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Posts Tagged ‘jaspe’

Jardin d’été (Anna Akhmatova)

Posted by arbrealettres sur 16 septembre 2022




    
Jardin d’été

Je veux aller dans ce jardin,
dans cette roseraie nonpareille
Où l’on voit des clôtures la plus belle,

Où les statues gardent mémoire
de la jeune fille que j’étais
Et moi, je les revois sous l’eau de la Neva.

Dans ce lieu caché, plein d’odeurs,
sous les tilleuls princiers,
Je crois entendre craquer
les mâts des vaisseaux.

Comme autrefois le cygne
traverse les siècles,
En extase devant la beauté de son double.

Par centaines de milliers, des pas
Dorment d’un sommeil de mort,
pas d’ennemis et d’amis,
Pas d’amis et d’ennemis.

Finira-t-il jamais, le cortège des ombres
Qui va du vase de granit
jusqu’à la porte du palais?

Mes nuits blanches là-bas
se parlent, dans un murmure,
De quelqu’un qui savait aimer
secrètement, superbement.

Partout on voit briller la perle et le jaspe,
Mais un mystère dérobe
la source de la lumière.

(Anna Akhmatova)

 

Recueil: L’HORIZON EST EN FEU Cinq poètes russes du XXè siècle
Traduction:
Editions: Gallimard

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Tes murs ne tombent pas (Hilda Doolittle)

Posted by arbrealettres sur 19 janvier 2019



jaspe_corail_01

Hommage aux anges
[2]

Tes murs ne tombent pas, dit-il,
parce que tes murs sont de jaspe ;

mais pas carrée, ai-je pensé,
une autre forme (octaèdre ?)

glissa à la place
réservée par règle et rite

pour les douze fondements,
pour le verre tréluisant,

car elle n’a que faire du soleil
ni de la lune pour luire ;

car la vision comme nous la voyons
ou l’avons vue ou l’avons imaginée

ou autrefois invoquée
ou conjurée ou l’avions conjurée

par un autre a été usurpée ;
j’ai vu la forme

qui aurait pu être de jaspe,
mais elle n’était pas carrée.

***

Your walls do not fall, he said,
because your walls are made of jasper;

but not four-square, I thought,
another shape (octahedron?)

slipped into the place
reserved by rule and rite

for the twelve foundations,
for the transparent glass,

for no need of the sun
nor moon to shine;

for the vision as we see
or have seen or imagined it

or in the past invoked
or conjured up or had conjured

by another, was usurped;
I saw the shape

which might have been of jasper,
but it was not four-square.

(Hilda Doolittle)

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JASPE (Jacques Lacarrière)

Posted by arbrealettres sur 23 août 2018



JASPE

Toi, jailli de l’igné aux vasques des volcans,
dans le froid des cristaux tu as mêlé les règnes.
Et tu es devenu armure des forêts,
gangue irisée des sèves où, gisante,
tu captas la mémoire des arbres.

(Jacques Lacarrière)

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Ni vas spirituale, ni même rosa mystica (Hilda Doolittle)

Posted by arbrealettres sur 11 juin 2018



Hommage aux anges
[42]

D’aucuns nomment cette cloche tellement profonde
Zadkiel, la droiture de Dieu,

il est régent de Jupiter
ou Zeus-pater ou Theus-pater,

Theus, Dieu ; Dieu-le-père, père-dieu
ou l’Ange parrain,

lui-même, paradis et pourtant chez lui dans une étoile
dont la couleur est l’améthyste,

dont la bougie brûle violet-profond
avec les autres.

[43]

Et le point du spectre
où toutes les lumières sont une,

Est blanc et blanc n’est pas non-couleur,
comme on nous l’a appris à l’enfance,

mais toute-couleur ;
où les flammes s’entremêlent

et les ailes se touchent, quand nous atteignons
l’arc de la perfection,

nous sommes satisfaits, nous sommes heureux,
nous recommençons ;

Moi Jean, vis. Je testifie
des plumes arc-en-ciel, de l’étendue des cieux

et des murs de couleur,
des colonnades de jaspe ;

mais quand le joyau
fond dans le creuset

nous ne trouvons ni cendre, ni cendre-de-rose,
ni un haut vase et bâton de lis,

ni vas spirituale,
ni même rosa mystica,

mais un amas d’oeillets mignardise
ou un visage pareil à une rose de Noël.

C’est la floraison de la croix,
c’est la floraison du bois calciné,

où Zadkiel, nous nous figeons pour rendre grâce
d’être une fois encore sortis de la mort et de vivre.

