Posted by arbrealettres sur 5 février 2020

LA GRANDE MIGRATION
À perte de nuit la nuit froide et claire
On entend caqueter très haut un long vol d’oies sauvages
en figure de proue (la tribu navigue en forme de V
et les vieux jars expérimentés se relaient
pour ouvrir la route du vol en éperon)
Malgré la transparence obscure de l’espace
on ne voit pas la flottille bruissante d’ailes
qui tient son cap patient vers le lointain sud
mais seulement les feux de position
des autres grandes migratrices au-dessus de nous
les silencieuses les très froides les étoiles de la Galaxie
qui dérivent inexorablement dans l’Univers en expansion
Et toi et moi nous deux ensemble
à cet instant où nous nous croyons immobiles
nous faisons pourtant route nous aussi nous migrons
Vers quelle saison ? Vers quel rivage ? Vers quel silence ?
(Claude Roy)
Recueil: Claude Roy un poète
Traduction:
Editions: Gallimard Jeunesse
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Posted in poésie | Tagué: (Claude Roy), aile, au-dessus, éperon, étoile, bruire, cap, caqueter, clair, dériver, ensemble, entendre, espace, expansion, expérimenté, figure, flottille, froid, galaxie, immobile, inexorable, jars, lointain, migrateur, migration, naviguer, nuit, obscur, oie, ouvrir, patient, proue, rivage, route, saison, sauvage, se relayer, silence, silencieux, sud, transparence, tribu, vieux, vol | Leave a Comment »
Posted by arbrealettres sur 26 décembre 2019
La vieille mourante
Coffrée dans ton lit-cage
Livrée aux mécaniques
Vieille ô si vieille
La mort hésite à t’accueillir
Tête burlesque
Sous les vrilles des cheveux blancs
Un sirocco de rousseurs ensable ta peau
Des rides rapiècent tes joues
Ta bouche n’est qu’un puits
Tu happes l’air
Ton coeur perd substance
Ton horizon se détisse
Ta chair t’engloutit
Vieille ô si vieille
Où sont ceux qui t’aimaient ?
Ta route fut trop longue
La mort les a surpris
La vie les a rongés
Une main est pourtant là
Qui recouvre la tienne
Son toucher traverse
Tes brumes d’agonie
Une voix t’accompagne
Vers le lieu sans âge
Que le temps n’assiège plus
Laisse tomber tes défroques
Quitte en douceur l’enclos
Va à perte de vue
Rejoins l’ultime flottille
Qui cingle vers l’inconnu.
(Andrée Chedid)
Illustration: Ron Mueck
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Posted in méditations, poésie | Tagué: (Andrée Chédid), accueillir, agonie, assiéger, bouche, cingler, défroque, douceur, enclos, ensabler, flottille, happer, horizon, inconnu, lit-cage, main, mort, mourante, puits, rousseur, sirocco, substance, toucher, traverser, vieille | 2 Comments »