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Poésie

Posts Tagged ‘entonner’

Au loin disparu (Su Wu)

Posted by arbrealettres sur 13 décembre 2022



Illustration: Shan Sa
    
Au loin disparu

Le cygne déploie ses ailes agiles et laisse le vent le porter au loin.
Un air vif le rappelle au souci et il tourne la tête, incertain.
Un cheval livre ses pas lourds à la steppe désertée — les siens sont partis.
Son coeur s’enlise dans des pensées interdites comme ses sabots dans la glaise meuble.
Le destin s’abat sans pitié sur deux dragons que leurs ailes opposent.
Il reste pourtant les chants qui savent révéler les amours secrets.
À l’ami qui s’en va, je joins les mots du ruisseau où coulent mes larmes.
L’écho des tambours exalte les vertus mâles et déchire les coeurs des compagnons vaincus.
La solitude des vers alimente le brasier du souvenir
Et plombe mon âme mon âme brisée dans l’horizon des peines.
J’aimerais pouvoir entonner encore les airs de l’enfance,
Ton pays est loin désormais — il t’ignore jusqu’au trépas.
Le mal me dévisage et il pleut sur les joues des filets d’amertume.
Les cygnes volent leur vie entière deux à deux
Mais pour nous, hommes, qui ne pouvons nous envoler ensemble
Il n’y a que routes mornes aux destins séparés.

(Su Wu)

(140-60)

 

Recueil: Nuages immobiles Les plus beaux poèmes des seize dynasties chinoises
Traduction: Alexis Lavis
Editions: l’Archipel

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Madame (Briceida Cuevas Cob)

Posted by arbrealettres sur 2 octobre 2022



Illustration: Eugène Prévost-Messemin

    
Madame,

tes seins sont deux filles qui jouent
à se frapper quand tu laves ton linge
L’arc-en-ciel de ton regard est tendu dans l’écume
Qui te verrait soutiendrait que tu ne souffres pas
Il ne saurait pas qu’au pied de ton bac à lessive
s’entasse une partie de ton histoire
Le sifflement que tu entonnes
est le fil sur lequel tu accroches ta fatigue
Le vent est un gamin moqueur
qui tire et tend ton linge
Sur les arbres de l’orient
le soleil est un nouveau-né
qui répand ses larmes tièdes et jaunes

(Briceida Cuevas Cob)

 

Recueil: Poésies du Monde
Traduction:
Editions: Seghers

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Sur l’air He Manzi (Zhang Hu)

Posted by arbrealettres sur 15 juillet 2022



Illustration: He Zhihong
    
Sur l’air He Manzi

À trois mille lieues de son pays,
Confinée dans un palais depuis vingt longues années,
Elle entonne l’air He Manzi,
Et verse des larmes devant son souverain.

***

(Zhang Hu)

Recueil: Poèmes de Chine de l’époque dynastique des Tang
Traduction: Guillaume Olive & He Zhihong
Editions: Seuil

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Commencements (Christian Viguié)

Posted by arbrealettres sur 2 avril 2019



Commencements

C’est en écoutant le chant
qu’entonne la plaine
que nous savons si notre regard
est un geste du dedans ou du dehors.

Le temps seul
n’est pas écriture
il n’occupera pas la plaine
de ce qu’elle a voulu dire.

Plus sûrement
corbeaux et soleils
recommenceront l’énigme
comme si se brouillaient indéfiniment
le commencement et la fin

(Christian Viguié)

Découvert ici: http://revuedepoesie.blog.lemonde.fr/

Illustration: ArbreaPhotos  

 

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Pluie dans la nuit (Nakahara Chûya)

Posted by arbrealettres sur 4 août 2018




    
Pluie dans la nuit
– image de Verlaine –

La pluie ce soir encore entonne sa chanson,
Sa chanson monotone.
Lalala, lalala, toujours la même chanson.
Et voilà la carcasse de Verlaine
Qui passe dans la ruelle au milieu des entrepôts.

Dans la ruelle des entrepôts, c’est l’éclair de la cape,
L’ironie radine de la tourbe.
Mais au bout de la ruelle,
Au bout de la ruelle, l’espoir luit faiblement …
Qu’y a-t-il d’autre que cet espoir ?

A quoi bon toutes ces voitures ?
A quoi bon toutes ces lumières ?
Yeux globuleux, et vitreux, des lampes des cafés !
Au loin la chimie chante.

