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Posts Tagged ‘ingratitude’

Desiderata (Max Ehrmann)

Posted by arbrealettres sur 2 janvier 2019




    
Desiderata

Reste calme au milieu du bruit et de l’impatience
et souviens-toi de la paix qui découle du silence.

Autant que tu le peux, mais sans te renier,
sois en bons termes avec tout le monde.
Dis ce que tu penses, clairement, simplement;
et écoute les autres,
même les sots et les ignorants;
eux aussi ont quelque chose à dire.

Evite les gens grossiers et violents;
ils ne sont que tourments pour l’esprit.

Si tu te compares aux autres,
tu risques de devenir vaniteux ou amer,
il y aura toujours quelqu’un de plus grand ou de plus petit que toi.
Sois fier de ce que tu as fait et de ce que tu veux faire.
Aime ton métier, même s’il est humble;
c’est un bien précieux en notre époque trouble.

Sois prudent dans tes affaires,
car on pourrait te jouer de vilains tours.
Mais que ceci ne te rende pas aveugle à ce qu’il y a de beau;
bien des gens luttent pour un idéal et,
partout sur la Terre, on fait preuve de courage.

Sois toi-même, surtout dans tes affections.
Fuis par-dessus tout le cynisme en amour,
car il persiste même après avoir desséché ton cœur et désenchanté ton âme.

Permets-toi de t’enrichir de l’expérience des ans,
te défaisant progressivement de tes puérilités.
Affermis-toi pour faire face aux malheurs de la vie.
Mais ne te détruis pas par une imagination maladive;
bien des peurs prennent naissance dans la fatigue et la solitude.

Malgré la saine discipline qui s’impose,
sois bon envers toi-même.
Tu es un enfant de l’univers,
tout comme les arbres et les étoiles:
tu as le droit d’être ici.
Et même si cela n’est pas clair en toi,
sois assuré que tout se passe dans l’univers selon ses règles propres.

Par conséquent, sois en paix avec ton Dieu,
quelle que soit en toi son image.
Et par-delà tes peines et tes aspirations,
au milieu de la confusion de la vie,
sois en paix avec ton âme.

Dis-toi qu’en dépit de ses faussetés, de ses ingratitudes, de ses rêves brisés,
le monde est tout de même merveilleux.
Répands la bonne humeur. Et tâche d’être heureux.

***

Desiderata

Go placidly amid the noise and haste,
and remember what peace there may be in silence.
As far as possible without surrender
be on good terms with all persons.
Speak your truth quietly and clearly;
and listen to others,
even the dull and the ignorant;
they too have their story.

Avoid loud and aggressive persons,
they are vexations to the spirit.
If you compare yourself with others,
you may become vain and bitter;
for always there will be greater and lesser persons than yourself.
Enjoy your achievements as well as your plans.

Keep interested in your own career, however humble;
it is a real possession in the changing fortunes of time.
Exercise caution in your business affairs;
for the world is full of trickery.
But let this not blind you to what virtue there is;
many persons strive for high ideals;
and everywhere life is full of heroism.

Be yourself.
Especially, do not feign affection.
Neither be cynical about love;
for in the face of all aridity and disenchantment
it is as perennial as the grass.

Take kindly the counsel of the years,
gracefully surrendering the things of youth.
Nurture strength of spirit to shield you in sudden misfortune.
But do not distress yourself with dark imaginings.
Many fears are born of fatigue and loneliness.
Beyond a wholesome discipline,
be gentle with yourself.

You are a child of the universe,
no less than the trees and the stars;
you have a right to be here.
And whether or not it is clear to you,
no doubt the universe is unfolding as it should.

Therefore be at peace with God,
whatever you conceive Him to be,
and whatever your labors and aspirations,
in the noisy confusion of life keep peace with your soul.

With all its sham, drudgery, and broken dreams,
it is still a beautiful world.
Be cheerful.
Strive to be happy.

(Max Ehrmann)

 

Recueil: Desiderata of Happiness
Traduction: Hubert Claes
Editions:

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CALENDRIER (Philippe Soupault)

Posted by arbrealettres sur 3 août 2018



 

CALENDRIER

La fumée des cigares
la chaleur des maisons
la lumière des océans et des rivières
sont nos chers compagnons
Et pourtant notre ingratitude est sans bornes
comme nos regards comme notre voix
Nous passons avec notre rire
pour mieux voir les bonheurs des dames
et les paradis des enfants
Nous ne savons pas qu’il existe quelque part
une île
un désert
pour les petits
Aujourd’hui et demain
comme deux mains croisées
supportent malgré tout la chaleur des années
Nous pouvons courir
et nous pouvons mourir
la pluie sera pour nous la chère bienvenue
son visage sanglant et ses mains croisées
supportent elles aussi la chaleur des années

(Philippe Soupault)

Illustration

 

 

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ODE DE MES PEINES (Pablo Neruda)

Posted by arbrealettres sur 29 avril 2018



ODE DE MES PEINES

Peut-être que quelqu’un, que quelques-uns
veulent savoir
quelque chose de moi.

