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Poésie

Posts Tagged ‘foudroyé’

Chant du dernier délai (Paul Eluard)

Posted by arbrealettres sur 14 juillet 2021



 

Alena Plihal - Tutt'Art@ (17) [1280x768]

Chant du dernier délai

Noir c’est mon nom quand je m’éveille
Noir le singe qui me tracasse
Qui grimace moule à manies
Devant le miroir de ma nuit
Noir c’est mon poids de déraison
C’est ma moitié froide pourrie

Noir où la flèche s’est plantée
Où le tison a prospéré
Noir le gentil corps foudroyé
Noir le coeur pur de mon amour
Noire la rage aux cheveux blancs
A la bouche basse et baveuse

Cette envie folle de hurler
Ne cessera qu’avec ma voix
Que sur les charmes de ma tombe
Où viendront pleurer mes complices
Tous ceux qui m’approuvaient d’aimer
Et qui voudraient fêter mon deuil

J’étais construit les mains ensemble
Doublé de deux mains dans les miennes
J’étais construit avec deux yeux
Qui se chargeaient des miens pour voir
Mais aujourd’hui je sens mes os
Se fendre sous le froid parfait

Je sens le monde disparaître
Rien ne demeure de nos rires
Ni de nos nuits ni de nos rêves
Et la rosée est charbonneuse
J’ai trop pleuré la coque est vide
Où ne nous pouvions qu’être deux

Écartez-vous de ma douleur
Elle vient droit de la poussière
Elle nie tous les sacrifices
La mort n’est jamais vertueuse
Écartez-vous si vous avez
Envie de vivre sans mourir

Sous vos paupières desséchées
Et dans la boue de vos désirs
Noir un zéro s’arrondirait
Zéro petit et très immense
Qui est capable de gagner
La souveraine part de l’homme

Noir c’est moi seul soyez plus clairs

(Paul Eluard)

Illustration: Alena Plihal

 

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Eux, au regard incertain (Bernard Montini)

Posted by arbrealettres sur 22 janvier 2021


Lunginovic


Eux, au regard incertain, à peine sortis
de l’ombre et déjà foudroyés.
On les croise en silence;
on fait semblant de parler du temps,
en laçant des souliers qui n’existent pas.
On souhaiterait tellement
un miracle dans la seconde.

(Bernard Montini)


Illustration: Tamara Lunginovic

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La main touche une jupe (Alain Borne)

Posted by arbrealettres sur 1 mai 2020




    

La main touche une jupe,
muguets fanés, je me souviens
tiède comme un début de peau,
un feu de sang brûle les os.

Les joncs craquent sous le corps souple,
et le miel bout dans l’oeillet pourpre,
sur le brasier de myositis
là-haut où les oiseaux s’étirent.

Carrière de braise rouge,
près d’une eau non doublée de tain,
où toute pudeur expire
au vent venu de si loin.

Sous août bruissant, la fièvre est fraîche,
et la brûlure encore glacée
des lèvres fanées de soif,
et du corps torride de sang.

Voici la baie de tes jambes
avant cette île foudroyée
où peut-être un peu de neige
attend ma tête sans pensée.

(Alain Borne)

 

Recueil: Oeuvres poétiques complètes
Traduction:
Editions: Curandera

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Entre (François Cheng)

Posted by arbrealettres sur 31 janvier 2020


oie-sauvage

Entre

Le nuage
et l’éclair

Rien

Sinon le trait
de l’oie sauvage

Sinon le passage
Du corps foudroyé
au royaume des échos

Entre

(François Cheng)

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AU NET (Jean Mambrino)

Posted by arbrealettres sur 7 novembre 2019



AU NET

Dans l’ombre de la montagne
sous les sapins foudroyés
ce mamelon d’aiguilles roses
grouille du lent tourbillon
des fourmis-hiéroglyphes
qui entrelacent et brouillent
un dessin dicté.

(Jean Mambrino)

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L’automne de l’enfance est à jamais perdu (Jean-Claude Pirotte)

Posted by arbrealettres sur 13 février 2019



l’automne de l’enfance
est à jamais perdu
dans un un fouillis d’images
de linges déchirés
et d’arbres foudroyés

les cauchemars nous guident
par des sentes obscures
si nous levons les yeux
la foudre nous aveugle

(Jean-Claude Pirotte)

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LE GRAND VIDE (Norge)

Posted by arbrealettres sur 15 octobre 2018



LE GRAND VIDE

Un pas de plus et l’orage allait lui mordre les doigts.
il le fit, ce pas, il en fit deux.
il entra même tout entier dans la gueule du tonnerre.
Un grand vide. Pas brûlé, pas foudroyé.
Non, mais un grand vide.
Un grand vide charmeur qu’il ne voulut plus jamais quitter.

(Norge)

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Nous marchons sur le pelage du monde (Katell Antoine)

Posted by arbrealettres sur 23 septembre 2018



Nous marchons sur
le pelage du monde:
feuilles de cuir,
peaux mélangées,
fourrures des écorces…
Le bel animal foudroyé
d’une seule saison:
l’automne.

