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Poésie

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NOUVELLES FRAÎCHES (René Guy Cadou)

Posted by arbrealettres sur 28 décembre 2022




    
NOUVELLES FRAÎCHES

Souvenirs de la mer
Le grand panneau du fond découpé par l’éclair
La vague abandonnée aux démons du parterre
La fumée des étoiles
Aux ras des flots le lustre éteint
Les voyageuses du matin
Plus haut que nous la robe ouverte

Le regard bleu
Les mouches vertes
Une heure après
L’espace blanc
Le beau gaillard est à l’avant
Ses mains mesurent l’entourage
Le vent se lève
Une autre page

Il est trop tôt pour s’attarder
Le monde va par coups de dés
L’étrave blesse les paupières
Creuse la route la lumière
Aucun regret des passeports
C’est l’aventure naturelle
Et plus nouvelle que la mort.

(René Guy Cadou)

 

Recueil: René Guy Cadou Poésie la vie entière oeuvres poétiques complètes
Traduction:
Editions: Seghers

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La belle vieille (François Maynard)

Posted by arbrealettres sur 10 octobre 2022



Illustration: Christelle Fontenoy 
    

La belle vieille

Cloris, que dans mon temps j’ai si longtemps servie
Et que ma passion montre à tout l’univers,
Ne veux-tu pas changer le destin de ma vie
Et donner de beaux jours à mes derniers hivers ?

N’oppose plus ton deuil au bonheur où j’aspire.
Ton visage est-il fait pour demeurer voilé ?
Sors de ta nuit funèbre, et permets que j’admire
Les divines clartés des yeux qui m’ont brûlé.

Où s’enfuit ta prudence acquise et naturelle ?
Qu’est-ce que ton esprit a fait de sa vigueur ?
La folle vanité de paraître fidèle
Aux cendres d’un jaloux, m’expose à ta rigueur.

Eusses-tu fait le voeu d’un éternel veuvage
Pour l’honneur du mari que ton lit a perdu
Et trouvé des Césars dans ton haut parentage,
Ton amour est un bien qui m’est justement dû.

Qu’on a vu revenir de malheurs et de joies,
Qu’on a vu trébucher de peuples et de rois,
Qu’on a pleuré d’Hectors, qu’on a brûlé de Troies
Depuis que mon courage a fléchi sous tes lois !

Ce n’est pas d’aujourd’hui que je suis ta conquête,
Huit lustres ont suivi le jour que tu me pris,
Et j’ai fidèlement aimé ta belle tête
Sous des cheveux châtains et sous des cheveux gris.

C’est de tes jeunes yeux que mon ardeur est née ;
C’est de leurs premiers traits que je fus abattu ;
Mais tant que tu brûlas du flambeau d’hyménée,
Mon amour se cacha pour plaire à ta vertu.

Je sais de quel respect il faut que je t’honore
Et mes ressentiments ne l’ont pas violé.
Si quelquefois j’ai dit le soin qui me dévore,
C’est à des confidents qui n’ont jamais parlé.

Pour adoucir l’aigreur des peines que j’endure
Je me plains aux rochers et demande conseil
A ces vieilles forêts dont l’épaisse verdure
Fait de si belles nuits en dépit du soleil.

L’âme pleine d’amour et de mélancolie
Et couché sur des fleurs et sous des orangers,
J’ai montré ma blessure aux deux mers d’Italie
Et fait dire ton nom aux échos étrangers.

Ce fleuve impérieux à qui tout fit hommage
Et dont Neptune même endure le mépris,
A su qu’en mon esprit j’adorais ton image
Au lieu de chercher Rome en ses vastes débris.

Cloris, la passion que mon coeur t’a jurée
Ne trouve point d’exemple aux siècles les plus vieux.
Amour et la nature admirent la durée
Du feu de mes désirs et du feu de tes yeux.

