Parmi les vains chemins de cendres et de sable
Et les fauves soleils à l’éclat meurtrier,
Nous avons marché vers toi, Porte redoutable,
Qui fermes l’horizon de tes battants d’acier.
Ton métal flamboyait, tel le glaive de l’ange;
Emportant en nos coeurs l’espoir comme un bleuet,
Nous allions fascinés par ta splendeur étrange
Dans la dure clarté qui nous exténuait
Et plus nous approchions, plus tu semblais géante,
Assujettie au roc, faite d’éternité,
Reflétant les couchants à ta face sanglante,
Incarnant du Destin l’impassibilité.
Aujourd’hui nous voici les doigts à tes ferrures
Et les pieds à ton seuil hérissé de chardons,
Essayant vainement nos clefs à tes serrures,
Attaquant du ciseau tes impeccables gonds;
Nous voici, suppliants que navre ton obstacle,
Sur la rouge colline au sol d’aridité,
Ebranlant ton silence, espérant le miracle
Que depuis sa naissance attend l’humanité.
Nos gestes sont dolents, nos poitrines creusées
Pour avoir trop heurté l’airain de ton vantail
Où la chair de nos mains saignantes s’est lassée
Au cours d’un inutile et décevant travail.
De lents éplorements, des pleurs, des bras en rêve
Des groupes sous la toge et d’autres sous le froc…
Un incessant effort vers toi qui se soulève,
S’effondre en t’abordant, porte scellée au roc…
Tandis que, dominant la foule, oiseau de proie
Guettant quel Prométhée en ses ongles saisir,
Parmi le ciel brûlant obscurément tournoie,
Tel l’antique vautour, l’immuable Dèsir!
Danse, ô mon coeur !
Aujourd’hui danse bondis de joie.
Les accents de l’amour emplissent les Jours et les nuits de musique
et l’univers prête l’oreille, ô mélodies !
Ivres de joie, la vie et la mort dansent au rythme de cette symphonie.
Les collines dansent et la terre et les flots.
Le monde de l’homme danse parmi le rire et les pleurs.
Pourquoi revêtir le froc du moine ?
Pourquoi vis-tu retiré du monde
dans l’orgueil de ta solitude ?
Voici mon coeur qui danse dans les délices de cent arts;
et le Créateur applaudit.
***
Dance, my heart! dance to-day with joy.
The strains of love fill the days and the nights with music
, and the world is listening to its melodies !
Mad with joy, life and death dance to the rhythm of this music.
The hills and the sea and the earth dance.
The world of man dances in laughter and tears;
Why put on the robe of the monk,
and live aloof from the world
in lonely pride ?
Behold ! my heart dances in the delight of a hundred arts;
and the Creator is well pleased.