Je m’interdis
de parler de mes peines.
Encore jeune, presque vieux
et suivant mon chemin
je ne puis
sans
épines
couronner
mon coeur
qui a tant
travaillé,
mes yeux
qui ont exploré la tristesse
et sont revenus sans pleurs
des embarcations
et des îles.

Je vais vous raconter comment
quand je suis né
les hommes, mes amis,
aimaient
la solitude, l’air
le plus lointain,
et la vague aux sirènes.

Je suis revenu
des
archipels,
je suis revenu des jasmins,
du désert,
pour être,
être,
être,
avec d’autres êtres,
et quand j’ai été,
non pas ombre ni évadé,
un humain, j’ai reçu les chargements
du coeur humain,
les perfides cailloux
de l’envie,
l’ingratitude servile de chaque jour.

Reviens, Monsieur, susurrent
de plus en plus lointaines les sirènes :
elles fouettent l’écume
et coupent de leur queue
argentée
la transparente
mer
des souvenirs.

Nacre et lumière mouillées
comme des fruits jumeaux
à la clarté de la lune enivrante.

Ah! et je ferme les yeux.

Le murmure du ciel dit adieu.
Je vais à ma porte recevoir des épines.

(Pablo Neruda)


Illustration

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Si vous m’aimez (Robert Sabatier)

Posted by arbrealettres sur 12 février 2018




    
Si vous m’aimez

Si vous m’aimez, dites-le à la mer,
au feu dans l’âtre, au vent d’automne,
au ciel futur… Ne me le dites pas.
Vous écoutant, j’aurais l’ingratitude
d’aimer la mer, le vent, le feu de l’âtre…
bien plus que vous, bien plus que vos paroles.

Si je retourne à la terre, aux étoiles,
si je renonce à la vie, à la mort,
aux mots que j’aime, à mes poèmes frères
pour célébrer votre seule présence,
je gravirai la pente jusqu’à vous.

Si vous m’aimez, délivrez-vous de n’être
que ce corps neuf apprivoisant le ciel
pour devenir le rêve de mon rêve.

(Robert Sabatier)

 

Recueil: Oeuvres poétiques complètes
Traduction:
Editions: Albin Michel

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LIES (César Vallejo)

Posted by arbrealettres sur 28 novembre 2016



LIES

Cette après-midi il pleut, comme jamais; et je n’ai pas
envie de vivre, mon petit coeur.

Cette après-midi est douce. Pourquoi ne le serait-elle pas?
Comme une femme, elle s’habille de grâce et de peine.

Cette après-midi il pleut sur Lima. Et je me souviens
des cavernes cruelles de mon ingratitude;
de mon pain de glace sur son pavot,
plus fort que son « Ne sois pas comme ça! »

Mes violentes fleurs noires ; et l’affront
barbare et énorme ; et le trajet glacial.
Et le silence de sa dignité qui mettra
point final avec huiles brûlantes.

C’est pourquoi cette après-midi, je marche comme jamais,
avec ce hibou, avec ce petit coeur.
D’autres après-midi pussent; me voyant si triste,
elles prennent ce petit peu de toi
dans la ride abrupte de ma douleur profonde.

Cette après-midi il pleut, il pleut à verse. Et je n’ai pas
envie de vivre, mon petit coeur.

***

HECES

Esta tarde llueve como nunca; y no
tengo ganas de vivir, corazón.

Esta tarde es dulce. Por qué no ha de ser?
Viste gracia y pena; viste de mujer.

Esta tarde en Lima llueve. Y yo recuerdo
las cavernas crueles de mi ingratitud;
mi bloque de hielo sobre su amapola,
más fuerte que su “No seas así!”

Mis violentas flores negras; y la bárbara
y enorme pedrada; y el trecho glacial.
Y pondrá el silencio de su dignidad
con. óleos quemantes el punto final.

Por eso esta tarde, como nunca, voy
con este búho, con este corazón.

Y otras pasan; y viéndome tan triste,
toman un poquito de ti
en la abrupta arruga de mi hondo dolor.

Esta tarde llueve, llueve mucho. ¡Y no
tengo ganas de vivir, corazón!

(César Vallejo)


 

 

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