatience
Dans le dédale de mes artères. Je suis qui tu ignores.
Je crache sur l’esprit immonde.

Et voici que je romps les chaînes,
Et le silence menteur
Que tu jetas sur moi.

(Ndèye Coumba Diakhaté)

 

Recueil: 120 nuances d’Afrique
Traduction:
Editions: Bruno Doucey

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Rondeau des cygnes d’Angleterre (Jacques Roubaud)

Posted by arbrealettres sur 2 février 2020



Illustration 
    
Rondeau des cygnes d’Angleterre

Les beaux cygnes d’Angleterre
Des grands parcs et des rivières
Appartiennent à la Reine
C’est eux qui portent sa traîne
Au palais de Westminster

Ils ont l’air noble et sévère
Un long cou blanc comme laine
Ou neige ou d’un noir d’ébène
Les beaux cygnes d’Angleterre

Si on leur parle ils ne prennent
De répondre pas la peine
Tout le monde doit se taire
Et c’est pourquoi je préfère
Les oies qui veillent Big Ben
Aux beaux cygnes d’Angleterre

(Jacques Roubaud)

 

Recueil: Rondeaux poésies
Traduction:
Editions: Gallimard

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CE VISAGE… (Louis Guillaume)

Posted by arbrealettres sur 27 décembre 2019



Ce visage dans la brume,
Ce regard qui se dérobe
Pour retourner à la nuit,
Cette bouche du matin
Toute modelée de rêves
Comme un arc encor vibrant
De discours inentendus,
Ce visage fugitif
Qui flotte entre deux sommeils,
Je le promène avec moi
Dans les ruelles humaines.
Il est l’astre aux rayons noirs,
Il est mon soleil d’ébène,
Mon unique vérité
Quand je cherche ceux qui m’aiment
Et que je me perds moi-même
Sous tous les masques du jour.

(Louis Guillaume)

Illustration

 

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Silenciaire (Werner Lambersy)

Posted by arbrealettres sur 28 mars 2019



Silenciaire
Il apparaissait
Claquait des bois d’ébène et tous figés
Dans l’huile lourde du respect
Se taisaient
En l’honneur du signe de sa souffrance
Il était à Byzance
Le silenciaire de l’empereur
Et pour eux tous
Il savait seul

(Werner Lambersy)


Illustration: Odilon Redon

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Ghetto (Guy Tirolien)

Posted by arbrealettres sur 23 juillet 2018



 

Ghetto

pourquoi m’enfermerais-je
Dans cette image de moi
Qu’ils voudraient pétrifier?
Pitié je dis pitié!
J’étouffe dans le ghetto de l’exotisme

Non je ne suis pas cette idole
D’ébène
Humant l’encens profane
Qu’on brûle
Dans les musées de l’exotisme

Je ne suis pas ce cannibale
De foire
Roulant des prunelles d’ivoire
Pour le frisson des gosses

Si je pousse le cri
Qui me brûle la gorge
C’est que mon ventre bout
De la faim de mes frères

Et si parfois je hurle ma souffrance
C’est que j’ai l’orteil pris
Sous la botte des autres

Je ne suis pas non plus
Statue figée du révolté
Ou de la damnation
Je suis bête vivante
Bête de proie
Toujours prête à bondir

À bondir sur la vie
Qui se moque des morts
À bondir sur la joie
Qui n’a pas de passeport
A bondir sur l’amour
Qui passe devant ma porte

Je dirai Beethoven
Sourd
Au milieu des tumultes
Car c’est pour moi
Pour moi qui peux mieux le comprendre
Qu’il déchaîne ses orages

Je chanterai Rimbaud
Qui voulut se faire nègre
Pour mieux parler aux hommes
Le langage des genèses

Et je louerai Matisse
Et Braque et Picasso
D’avoir su retrouver sous la rigidité
Des formes élémentales
Le vieux secret des rythmes
Qui font chanter la vie

Oui j’exalterai l’homme
Tous les hommes
J’irai à eux
Le coeur plein de chansons
Les mains lourdes
D’amitié
Car ils sont faits à mon image

(Guy Tirolien)

 

 

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Belle Cloris (Góngora)

Posted by arbrealettres sur 22 avril 2018



Illustration: James Sant
    
XV

Quel ivoire du Gange, quel marbre
blanc de Paros, quel ébène luisant,
quel ambre fauve, quel or excellent,
quel argent fin, ou quel cristal si clair,

quelle rosée si frêle, quel saphir
oriental si rare, quel rubis ardent,
ou, en l’heureux âge présent,
main si savante de sculpteur si rare

rendra le visage, quoiqu’outrage
miraculeux à la beauté
son beau labeur, son aimable fatigue,

qui ne ferait figure au soleil d’une cire,
en regard de tes yeux — son image,
belle Cloris, Ô ma douce ennemie ?

