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FABLE ET LABYRINTHE (Rosario Castellanos)

Posted by arbrealettres sur 12 avril 2023




    
FABLE ET LABYRINTHE

La petite fille ouvrit une porte et se perdit
dans la Tour du Vent
et chemina dans le froid et eut soif
et pleura de peur.
Tour du Vent où chaque cri s’amplifie
interminablement sans rencontrer d’écho.

La petite fille se trouvait dans cette Tour,
dans cette Tour vieille comme mon corps, abandonnée,
seule, en ruine comme mon corps.
Cherche-la dans la Tour, suis-la,
suis les empreintes de son pied menu,
l’odeur de jasmin de ses cheveux
et ses mains qui coulent comme deux ruisseaux
et ses yeux égarés.
Tout ici est bien gardé,
bien caché et prisonnier.
Appelle-la, d’un cri fais s’écrouler le mur,
rends-lui la vie avec ton sang si elle est morte.

Ensuite d’une langue abjecte et triste de chien affamé
j’ai léché son ombre jusqu’à l’effacer
et de mon deuil j’ai insulté le jour
et j’ai traîné mes sanglots sur le sol.
Regarde-moi dans mon coin, les cheveux défaits,
comme un jouet cendreux qui roucoule :
je donne le sein à un petit fantôme
tandis que l’araignée tisse sa toile d’épaisse fumée.
Regarde-moi : j’ai ouvert une porte et je me suis perdue
dans la Tour du Vent.

(Rosario Castellanos)

Recueil: Poésie du Mexique
Traduction: Jean-Clarence Lambert
Editions: Actes Sud

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À l’intérieur de moi (Nawel Ben Kraïem)

Posted by arbrealettres sur 14 mars 2023




    
À l’intérieur de moi

À l’intérieur de moi
Il y a ce coffre ouvert
À l’intérieur de moi
Son parfum me devance
Faux air de vacances
Il y a ce coffre ouvert
À l’intérieur de moi
Son parfum me devance
Faussaire de nos enfances
Un bouquet de ronces
De fleurs et de réponses
Ça sent fort la naissance
Le tambour du jasmin
Qui frappe à toutes nos portes
L’utérus et les tempes
Les soucis les tulipes
Et nos étoiles violentes
Il y a ce coffre ouvert
À l’intérieur de moi
Des jouets de grands
Lourds de conséquences
Le parfum nous devance
Faussaire de nos enfances
Et leurs ambivalences
Il y a ce coffre ouvert
Nos chocs sont abrités
Personne ne les voit
Mais on n’entend que ça
Il y a ce coffre offert
À l’intérieur de moi
Personne ne le voit
Mais on n’entend que ça

(Nawel Ben Kraïem)

Recueil: Frontières Petit atlas poétique
Editions: Bruno Doucey

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Il est seul dans la cour murée (Jean Follain)

Posted by arbrealettres sur 28 octobre 2022




Il est seul dans la cour murée
avec un jouet dont bat
le ressort fatigué
une plume s’envole
qui s’en vient retomber
sur la terre où s’affrontent
les forces de l’amour
celles aussi de la peur

(Jean Follain)

 

 

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Lorsque tout disparaîtra au creux de nos paumes (Gaëlle Josse)

Posted by arbrealettres sur 1 août 2022



Illustration
    
lorsque tout disparaîtra au
creux de nos paumes restera
l’éclat doucement terni d’un
jouet d’enfant

et le souvenir d’une matinée
de soleil

(Gaëlle Josse)

Recueil: et recoudre le soleil
Traduction:
Editions: NOTAB/LIA

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Je suis folle de toi, mon amour (Alda Merini)

Posted by arbrealettres sur 28 juillet 2022



Je suis folle de toi, mon amour
qui viens chercher
dans mon passé
ces jouets cassés de mes paroles.
Je te donne tout
si tu veux,
je ne suis de toute façon qu’une enfant
pleine de poésie
et couverte de larmes salées,
je veux seulement m’endormir
sur la berge du ciel étoilé
et devenir une douce brise
de chansons d’amour pour toi.

***

Sono folle di te, amore
che vieni a rintracciare
nei miei trascorsi
questi giocattoli rotti delle mie parole.
Ti faccio dono di tutto
se vuoi,
tanto io sono solo una fanciulla
piena di poesia
e coperta di lacrime salate,
io voglio solo addormentarmi
sulla ripa del cielo stellato
e diventare un dolce vento
di canti d’amore per te.

***

I’m crazy for you, love
that search out
in my past
these broken toys of my words.
I give you everything
if you want,
so I’m just a girl
full of poetry
and covered with salty tears,
I just want to fall asleep
on the bank of the starry sky
and become a gentle wind
of love chants for you.

