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Posts Tagged ‘étreinte’

J’ai la fureur d’aimer (Paul Verlaine)

Posted by arbrealettres sur 21 mai 2023




    
J’ai la fureur d’aimer

J’ai la fureur d’aimer. Mon cœur si faible est fou.
N’importe quand, n’importe quel et n’importe où,
Qu’un éclair de beauté, de vertu, de vaillance
Luise, il s’y précipite, il y vole, il s’y lance,

Et, le temps d’une étreinte, il embrasse cent fois
L’être ou l’objet qu’il a poursuivi de son choix;
Puis, quand l’illusion a replié son aile,
Il revient triste et seul bien souvent, mais fidèle,

Et laissant aux ingrats quelque chose de lui,
Sang ou chair. Mais, sans plus mourir dans son ennui,
Il embarque aussitôt pour l’île des Chimères
Et n’en apporte rien que des larmes amères

Qu’il savoure, et d’affreux désespoirs d’un instant,
Puis rembarque. – Il est brusque et volontaire tant
Qu’en ses courses dans les infinis il arrive,
Navigateur têtu, qu’il va droit à la rive,

Sans plus s’inquiéter que s’il n’existait pas
De l’écueil proche qui met son esquif à bas.
Mais lui, fait de l’écueil un tremplin et dirige
Sa nage vers le bord. L’y voilà. Le prodige

Serait qu’il n’eût pas fait avidement le tour,
Du matin jusqu’au soir et du soir jusqu’au jour,
Et le tour et le tour encor du promontoire,
Et rien ! Pas d’arbres ni d’herbes, pas d’eau pour boire,

La faim, la soif, et les yeux brûlés du soleil,
Et nul vestige humain, et pas un cœur pareil !
Non pas à lui, – jamais il n’aura son semblable –
Mais un cœur d’homme, un cœur vivant, un cœur palpable,

Fût-il faux, fût-il lâche, un cœur ! quoi, pas un cœur !
Il attendra, sans rien perdre de sa vigueur
Que la fièvre soutient et l’amour encourage,
Qu’un bateau montre un bout de mât dans ce parage,

Et fera des signaux qui seront aperçus,
Tel il raisonne. Et puis fiez-vous là-dessus ! –
Un jour il restera non vu, l’étrange apôtre.
Mais que lui fait la mort, sinon celle d’un autre ?

Ah, ses morts ! Ah, ses morts, mais il est plus mort qu’eux !
Quelque fibre toujours de son esprit fougueux
Vit dans leur fosse et puise une tristesse douce;
Il les aime comme un oiseau son nid de mousse;

Leur mémoire est son cher oreiller, il y dort,
Il rêve d’eux, les voit, cause avec et n’en sort
Plein d’eux que pour encor quelque effrayante affaire.
J’ai la fureur d’aimer. Qu’y faire ? Ah, laisser faire!

(Paul Verlaine)

Recueil: Poésies Verlaine
Editions: Hachette

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Cette envie de ne plus rien faire (Michel Houellebecq)

Posted by arbrealettres sur 21 avril 2023




    
Cette envie de ne plus rien faire et surtout ne plus rien éprouver,
Ce besoin subit de se taire et de se détacher
Au jardin du Luxembourg, si calme
Être un vieux sénateur vieillissant sous ses palmes

Et plus rien du tout, ni les enfants, ni leurs bateaux, ni surtout la musique
Ne viendrait troubler cette méditation désenchantée et presque ataraxique ;
Ni l’amour surtout, ni la crainte.
Ah ! n’avoir aucun souvenir des étreintes.

(Michel Houellebecq)

Recueil: Non réconcilié
Editions: Gallimard

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L’étreinte (Patricia Castex Menier)

Posted by arbrealettres sur 21 mars 2023



L’étreinte

Chaque fois, levée très claire de vent.
L’étreinte connaît ce qui demeure de la tempête,
ce bruit de forêt en un seul arbre.

(Patricia Castex Menier)

 

 

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CES TROIS POMMES DERNIERES (Jean Follain)

Posted by arbrealettres sur 10 mars 2023




CES TROIS POMMES DERNIERES

Un homme dit dans la boutique
ces trois pommes dernières
je les prends
on les lui pèse et vend.
Une femme qui les eût voulues dit :
il y a toujours quelqu’un pour acheter ce qui reste
or le pâle acquéreur
qui connaissait peu d’étreintes amoureuses
ce soir tenant les fruits en main
s’en fut droit vers sa mort.

(Jean Follain)

Illustration

 

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ÉTREINTES (Mâgha)

Posted by arbrealettres sur 25 janvier 2023



Maria Amaral
    
ÉTREINTES

Embrassée par son bien-aimé,
on eût dit qu’elle eût envie d’entrer chez lui
jusqu’au milieu du coeur : peut-être, en vérité !
Ne savait-elle pas qu’en lui-même
il lui réservait une demeure perpétuelle.