(Nakahara Chûya)

Découvert ici: http://laboucheaoreilles.wordpress.com/

Recueil: Nakahara Chûya Poèmes
Traduction: Yves-Marie Allioux
Editions: Picquier poche

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Si tu m’aimais (Constantin Cavàfis)

Posted by arbrealettres sur 10 mai 2018



    


Si tu m’aimais

Si la lumière de l’amour
donnait sa chaleur bienfaisante
à la nuit noire de mes jours,
aussitôt mon âme souffrante
entonnerait des hymnes triomphantes.

Les mots que j’ai si grande envie
de te dire, j’en ai trop peur :
que sans ta présence, ma vie
n’est qu’une suite de malheurs —
si tu m’aimais… Hélas, mon espoir est trompeur !

Si tu m’aimais… lors ce serait
la fin de mes larmes affreuses
et de tous mes tourments secrets.
Mon indécision insidieuse
n’oserait plus montrer sa figure menteuse.

Toute une foule de divines
visions envahirait mon coeur.
Ma vie, ce buisson plein d’épines,
déborderait soudain de fleurs —
si tu m’aimais… Hélas, mon espoir est trompeur !

(Constantin Cavàfis)

 

Recueil: Tous les poèmes
Traduction: Michel Volkovitch
Editions: Le miel des Anges

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Console-toi (Joseph von Eichendorff)

Posted by arbrealettres sur 21 mars 2018



Illustration
    
Console-toi

quand tous les oiseaux se taisent
dans l’été accablant
alouette on te voit prendre encore
la direction du ciel

quand tous les arbres renoncent
que les couleurs sont défraîchies
ô sapin tes cimes vertes
percent ce désert

pour cette raison tiens bon
le monde est malade mais toi tu entonnes
déjà le printemps
il fait des miracles le son exact

***

Trost

Wenn schon aile Vögel schweigen
In des Sommers schwülem Drang,
Sieht man, Lerche, dich noch steigen
Himmelwärts mit frischem Klang.

Wenn die Bäume all’ verzagen
Und die Farben rings verglühn’
Tannbaum ! deine Kronen ragen
Aus der Ode ewiggrün.

Darum halt nur fist die Treue !
Wird die Welt auch alt und bang :
Brich den Frühling an aufi neue,
Wunder tut ein rechter Kiang !

(Joseph von Eichendorff)

 

Recueil: Poèmes de l’étrange départ
Traduction: Philippe Marty
Editions: Grèges

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Les amis (Julio Cortázar)

Posted by arbrealettres sur 12 février 2018




Illustration: Viktor Oliva

    
Les amis

Dans le tabac, le café ou l’alcool,
au bord de la nuit ils se redressent
comme ces voix lointaines qui entonnent
une mélodie inconnue sur le chemin.

Comme s’ils étaient des frères du destin,
les ombres pâles des dioscures chassent
les mouches des habitudes et me maintiennent
à la surface d’un tourbillon constant.

Les morts aiment parler mais à l’oreille,
et les vivants sont une main et un toit
qui totalisent le gain et la perte.

Ainsi, un jour, dans la barque de l’ombre,
l’absence de ma poitrine sera habitée
par l’ancienne tendresse qui les nomme.

(Julio Cortázar)

 

Recueil: Crépuscule d’automne
Traduction: Silvia Baron Supervielle
Editions: José Corti

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FOSSOYEUR D’AUBES (Andrée Chedid)

Posted by arbrealettres sur 3 janvier 2018



Illustration
    
FOSSOYEUR D’AUBES

Aucune gerbe ne relie
L’homme à ses fondements
Aucune colonne n’étaye
La vie qui décline

Fossoyeur d’aubes et d’horizons
Nous pataugeons dans l’éphémère
Des feux de paille nous aveuglent
L’existence nous a égarés

L’alouette pourtant
Entonne son hymne

Au centre des fourrés
Survient l’amour.

(Andrée Chedid)

 

Recueil: Par-delà les mots
Traduction:
Editions: Flammarion

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Sur une berge verte (Alexandre Blok)

Posted by arbrealettres sur 11 décembre 2017




    
Sur une berge verte, une petite tombe :
C’était l’Annonciation. On entonnait un psaume.
Des prêtres souriants, en blanc, mettaient en terre
Une petite fille dans sa robe bleu ciel.

Et tous — secourus par la Volonté Suprême —
A l’ombre du Dieu Souverain rayonnaient,
Et l’encens doucement s’échappait vers le ciel :
Mais on eût dit qu’il montait depuis la terre verte.

(Alexandre Blok)

 

Recueil: Le Monde terrible
Traduction:Pierre Léon
Editions: Gallimard

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