(Katell Antoine)

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Je te comprends (Balbino)

Posted by arbrealettres sur 23 août 2018


 


 

Ana Cruz 507_2

Je te comprends

Je te comprends
quand tu lis dans mon dos
des B.D.
masochistes
pendant que moi j’écris
de quoi remplir ma nuit
d’une paix
relative.
Je te comprends
avec tes mots croisés
ma définition
reste à perdre…
Je te comprends
quand
la nuit a vrillé
et que mes mains se crispent
comme celles
d’un
foudroyé.
Je te comprends
quand tes urgences crient
sous l’assaut
de patients
ivres morts.
Je te comprends
car nous parlons
un dialecte
une langue secrète
naufragée…

(Balbino)

Illustration: Ana Cruz

 

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AU BORD DU QUAI (Émile Verhaeren)

Posted by arbrealettres sur 21 août 2018



AU BORD DU QUAI

En un pays de canaux et de landes,
Mains tranquilles et gestes lents,
Habits de laine et sabots blancs,
Parmi des gens mi-somnolents,
Dites, vivre là-bas, en de claires Zélandes !

Vers des couchants en or broyé,
Vers des caps clairs mais foudroyés,
Depuis des ans, j’ai navigué.

Dites, vivre là-bas,
Au bord d’un quai piqué de mâts

Et de poteaux, mirés dans l’eau ;
Promeneur vieux de tant de pas,
Promeneur las.

Vers des espoirs soudain anéantis,
L’orgueil au vent, je suis parti.

La bonne ville, avec ses maisons coites,
Carreaux étroits, portes étroites,
Pignons luisants de goudron noir,
Où le beffroi, de l’aube au soir,
Tricote,
Maille à maille, de pauvres notes.

J’ai visité de lointains fleuves,
Tristes et grands, comme des veuves.

Serait-il calme et frais mon coin,
Qu’une vieille servante, avec grand soin,
Tiendrait propre, comme un dimanche.
Contre le mur d’une chambre blanche,
Une carte pendrait des îles Baléares,
Avec, en or, des rinceaux rares
Et des drapeaux épiscopaux ;
Et sur l’armoire, la merveille

— Petits bâtons, minces ficelles —
D’une fragile caravelle
Qui voguerait, voiles au clair,
Dans la panse d’une bouteille.

J’ai parcouru, sous des minuits de verre,
Des courants forts qui font le tour de la terre.

Au cabaret, près du canal.
Le soir, à l’heure réglementaire,
Je m’assoierais, quand le fanal,
Au front des ponts,
Darde son œil, comme une pierre verte.
J’entreverrais, par la fenêtre ouverte,
Dormir les chalands bruns, les barques brunes,
Dans leur grand bain de clair de lune
Et le quai bleu et ses arbres lourds de feuillée,
Au fond de l’eau, fuir en vallée,
En cette heure d’immobilité d’or,
Où rien ne bouge, au fond du port,
Sauf une voile mal carguée,
Qui doucement remue encor,
Au moindre vent qui vient de mer.

La mer ! la mer !

La mer tragique et incertaine,
Où j’ai traîné toutes mes peines !

Depuis des ans, elle m’est celle,
Par qui je vis et je respire,
Si bellement, qu’elle ensorcelle
Toute mon âme, avec son rire
Et sa colère et ses sanglots de flots ;
Dites, pourrais-je un jour,
En ce port calme, au fond d’un bourg,
Quoique dispos et clair,
Me passer d’elle ?

La mer ! la mer !

Elle est le rêve et le frisson
Dont j’ai senti vivre mon front.
Elle est l’orgueil qui fit ma tête
Comme de fer, dans la tempête.
Ma peau, mes mains et mes cheveux
Sentent la mer
Et sa couleur est dans mes yeux ;
Et c’est la houle et le jusant
Qui sont le rythme de mon sang !

En des lointains de Finistères
J’ai labouré les mers,
Selon l’éclair et le tonnerre.

Au cassement de soufre et d’or
Des cieux d’ébène et de portor,
J’ai regardé s’ouvrir la nuit
Si loin dans l’ombre et l’inconnu,
Que mon désir n’est point encor
Jusqu’aujourd’hui,
Du bout du monde, revenu.

Chaque coup d’heure au cœur du temps,
Chaque automne, chaque printemps,
Me rappellent des paysages
Plus beaux que ceux que mes yeux voient ;
Golfes, pays et cieux, en mon âme, tournoient
Et mon âme elle même, avec l’humanité,
Autour de Dieu, depuis l’éternité,
À travers temps, semble en voyage :
J’ai dans mon cœur l’orgueil et la misère,
Qui sont les pôles de la terre.

Et qu’importe d’où sont venus ceux qui s’en vont,
S’ils entendent toujours l’appel profond

Au carrefour des doutes !
Mon corps est lourd, mon corps est las,
Je veux rester, je ne peux pas ;
L’âpre univers est un tissu de routes
Tramé de vent et de lumière ;
Mieux vaut partir, sans aboutir,
Que de s’asseoir, même vainqueur, le soir,
Devant son œuvre coutumière,
Avec, en un cœur morne, une vie
Qui cesse de bondir au delà de la vie !

Dites, la mer au loin que prolonge la mer ;
Et le suprême et merveilleux voyage,
Vers on ne sait quel charme ou quel mirage,
Se déplaçant, au cours des temps ;
Dites, les signaux clairs des beaux vaisseaux partant
Et le soleil qui brûle et qui déjà déchire
Sa gloire en or, sur l’avant fou de mon navire !

(Émile Verhaeren)

Illustration: Vladimir Kush

 

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