(Alda Merini)

Découvert ici: https://schabrieres.wordpress.com/

 

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Maison remplie (Ying Chen)

Posted by arbrealettres sur 12 décembre 2019



    

Ici et là
Les jouets des enfants
Maison remplie

(Ying Chen)

 

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Là toute simple (Thomas Vinau)

Posted by arbrealettres sur 25 septembre 2019




    
Là toute simple

La glace à la vanille
le quart de pomme pour la tortue
l’eau pour les plantes
des jouets d’enfants qui traînent au sol
du vent dans les toiles d’araignées
les cerises les lucioles
les souvenirs et les projets
qui passent sans écraser
qui s’étirent dans le ciel
qui couchent l’herbe
qui sifflotent
qui germent
Là toute simple
la vie qui clapote
à nos pieds

(Thomas Vinau)

 

Recueil: Juste après la pluie
Traduction:
Editions: Alma

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L’OISEAU D’OR DE BRANCUSI (Mina Loy)

Posted by arbrealettres sur 5 avril 2019



Illustration: Constantin Brancusi   
    
L’OISEAU D’OR DE BRANCUSI

Et le jouet
devint l’archétype esthétique

Comme si la patience de quelque Dieu paysan
avait poli et poli
l’Alpha et l’Oméga
de la forme
à partir d’une masse de métal

Orientation dénudée
désempennée déplumée
dans la dynamique du vol
le rythme final
a élagué les extrémités
de crêtes et de serres

L’acte absolu
de l’art
accorda
à la chasteté de la sculpture
‒ nue comme l’arcade d’Osiris –
sein de la révélation

une courbe incandescente
léchée par les flammes chromatiques
dans les labyrinthes du jeu des reflets

L’hyperesthétisme
de ce gong de cuivre affiné
transperce l’air
comme

la lumière agressive
délivre
sa signification

L’immaculée
conception
de l’inaudible oiseau
jaillit
d’une superbe retenue

(Mina Loy)

 

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Tout me file entre les doigts (Henri Thomas)

Posted by arbrealettres sur 30 mars 2019




    
Tout me file entre les doigts,
je n’ai que l’ombre des images,
jouet des choses que je vois

(Henri Thomas)

 

Recueil: Signe de vie
Traduction:
Editions: Gallimard

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Le baiser du soir (Leopoldo Maria Panero)

Posted by arbrealettres sur 24 octobre 2018



Illustration
    
Le baiser du soir

Père, je m’en vais :
je vais jouer dans la mort,
père, je m’en vais.
Dis adieu à ma mère,
éteins la lumière de ma chambre :
père, je m’en vais.

Dis à l’enfant qui rit là-bas,
je ne sais de quoi, peut-être de la vie,
mon nom, rien que mon nom
range bien mes jouets
l’ours avec l’ours, et range le chien
près de l’oiseau, quant au canard
laisse-le seul, le canard :
père, je m’en vais : je vais jouer avec la mort.
Il y avait une flamme, oui dans mes yeux,
d’avoir tant de nuits veillé,
et que personne n’avait su fermer
sinon moi ; pardonne-moi, père, s’il n’y avait
personne, à part moi : je m’en vais,
je m’en vais seul jouer avec la mort.

Père, je suis mort, déjà, et quelle obscurité
tout cela :
pas de lune, pas de soleil, pas de terre ici,
père, je suis mort.
Nous sommes les morts comme des malades
et le cimetière est l’hôpital
on y joue au docteur
drap blanc et bistouri
et des tombes comme autant de lits
pour rƒver : ils sont si blancs ces os
père si blancs : comme rêver.

Les autres disent, les plus morts d’entre nous,
ceux qui passent un temps fou
à se venger ici de Dieu,
que le Diable viendra, le bon Diable,
qu’il viendra le Diable avec plus de fleurs
que personne n’en peut porter.
Père, je suis mort, je ne suis pas seul
père, je suis mort, j’ai des amis
avec qui jouer.

Mère, ces baisers que tu reviens
me donner dans la tombe
me réveillent, me donnent froid
j’ai été vivant, je l’ai su
maintenant
laisse-moi oublier.

Père, je suis mort, et la tombe
est un berceau bien meilleur
père, il n’y a personne, je suis seul
père, si un jour à nouveau
je retourne parmi vous, père si à nouveau je vis
j’ignore de quoi je pourrais rêver.

(Leopoldo Maria Panero)

 

Recueil: Bonne nouvelle du désastre et autres poèmes
Traduction: Victor Martinezet Cédric Démangeot
Editions: Fissile

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