La beauté qui te suit depuis ton premier âge
Au déclin de tes jours ne veut pas te laisser,
Et le temps, orgueilleux d’avoir fait ton visage,
En conserve l’éclat et craint de l’effacer.

Regarde sans frayeur la fin de toutes choses,
Consulte le miroir avec des yeux contents.
On ne voit point tomber ni tes lys, ni tes roses,
Et l’hiver de ta vie est ton second printemps.

Pour moi, je cède aux ans ; et ma tête chenue
M’apprend qu’il faut quitter les hommes et le jour.
Mon sang se refroidit ; ma force diminue
Et je serais sans feu si j’étais sans amour.

C’est dans peu de matins que je croîtrai le nombre
De ceux à qui la Parque a ravi la clarté !
Oh ! qu’on oira souvent les plaintes de mon ombre
Accuser tes mépris de m’avoir maltraité !

Que feras-tu, Cloris, pour honorer ma cendre ?
Pourras-tu sans regret ouïr parler de moi ?
Et le mort que tu plains te pourra-t-il défendre
De blâmer ta rigueur et de louer ma foi ?

Si je voyais la fin de l’âge qui te reste,
Ma raison tomberait sous l’excès de mon deuil ;
Je pleurerais sans cesse un malheur si funeste
Et ferais jour et nuit l’amour à ton cercueil !

(François Maynard)

 

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PAIX DE L’ÉPOUSE (Rina Lasnier)

Posted by arbrealettres sur 20 octobre 2021



PAIX DE L’ÉPOUSE

Paix à ton épaule lustrée de jeune loutre
paix à ma main simultanée te couvrant d’oiseaux
et tes cheveux sont l’eau heurtée de mousse…

Paix à la soif sèche des lèvres par l’irruption de l’esprit
à travers l’aise et l’amour éveillant un dieu naissant ;
paix à nos ombres longues de leur seule fraîcheur
comme l’obscurité tendre née de la neige.

Tu es en moi le puits creusé jour à jour,
dors, remontée en moi comme les anneaux de l’eau…

(Rina Lasnier)

Illustration: Anne-Marie Zilberman

 

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L’Assiette (Jean Follain)

Posted by arbrealettres sur 23 avril 2020



Quand tombe des mains de la servante
la pâle assiette ronde
de la couleur des nuées
il en faut ramasser les débris,
tandis que frémit le lustre
dans la salle à manger des maîtres
et que la vieille école ânonne
une mythologie incertaine
dont on entend
quand le vent cesse
nommer tous les faux dieux.

(Jean Follain)

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REFRAIN POPULAIRE (Itzhak-Leibush Peretz)

Posted by arbrealettres sur 17 novembre 2019



    

REFRAIN POPULAIRE

Des palais bâtis de pierre,
Ferronnerie aux balcons,
Blancheur des perrons de marbre
Et dorures des salons.

Lustres scintillants de gemmes
Qu’aux vitres l’on voit danser:
Là viendra celui que j’aime
Pour se choisir fiancée,

Sa fiancée à choisir
En ce lieu plus belle et claire.
Moi je resterai moisir
Comme feuille au vent d’hiver.

(Itzhak-Leibush Peretz)

 

Recueil: Anthologie de la poésie yiddish Le miroir d’un peuple
Traduction:
Editions: Gallimard

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UN BAL DE COMPTABLES (Norge)

Posted by arbrealettres sur 15 octobre 2018



UN BAL DE COMPTABLES

Ce bal ressemble à tous les bals.
Il ne manque pas d’entrain.
Les jeunes aides-comptables ont un pas léger
et les dames comptables révèlent sous les lustres
un nombre de charmes très élevé,
quelques souplesses de jeunes vagues.
Non, rien ne trahirait si le peintre n’avait réussi à conférer à ses couleurs
une indicible façon de comptabilité.