***

XV

¿ Cuál del Ganges marfil, o cuál de Paro
blanco mármol, cuál ébano luciente,
cuál ámbar rubio, o cuál oro excelente,
cuál fina plata, o cuál cristal tan claro,

cuál tan menudo aljófar, cuál tan caro
oriental safir, cuál rubí ardiente,
o cuál, en la dichosa edad presente,
mano tan docta de escultor tan raro

bulto de ellos formara, aunque hiciera
ultraje milagroso a la hermosura
su labor bella, su gentil fatiga,

que no fuera figura al sol de cera,
delante de tus ojos, su figura,
oh bella Clori, oh dulce mi enemiga?

(Góngora)

 

Recueil: Sonnets
Traduction: François Turner
Editions: Imprimerie Nationale

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CHANSON SUR LE FLEUVE (Textes chinois)

Posted by arbrealettres sur 10 avril 2018




    
CHANSON SUR LE FLEUVE
Li-Taï-Pé

Mon bateau est d’ébène ;
ma flûte de jade est percée de trous d’or.

Comme la plante, qui enlève une tache sur une étoffe de soie,
le vin efface la tristesse dans le cœur.

Quand on possède de bon vin, un bateau gracieux et l’amour d’une jeune femme,
on est semblable aux génies immortels.

(Textes chinois)

 

Recueil: Le Livre de Jade
Traduction: Judith Gautier
Editions: Plon

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Le tombeau des rois (Anne Hébert)

Posted by arbrealettres sur 9 mars 2018



chambre funéraire

Le tombeau des rois

J’ai mon coeur au poing
Comme un faucon aveugle.

Le taciturne oiseau pris à mes doigts
Lampe gonflée de vin et de sang,
Je descends
Vers les tombeaux des rois
Étonnée
À peine née.

Quel fil d’Ariane me mène
Au long des dédales sourds?
L’écho des pas s’y mange à mesure.

(En quel songe
Cette enfant fut-elle liée par la cheville
pareille à une esclave fascinée?)

L’auteur du songe
presse le fil,
Et viennent les pas nus
Un à un
Comme les premières gouttes de pluie
Au fond du puits.

Déjà l’odeur bouge en des orages gonflés
Suinte sous le pas des portes
Aux chambres secrètes et rondes
Là où sont dressés les lits clos.

L’immobile désir des gisants me tire.
Je regarde avec étonnement
À même les noirs ossements
Luire les pierres bleues incrustées.

Quelques tragédies patiemment travaillées,
Sur la poitrine des rois, couchées,
En guise de bijoux
Me sont offertes
Sans larmes ni regrets.

Sur une seule ligne rangés :
La fumée d’encens, le gâteau de riz séché
Et ma chair qui tremble :
Offrande rituelle et soumise.

Le masque d’or sur ma face absente
Des fleurs violettes en guise de prunelles,
L’ombre de l’amour me maquille à petits traits précis ;

Et cet oiseau que j’ai
Respire
Et se plaint étrangement.

Un frisson long
Semblable au vent qui prend, d’arbre en arbre,
Agite sept grands pharaons d’ébène
En leurs étuis solennels et parés.

Ce n’est que la profondeur de la mort qui persiste,
Simulant le dernier tourment
Cherchant son apaisement
Et son éternité
En un cliquetis léger de bracelets
Cercles vains jeux d’ailleurs
Autour de la chair sacrifiée.

Avides de la source fraternelle du mal en moi
Ils me couchent et me boivent ;
Sept fois, je connais l’étau des os
Et la main sèche qui cherche le coeur pour le rompre.

Livide et repue de songe horrible
Les membres dénoués
Et les morts hors de moi, assassinés,
Quel reflet d’aube s’égare ici?
D’où vient donc que cet oiseau frémit
Et tourne vers le matin
Ses prunelles crevées?

(Anne Hébert)

 

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