***

Some call that deep-deep bell
Zadkiel, the righteousness of God,

he is regent of Jupiter
or Zeus-pater or Theus-pater,

Theus, God; God-the-father, father-god
or the Angel god-father,

himself, heaven yet at home in a star
whose colour is amethyst,

whose candle burns deep-violet
with the others.

And the point in the spectrum
where all lights become one,

is white and white is not no-colour,
as we were told as children,

but all-colour;
where the flames mingle

and the wings meet, when we gain
the arc of perfection,

we are satisfied, we are happy,
we begin again ;

I John saw. I testify
to rainbow feathers, to the span of heaven

and walls of colour,
the colonnades of jasper;

but when the jewel
melts in the crucible,

we find not ashes, not ash-of-rose,
not a tall vase and astaffof lilies,

not vas spirituale,
not rosa mystica even,

but a cluster of garden-pinks
or a face like a Christmas-rose.

This is the flowering of the rod,
this is the flowering of the burnt-out wood,

where, Zadkiel, we pause to give
thanks that we rise again from death and live.

(Hilda Doolittle)

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Emmène-moi chez moi (Hilda Doolittle)

Posted by arbrealettres sur 3 juillet 2017



jaspe

Les murs ne tombent pas
[23]

Emmène-moi chez moi
où les canaux

coulent
entre des talus d’iris :

où le héron
a son nid:

où la mante religieuse
prie sur le roseau d’eau douce :

où la sauterelle dit
Amen, Amen, Amen.

[24]

Ou bien n’importe où
où les étoiles flambent dans l’air clair,

où nous pourrions saluer individuellement,
Sirius, Vega, Arcturus,

où ces entités distinctes
nous sont intimement liées,

où chacune, avec son attribut particulier,
peut être invoquée

avec la précision d’un charme, d’une formule, d’une prière,
qui révélera indiscutablement,

quelle essence curative ou édifiante
est nécessaire pour quelle maladie particulière

à laquelle est disposée l’âme curieuse :
ô étoiles, petites jarres de ce Guérisseur,

Apothicaire indisputable et absolu,
boîtes ouvrées, à facettes,

ornées de pierres, très précieuses, pour de nouveaux
onguents, de la myrrhe, de l’encens :

jaspe, béryl, saphir
qui, quand nous les attirons plus près

par la prière, les formules,
les litanies, les incantations,

révéleront leur fragrance individuelle,
influence magnétique personnelle,

devenues, comme elles l’étaient auparavant,
des messagers personnifiés,

guérisseurs, aides
du Seul, Amen, Tout-Père.

***

Take me home
where canals

flow
between iris-banks:

where the heron
has her nest:

where the mantis
prays on the river-reed :

where the grasshopper says
Amen, Amen, Amen.

Or anywhere
where stars blaze through clear air,

where we may greet individually,
Sirius, Vega, Arcturus,

where these separate entities
are intimately concerned with us,

where each, with its particular attribute,
may be invoked

with accurate charm, spell, prayer,
which will reveal unquestionably,

whatever healing or inspirational essence
is necessary for whatever particular ill

the inquiring soul is heir to:
O stars, little jars of that indisputable

and absolute Healer, Apothecary,
wrought, faceted, jewelled

boxes, very precious, to hold further
unguent, myrrh,incense:

jasper, beryl, sapphire
that, as we draw them nearer

by prayer, spell,
litany, incantation,

will reveal their individual fragrance,
personal magnetic influence,

become, as they once were,
personified messengers,

healers, helpers
of the One, Amen, All-father.

(Hilda Doolittle)

 

 

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Pierres (Pablo Neruda)

Posted by arbrealettres sur 26 décembre 2016



Il faut parcourir le rivage
du lac Tragosoldo à Antiñana,
très tôt, quand la rosée
tremble dans les feuilles dures du canelo,
et ramasser des pierres mouillées, des raisins
de la rive, des galets
de flamme, de jaspe,
des cailloux violets ou des alvéoles
de roche, perforés
par les volcans ou les intempéries,
par le mufle du vent.

Mais oui, la chrysolite oblongue
ou le basalte d’Éthiopie
ou la carte cyclopéenne
du granite
t’attendent ici, mais nul ne vient
hormis le pêcheur ignoré
tout à sa marchandise palpitante.

Moi seul accours, parfois,
au petit jour,
à ce rendez-vous avec les pierres échouées,
humides, cristallines,
cendrées,
et les mains pleines
d’incendies éteints,
de structures secrètes,
d’amandes transparentes,
je retourne à ma famille,
à mes devoirs,
plus ignorant qu’au temps de ma naissance,
plus simple chaque jour,
chaque pierre.

(Pablo Neruda)


Illustration

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