Posted by arbrealettres sur 1 novembre 2022

Illustration: Vincent Van Gogh
A la Santé
I
Avant d’entrer dans ma cellule
Il a fallu me mettre nu
Et quelle voix sinistre ulule
Guillaume qu’es-tu devenu
Le Lazare entrant dans la tombe
Au lieu d’en sortir comme il fit
Adieu Adieu chantante ronde
Ô mes années ô jeunes filles
II
Non je ne me sens plus là
Moi-même
Je suis le quinze de la
Onzième
Le soleil filtre à travers
Les vitres
Ses rayons font sur mes vers
Les pitres
Et dansent sur le papier
J’écoute
Quelqu’un qui frappe du pied
La voûte
III
Dans une fosse comme un ours
Chaque matin je me promène
Tournons tournons tournons toujours
Le ciel est bleu comme une chaîne
Dans une fosse comme un ours
Chaque matin je me promène
Dans la cellule d’à côté
On y fait couler la fontaine
Avec le clefs qu’il fait tinter
Que le geôlier aille et revienne
Dans la cellule d’à coté
On y fait couler la fontaine
IV
Que je m’ennuie entre ces murs tout nus
Et peint de couleurs pâles
Une mouche sur le papier à pas menus
Parcourt mes lignes inégales
Que deviendrai-je ô Dieu qui connais ma douleur
Toi qui me l’as donnée
Prends en pitié mes yeux sans larmes ma pâleur
Le bruit de ma chaise enchainée
Et tour ces pauvres coeurs battant dans la prison
L’Amour qui m’accompagne
Prends en pitié surtout ma débile raison
Et ce désespoir qui la gagne
V
Que lentement passent les heures
Comme passe un enterrement
Tu pleureras l’heure ou tu pleures
Qui passera trop vitement
Comme passent toutes les heures
VI
J’écoute les bruits de la ville
Et prisonnier sans horizon
Je ne vois rien qu’un ciel hostile
Et les murs nus de ma prison
Le jour s’en va voici que brûle
Une lampe dans la prison
Nous sommes seuls dans ma cellule
Belle clarté Chère raison
(Guillaume Apollinaire)
Recueil: La Liberté en poésie
Traduction:
Editions: Folio junior
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Posted by arbrealettres sur 2 juillet 2016

LAZARE, TU DORS?
Guerre de nerfs
de Terre
de rang
de race
de ruines
de fer
de laquais
de cocardes
de vent
de vent
de vent
de traces d’air, de mer, de faux
de frontières, de misères qui s’emmêlent
qui nous emmêlent
sous le cric, sous le mépris
sous hier, sous les débris de la statue tombée
sous d’immenses panneaux de « veto »
prisonniers dans le fumier
sous demain reins cassés
sous demain
cependant millions et millions d’hommes
s’en vont entrant en mort
sans même un cri à eux
millions et millions
le thermomètre gèle comme une jambe
mais une voix d’une stridence extrême …
et millions et millions commandés du Nord
au Sud
s’en vont entrant en mort
Lazare, tu dors ? dis ?
Ils meurent,
Lazare
Ils meurent
et pas de linceul
pas de Marthe ni de Marie
souvent même plus le cadavre
Comme un fou, qui pèle une huître, rit
je crie
je crie
je crie stupide vers toi
si quelque chose tu as appris
à ton tour, maintenant
à ton tour, Lazare!
(Henri Michaux)
Découvert ici: http://revuedepoesie.blog.lemonde.fr/
Illustration: Le Caravage
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