ventrue mais finesse, une bonbonne
çа devrait faire
une espèce de gros poème çа fait
comme un plaisir à l’ceil
quelque chose d’élémentaire
un rien alambiqué quand même
parce qu’autant la pesée d’un peu de lumière
que par exemple des souvenirs d’ustensiles
pris dans la couleur et l’ésotérisme de vieilles peintures
quelque chose d’érudit
et d’artisanal en somme
comme la sorte de poème
à quoi je m’en vais aboutir
des mots l’écriture que
ça suffisait souffler dedans.
(James Sacré)
Recueil: Bocaux, bonbonnes, carafes et bouteilles (Comme)
Traduction:
Editions: Le Castor Astral & Le Noroît
LA LUMIÈRE ÉBLOUIT L’INVISIBLE
(Le Philosophe et le Poète)
Un des états extrêmes qu’atteint l’homme
dans les peintures métaphysiques :
un mannequin d’osier
traversé de songes et d’énigmes.
Le ciel est sans oiseaux et les façades ont des fenêtres aveugles.
Dans la pénombre de la pièce, au premier plan,
deux Figures méditantes, de plâtre et de treillis,
contemplent un tableau posé sur un chevalet
Dehors la lumière éblouit l’invisible.
Sur un fond outremer presque vide,
le tableau dessine le trajet d’astres capricieux
ou bien la chute des Esprits élémentaires de la matière.
On peut y voir, si l’on préfère,
les théorèmes de la Nuit.
Dehors la lumière éblouit l’invisible.
Que se disent les deux Figures ?
—jusqu’où s’étend le bleu du doute ?
demande le Philosophe.
—jusqu’au parloir de l’orage,
répond le Poète.
Dehors la lumière éblouit l’invisible.
(Jacques Lacarrière)
Recueil: A l’orée du pays fertile
Traduction:
Editions: Seghers
(sur une chorégraphie de Brigitte Chataignier)
je ne sais pas
j’ouvre
les yeux
sur le monde
je ne sais pas
ne sais pas
dans la nuit
dans le noir
les mots
apparaissent
les mots
résonnent
le mot danse
apparaît
j’aimerais tant
oh oui
avec
tout mon corps
avec
toute ma voix
m’incarner
complètement
absolument
j’aimerais
j’aimerais
oui
j’aimerais tant
je ne sais pas
j’ouvre les yeux
sur chaque moment
le regard
l’infini
le regard
l’infini
j’écoute
j’écoute de toutes mes forces
et le mot terre apparaît
je respecte la terre
le son de la terre
je sonde la terre
le corps de la terre
les éléments se tiennent
par la main
tous les éléments
je descends dans la terre
les manteaux
qui me recouvrent
tombent les uns après les autres
je passe
de l’autre côté de la tombe
de l’autre côté des cendres
j’expire
je vais au bout du corps
au bout de la terre
au bout de la femme
j’inspire
Prends ces mots dans tes mains et sens leurs pieds agiles
Et sens leur coeur qui bat comme celui d’un chien
Caresse donc leur poil pour qu’ils restent tranquilles
Mets-les sur tes genoux pour qu’ils ne disent rien
Une niche de sons devenus inutiles
Abrite des rongeurs l’ordre académicien
Rustiques on les dit mais les mots sont fragiles
Et leur mort bien souvent de trop s’essouffler vient
Alors on les dispose en de grands cimetières
Que les esprits fripons nomment des dictionnaires
Et les penseurs chagrins des alphadécédets
Mais à quoi bon pleurer sur des faits si primaires
Si simples éloquents connus élémentaires
Prends ces mots dans tes mains et vois comme ils sont faits