Dans un jour de l’homme sont réunis
les jours du temps, depuis l’inconcevable
jour initial où un Dieu effroyable
fixa d’avance jours et agonies,
jusqu’au jour où le fleuve omniprésent
du temps humain revivra sa naissance,
l’Éternel, et mourra dans le présent,
l’hier, le futur, et dans mon existence.
Entre l’aube et la mort, il y a l’histoire
universelle de la nuit, je peux
voir à mes pieds les chemins de l’Hébreu,
Carthage annihilée, Enfer et Gloire.
Accorde-moi, seigneur, joie, force, amour,
pour affronter la cime de ce jour.
La charité doit aplanir la différence de niveau entre celui qui mendie et celui qui donne ;
mais peu nombreux sont les donateurs qui savent se mettre au même niveau que les mendiants ;
et si le pain est donné et servi au nom du Seigneur,
cela n’ôte point toujours au pain d’autrui son effroyable amertume.
En moi il insuffla son esprit.
C’est pourquoi tout m’est si difficile.
Les étoiles passent par mon ciel et ne me laissent
aucun repos.
Et de par mon âme roulent les brumes obscures de la création.
Ma journée est emplie de lumière, ma nuit sans limites.
Je suis l’homme. A moi est arrivé l’effroyable.
Sa propre âme qu’il a insufflée en moi.
***
I mig blåste han in sin ande.
Därför är allting så svårt för mig.
Stjärnorna vandrar över min himmel och ger mig ingen ro.
Och genom min själ vältrar dunkla skapelsetöcken.
Min dag är full av ljus, min natt är utan gräns.
Jag är människan. Mig hände det fruktansvärda
att han blåste in sin egen själ i mig.
Pour toile de fond, l’infini et l’éternité;
au devant, des myriades d’êtres,
comme des ombres chinoises,
s’agitant, se poussant, se pressant, paraissant et disparaissant,
avec des gestes bizarres, incompréhensibles, grotesques,
charmants quelquefois, plus souvent ridicules :
curieux théâtre, comédie effroyable!
(Henri Cazalis)
Recueil: Le livre du Néant
Editions: Alphonse Lemerre
Bruit de pas. Du long couloir dans la serrure
Un homme vient
L’homme est effroyable
Par le nez de la serrure, l’eau assombrie de la montagne
Coule et entre. Dans mes méninges flotte ma lointaine
Enfance; l’araignée d’eau,
Les plantes marines, le bruissement de l’eau
Qui tourbillonne une ou deux fois à mes oreilles,
Soudain tout s’arrête et m’ordonne
«Avoue!»
Par l’oesophage de la serrure, ardemment
Le téléphone sonne encore.
Dans la gorge, d’un seul trait
J’avale un couteau glacial.
Le couteau enfoncé,
Répondre à la question.
«Nous ne sommes plus des hommes»
Par le trou de la serrure, souffle le vent sonore.
Les feuilles de l’orme s’agitent
Quelqu’un le prend à la gorge et le secoue
branche par branche,
Les papiers à deux faces flottent
Le dernier saisit l’empreinte
De mon doigt.
Je voudrais dormir.
«Ah, ce corps, pourquoi existe-t-il?»
Craquement de la porte â l’extérieur ;
Bruit de pas ; du long couloir dans la serrure
Un homme sort.
En tombant,
Demandant grâce, il dit enfin
Aux mouches «ONLY WAY TO FLY »
(Hwang Ji-u)
Recueil: DE L’HIVER-DE-L’ARBRE AU PRINTEMPS-DE-L’ARBRE Cent poèmes __..
Traduction: Kim Bona
Editions: William Blake & co
Sur le répondeur téléphonique
si proche encore si présente
mais donnant la mesure effroyable du vide
d’où elle résonne
la voix de l’ami disparu
ravive le chagrin de son absence
je suis actuellement indisponible
prévient-il
depuis l’au-delà
mais vous pouvez me laisser un message
La fleur a voulu croître, en sa grâce divine,
Dans l’aride chaos de cette âpre ravine.
Pitoyable, elle épand son âme tendre au fond
D’un gouffre où le vertige en la terreur se fond.
Elle reste la joie et la parure uniques
Du lieu farouche où, pris de soudaines paniques,
Comme un funeste vol passent les aquilons ;
Car ni l’éblouissante aurore aux reflets blonds,
Ni les éclairs pourprés que le soir ressuscite,
N’osent descendre au cœur de l’effroyable site.