Rempli des eaux de l’amour,
le corps de la femme portait sans doute en soi une source,
car dans les bras de son amant qui l’étreignait avec vigueur,
l’eau, ayant d’abord mouillé sa robe, en tombait comme une pluie.

(Mâgha) (VIIe siècle)

Recueil: Un feu au coeur du vent Trésor de la poésie indienne Des Védas au XXIème siècle
Traduction:
Editions: Gallimard

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La terre les porte (Jean Follain)

Posted by arbrealettres sur 29 octobre 2022


L’abrupt des consciences
tout le jeu des atomes
les yeux du pain
ceux de la pierre face au silence
l’étreinte des mains de chair et d’os
les aréoles de seins
d’une fille qui s’isole au bord de la mer
la terre les porte.

(Jean Follain)

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Matin vert (Georges-Emmanuel Clancier)

Posted by arbrealettres sur 23 septembre 2022



Matin vert

Qui vive parmi les écureuils de l’automne?
Vif-argent du corps, oriflamme ou feuillage,
Le souvenir de l’amour à l’avenir se confond.
Qui cherchez-vous? Quel être ou quel espace apaisé
De paysage en pays, de regards en étreintes?
Est-ce le fleuve ou les années à l’horizon?
Le monde est vieux mais sa lumière vient de naître
Comme naît dans la chair, dans le souffle et l’image
Un désir où l’aimée ressemble au matin vert.

(Georges-Emmanuel Clancier)

 

 

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LE CANTIQUE DES CANTIQUES (Jacques Rabemananjara)

Posted by arbrealettres sur 22 juillet 2022




LE CANTIQUE DES CANTIQUES

I

Nos destins vont franchir les termes des promesses.
Ils s’en iront, parmi les rondes des amours,
Annoncer le lever de nos astres qui naissent,
Fêter l’aurore unique et chanter tour à tour
et ta grâce et ta tresse.

Ma Bien-aimée, à toi ma vie, à toi mon coeur !
Par quel signe, quel mot te traduire ma flamme.
Pas un seul verbe humain, pas même tous mes pleurs
Ne sauraient exprimer les élans de mon âme
et toutes ses langueurs.

II

Nous voici parvenus au tournant de la voie.
Et, la main dans la main, vers un monde nouveau,
Nous allons parsemer la route de nos joies
Et dénouer du Sort l’énigme et l’écheveau
fait d’ardeur et de soie.

Sur la pente du ciel où l’Amour nous sourit,
L’Avenir, fraternel, escorte l’Espérance.
D’un geste tu m’auras de mes peines guéri ;
Et nous glorifierons, tous deux, d’un même cri,
l’heureuse délivrance.

Quel charme à notre ivresse ajoutera l’azur ?
La nuit multipliera l’éclat de ses étoiles.
Mais j’attends le signal où l’instant le plus pur
M’attachera captif à l’ombre de ton voile :
Tout est prêt ! Tout est mûr !

II

O Bien-Aimée, à nous la coupe des délices !
Nos voeux ont prospéré. Nos désirs sont comblés.
Pour consacrer l’aveu le temps se fait complice
Et je sens tout le ciel à mes genoux trembler
d’émois sans artifice…

L’étreinte de tes bras formera l’horizon.
Tout l’Univers, ce soir, d’un bout à l’autre pôle,
Viendra nous accueillir au seuil de la maison.
Le poids de mon bonheur chargera ton épaule
de jours en floraison.

(Jacques Rabemananjara)

Illustration: Marc Chagall

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Démunie (Claire Goll)

Posted by arbrealettres sur 4 juillet 2022



Illustration: Grégoire Mathieu
    

Démunie

Pourquoi n’ai-je pas conservé
Tes sourires précieux
Et préservé l’ombre
Que tu jetais sur nos routes ?

Pourquoi n’ai-je pas mis de côté
Tes regards d’ambre et d’or,
Fortune fabuleuse pour plus tard
Quand je serai à court de tendresse ?

J’ai gaspillé tes caresses
Je n’ai aucun disque de tes pas
L’orage a éparpillé tes étreintes
Et détruit les silos remplis de baisers.
Le dernier son de ta voix
S’est perdu dans le sable
Et je dessine en vain ton profil
Dans le givre de ma fenêtre.

(Claire Goll)

 

Recueil: Poésie au féminin
Traduction:
Editions: Folio

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Sapphô (Sébastien-Charles Leconte)

Posted by arbrealettres sur 9 mai 2022



Illustration: John William Godward 
    
Sapphô

L’insomnie a brûlé mes douloureuses veines,
Et, dans la cruauté de ces étreintes vaines,
Tu ne devines pas, doux maître de mes sens,
Que vers toi, dans ce corps que l’amante te livre,
Quand ma forme t’enivre,
Mon immortalité fume comme un encens.

(Sébastien-Charles Leconte)

 

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