(Norge)


Illustration: Sonia Delaunay

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LE BOUQUET (Henri De Régnier)

Posted by arbrealettres sur 14 août 2018



 

parquets

LE BOUQUET

Sur la rosace éclose au centre du parquet
Pose ton pied léger, écoute et sois furtive;
La solitude parle à celle qui arrive;
N’as-tu pas entendu le marbre qui craquait?

La harpe tremble et vibre à ton pas indiscret,
Le lustre se balance et son cristal s’avive;
De ce qui semble mort crois-tu que rien ne vive?
La glace a son fantôme et tout a son secret.

Le temps passe; tout fuit; les choses sont fidèles,
L’invisible silence évente de ses ailes
La poussière pensive et l’ombre transparente;

Et, sur la table nue où le marbre veiné
A quelque chair ancienne et pâle s’apparente,
Effeuille le bouquet que l’Amour t’a donné.

(Henri De Régnier)

Illustration

 

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C’EST UNE CITE (Georges Themelis)

Posted by arbrealettres sur 6 août 2018



 

Gaston Bussiere (French, 1862-1929)   Juventa

C’EST UNE CITE

C’est une cité avec beaucoup de lumière.

As-tu jamais vu des maisons pétrifiées
En rêve ou en éveil ?
Tout est fragile comme porcelaine,
Avec des portes automatiques qui s’ouvrent et se referment.

Si tu remues la main elle se brise

Pleines de lustres dans les salles à miroirs,
Elles multiplient la lumière terrible, la disloquent
Sur les planchers où nagent des cygnes peints.
De belles femmes avec des hanches et des seins
Observent leur visage dans les eaux et attendent les cygnes.

Personne n’y habite. Tous ont été
Enterrés dans des tombes de marbre.

Tu peux les visiter
Comme on visite les musées.
Chacune possède son nom sur la plaque,
Son numéro, son genre, ses rêves.

Nous avons souffert des excès de lumière d’un été sec.
Mais ce fut beau, très beau.

(Georges Themelis)

Illustration: Gaston Bussiere

 

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INTÉRIEUR (Henri De Régnier)

Posted by arbrealettres sur 28 juillet 2018



 

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INTÉRIEUR

Le Temps sentencieux et le muet Amour
Se tiennent côte à côte et debout devant l’âtre,
Et l’on voit se croiser dans le miroir verdâtre
La faulx vaine du Temps et l’aile de l’Amour.

L’aile est lasse. Le Temps parfois parle à l’Amour;
La voix douce reprend la voix acariâtre;
L’enfant résiste et le vieillard s’opiniâtre,
Et l’enfant ne veut pas comprendre, étant l’Amour.

Rosaces au parquet et lustres au plafond,
Éclair qui va tonner, roses qui fleuriront!
Le miroir s’interroge et scrute le miroir.

Le meuble se contracte et crispe ses pieds tors;
La porte s’entrebâille et l’on attend l’Espoir
Qui de l’aile de cendre eût fait une aile d’or.

(Henri De Régnier)

Illustration

 

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Le poète (Mireille Gaglio)

Posted by arbrealettres sur 22 mai 2018




Le poète

Le poète est mort ce soir :
On l’avait côtoyé,
Côtoyé sans le voir…
Côtoyé sans savoir.
Il allait si discret,
Suivant humblement
Son bout de chemin…
On se rend compte enfin,
Mais il est un peu tard,
Qu’on avait un trésor
Et même une indicible part !

On avait la richesse,
On avait la tendresse,
Il avait les idées, les sentiments.
Mais resté incompris,
On ne l’a pas écouté un moment !
On l’a rendu muet…
On était sourd,
Incapable d’amour…
Dans notre milieu,
On ne l’a pas accueilli…
Et on est malheureux !

A trop vouloir le lustre apparent
La rentabilité et puis l’argent,
On a négligé l’or de son cœur
Comme si on en eut peur
Et comme on avait tort !
Il a fallu qu’il meure
Pour qu’il ne nous reste plus que des remords !

(Mireille Gaglio)

Illustration: René Baumer

 

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