La femme qui regarde par la fenêtre
souhaite jouer avec les enfants et les faire danser
Elle souhaite chanter pour eux
leur acheter des bonbons
et des gâteaux pleins de crème à la vanille
La femme qui regarde par la fenêtre
souhaite
faire tomber sur les enfants
un déluge de joie
et des papillons de baisers
planter des poèmes
sur leur chemin
pour qu’ils ne se perdent pas
dans la forêt
du monde.
*
La femme qui regarde par la fenêtre
a envie d’avoir une baguette magique
pour effacer le gris
et redessiner des sourires
Elle est si heureuse
quand elle voit les lieux pleins de vie
les boutiques
les terrasses de café
remplies de gens
Elle se réjouit quand elle voit des visages lumineux
Étudie bien, ma fille,
ton pays a besoin de celui qui va le construire.
Tu as besoin de café?
De thé?
Tu vas réussir, je suis sûre
tu vas avoir ton diplôme
combien je serai heureuse
je vais te faire une grande fête.
Oui… ingénieur… c’est un beau métier…
Elle est partie au sein de l’université
chargée de stylos et de rêves.
Une de ses chaussures
est revenue dans les mains de sa mère.
(Maram al-Masri)
Recueil: Elle va nue la liberté
Editions: Bruno Doucey
Resté comme un vivant témoin
Tout embelli par ton Grand Age
Des lointains jours, de leur rouage
J’aime de toi prendre grand soin.
Tu me parles de mon enfance,
Du visage de mes parents,
De la plus heureuse jouvence
De mes frères et soeur courant
Ouvrir tes portes de vieux chêne
Sur le gros pain bis de chez nous
Et plus pour la fête prochaine
Mon coeur ravi, vois, à genoux,
Ceux qui t’aimaient si fortement !
Ton bois devient leur âme enclose
Que je savoure saintement.
Nul bonheur ne peut me toucher
Tout a fui par ton absence
Une fleur vient m’effaroucher
L’oiseau chante ma réticence.
Nul bonheur ne m’aide à revivre
Ton silence est un poids cruel
Si lourd à mon âme en duel…
Car sur la terre il me faut vivre…
Nul bonheur ne m’a plus comblée
Le jardin me parait désert
Dans sa blessure, l’exilée
N’entend que son morne concert.
Nul bonheur ne franchit ma porte
Le silence frappe mon coeur
Seule ma peine n’est point morte
Heureux qui ne sent sa rigueur.
Sais-tu qu’il faut aimer pour devenir heureux ?
C’est la loi de la vie on ne peut la trahir
Sans se blesser soi-même et parfois se haïr
Heureuse condition pour le coeur généreux.
Tu n’as jamais médit. Surtout n’y songe pas
Reste bien grand de paix et fais chanter ta lyre
Au-dessus du pardon comme l’amour délire
C’est la belle prière à faire encor tout bas.
Il te faut donc aimer au grand jeu du destin
Le soleil et les fleurs, le prix de la souffrance
Alors t’apparaîtra celui de l’espérance
Plus grand que la douleur lumineux et certain.
Puisque tu crois au ciel il faut lever les yeux
Ne fais jamais douter ton cœur de sa puissance
Prends ce chemin qui monte et console joyeux
Toutes choses, un jour perdent leur suffisance.
Il te faut donc aimer au fort de l’aquilon
Et même plus encor comme au jour le plus long
Dieu peut-il oublier et le roseau qui tremble
Et l’amour qui se donne à lui et marche d’amble.
La vie est un mystère où les soucis abondent
Plus encor que les joies. Mais, du moindre bonheur
Ou d’un insigne espoir en faire le meilleur…
Vont apparaître alors les heures qui fécondent
«L’art de se rendre heureux comme une simple fleur»
Qui s’offre à tous les vents, de son nectar parsème
D’effluves l’alentour et met sur la douleur
D’un pauvre vagabond ou souriant bohème
Ce magnifique don ; faire de son chemin
Quelque trêve d’amour plus lumineuse encore
Que le scintillement s’élevant de l’aurore
«Réjouir aujourd’hui toujours plus que demain.»
Qu’on me laisse partir à présent
Je pèserais si peu sur les eaux
J’emporterais si peu de chose
Quelques visages le ciel d’été
Une rose ouverte
La rivière est si fraîche
La plaie si brûlante
Qu’on me laisse partir à l’heure incandescente
Quand les bêtes furtives
Gagnent l’ombre des granges
Quand la quenouille
Du jour se fait lente
Je m’étendrais doucement sur les eaux
J’écouterais tomber au fond
Ma tristesse comme une pierre
Tandis que le vent dans les saules
Suspendrait mon chant
Passants ne me retenez pas
plaignez-moi
Car la terre n’a plus de place
pour l’étrange Ophélie
On a scellé sa voix on a brisé le vase
De sa raison
Le monde m’assassine et cependant
Pourquoi faut-il que le jour soit si pur
L’oiseau si transparent
Et que les fleurs
S’ouvrent à chaque aurore plus candides
Ô beauté
Faisons l’adieu rapide
Par la rivière par le fleuve
Qu’on me laisse à présent partir
La mer est proche je respire
Déjà le sel ardent
Des grandes profondeurs
Les yeux ouverts je descendrais au cœur
De la nuit tranquille
Je glisserais entre les arbres de corail
Écartant les amphores bleues
Frôlant la joue
Enfantine des fusaïoles
Car c’est là qu’ils demeurent
Les morts bien-aimés
Leur nourriture c’est le silence la paix
Ils sont amis
Des poissons lumineux des étoiles
Marines ils passent
Doucement d’un siècle à l’autre ils parlent
De Dieu sans fin
Ils sont heureux
Ô ma mémoire brise-toi
Avant d’aller troubler le fond
De l’éternité
Ainsi parle Ophélie
Dans le jardin désert
Et puis se tait toute douleur
La rivière scintille et fuit
Sous les feuilles
Le vent seul
Porte sa plainte vers la mer
(Anne Perrier)
Recueil: Anthologie de la poésie française du XXè siècle
Editions: Gallimard
Tourne la vie des gens sur le périphérique
Il faut remonter souvent ces souris mécaniques
Heureusement qu’ils nous passent
Clic un peu d’musique une chanson d’Jonasz
C’est comme un pansement sur le coeur qu’on a
Cet homme qui pleure sa vie on s’dit tiens y’a pas qu’moi
C’est l’âme à l’âme qui colle
Ces Jonasz paroles
Y’a l’monde à changer mais par où commencer
Y’a Flore qui pleure et Rose qui voudrait s’en aller
Y’a les yeux d’la terre qui piquent
Dans cette Jonasz musique
Funky blues Rimbaud
Tout c’qu’y dit c’est beau
Dans l’coeur ce grand vent
Tellement émouvant
Quelle chanson fiévreuse
Dit cette face de lune chanteuse
Tourne la vie des gens
Y faut remonter souvent
Heureusement qu’ils nous passent
Une chanson d’Jonasz
Chanson d’Jonasz
(Alain Souchon)(Laurent Voulzy)
Recueil: Des chansons pour le dire Une anthologie de la chanson qui trouble et qui dérange (Baptiste Vignol)
Editions: La Mascara TOURNON