Et le pâtre qui loin du foyer s’exila,
Et que sa troupe agreste a conduit jusque-là,
Avec les durs béliers errant de roche en roche,
S’il aperçoit la fleur sauvage, s’en approche,
Et, tandis que l’écho vibre au bruit de ses pas,
La contemple, songeur, et ne la cueille pas.
Allons vieille imperfaite, Vieille il vous faut sortir,
Vous estes si infecte qu’on ne vous peut sentir.
Sortez à la pareille, videz ceste maison,
Branlez le fesson la vieille, branlez le fesson.
Allons vieille barbue
Qui n’avez que deux dans,
Et si estes vestue
En flle de quinze ans,
Sortez…
Allons vieille vileine,
vileine jusqu’au bout,
Vostre puante allaine
Se sent desia par tout.
Sortez…
Allons vieille inutile,
Inutile à tout bien,
A vostre oeil qui distille
Le veiller n’en vaut rien.
Sortez…
Allons vieille ridée,
Suant, puant, teton :
Ce n’est pas une idée
Que ce que nous voyons.
Sortez…
Allons vieille effroiable,
Vray remede d’amour,
Allez à tous les diables,
C’est là vostre séjour.
Sortez…
Allez vieille bossue,
Eschine à dos de lut,
Quand un endroit vous sue,
Tout le reste vous put.
Sortez…
Allons jambe tortue,
Oeil coullant, nez puant,
Orde salle et bossue,
Corps infect et puant,
Allons face vermeille,
Rouge comme un tison,
Branlez le feson.
***
Come now, imperfect old woman,
Old woman, you must go out,
You are so foul that we cannot bear you.
Get out of this house,
Shake your buttocks, old woman, shake your buttocks
Let’s go, bearded old woman,
You have only two teeth,
And if you are dressed
Like a girl of ffteen,
Get out…
Let’s go, ugly old woman,
ugly to the tips of your fngers,
Your stinking breath
Can already be smelt everywhere.
Get out…
Let’s go, useless old woman,
Useless for anything,
To your eye that distils
Watching out for it is worthless.
Get out…
Let’s go, wrinkled old woman,
Sweating stinking breast:
It is not an idea
What we see.
Get out…
Let’s go, frightful old woman,
A true remedy for love,
Go to hell,
That is your dwelling place.
Get out…
Go on, old hunchback,
Lute-backed spine,
When a place makes you sweat,
All the rest stinks.
Get out…
Let’s go, twisted leg,
Runny eye, stinking nose,
Filthy, repugnant old humpback,
Vile, stinking body,
Let’s go, crimson face,
Red as a brand,
Shake your buttocks.
***
Nun denn, Ihr abgetakelt‘ Schachtel,
Alte, Ihr müsset hier heraus,
Ihr stinkt ja so abscheulich,
Dass man Euch gar nicht riechen möcht.
Heraus nun gleich,
Leert dieses Haus,
Und rühret Euern Arsch!
Nun denn, da, olle Bärt‘ge
Die Ihr habet nur zwie Zahn‘,
Auch wenn Ihr seid gekleid‘t
Als Jungfer von fünfzehn Jahr‘n,
Heraus nun gleich,…
Nun denn, alte Scharteke,
Scharteke bis zum Ende,
Euer stinkend‘ Atemduft
Verpestet schon überall die Luft!
Heraus nun gleich,…
Nun denn, alter unnützer Besen,
Unnütz für alles hier!
Eurem tränend‘ Aug‘
Das Wachsein nicht viel taugt!
Heraus nun gleich,…
Nun denn, alter, gar falt‘ger Drachen,
Schwitzend, stinkend Busen!
Das sieht nach gar nichts aus,
Was uns hier ist vor Aug‘!
Heraus nun gleich,…
Nun denn, gar alter Trampel,
Ihr wahrlich‘ „Liebesapfel“,
Schert Euch zu allen Teufeln,
Da bleibet Ihr dann geut!
Heraus nun gleich,…
Nun fort, alte und garst‘ge Krumme,
Mit einem Buckel wie‘ne Laut‘!
Wenn ein‘ Stell ist wie verpest‘,
Dann stinket auch der Rest!
Heraus nun gleich,…
Nun denn, Bein krumm,
Aug‘ triefend, Nas‘ schniefend,
Schmutzig‘ & bucklig‘ Drecksweib,
Unsäglich‘ und elendig‘ Leib!
Nun fort, krebsrot‘ Gesicht,
Rot wie ein glühend‘ Scheit,
Rührt Euern Arsch so breit!