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Posts Tagged ‘(Marie Dauguet)’

Les chats (Marie Dauguet)

Posted by arbrealettres sur 5 septembre 2018




Illustration: ArbreaPhotos
    
Les chats

Je veux louer les chats,
Plus caressants qu’un flot s’écoulant à la dune,
Qu’au long d’un toit moussu un bleu rayon de lune,
Les chats voluptueux flairant l’odeur des mains
Et les bouquets fanés qui meurent sur les seins.

Je veux louer les chats aux prunelles languides,
Fluant à pas muets à travers l’herbe humide,
Savants dans l’art de jouir et qui vont dégustant,
Lait pur, l’arôme exquis des jasmins au printemps.

Je veux louer les chats amoureux des nuances
Des coussins japonais, des bergères d’antan,
Des tapis d’Orient à la molle effleurescance
Par qui le dur réel devient inexistant.

Je veux louer les chats dont l’échine se ploie
Agilement aux creux des édredons de soie,
Mais adorant surtout, à l’égal d’un péché,
L’énervante tiédeur des genoux rapprochés.

Je veux louer les chats qui, de leurs ongles fauves,
Dédaigneux des gazons s’étalant en plein jour,
Pétrissent lentement à l’ombre de l’alcôve
L’oreiller langoureux que parfuma l’amour.

Je veux louer les chats par-dessus tout artistes
Qui, lorsque nous dormons, aux lueurs d’améthystes
Des soirs d’Août s’en vont, au bord des toits branlants,
Gémir de mal d’amour dans la nuit s’étoilant.

Je veux louer les chats dont l’âme nous pénètre,
Fins comme les sorciers des anciens fabliaux,
Les chats posant leur front doux au front de leurs maîtres,
Les chats meilleurs que nous, fidèles et loyaux.

(Marie Dauguet)

 

 

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SOTTO VOCE (Marie Dauguet)

Posted by arbrealettres sur 6 février 2018



SOTTO VOCE

II est doux de mourir un peu
Aux berges des forêts mouillées,
Et parmi les feuilles rouillées
Où s’égoutte du brouillard bleu ;
Il est doux de mourir un peu.
Il est doux de n’être plus rien
Que la brume qui s’échevèle,
Moins que le frôlis sourd d’une aile,
Aux velours pourpre des fusains ;
Il est doux de n’être plus rien.

Il est doux de mourir un peu
Avec les eaux qui se corrompent,
Avec les lointains qui s’estompent.
Avec les buis, les houx fangeux ;
Il est doux de mourir un peu.
Il est doux de n’être plus rien,
Moins que le frisson d’une rose,
Dont le vent d’hiver décompose
La chair de nacre et de carmin.
Il est doux de n’être plus rien.

(Marie Dauguet)

 

 

 

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Extase (Marie Dauguet)

Posted by arbrealettres sur 18 novembre 2017



Illustration: Louis Pierre Verwee
    
Extase

D’un coeur passionné savourons notre rêve
Avant que la vie dure et fausse nous l’enlève,
O mon amour, viens nous asseoir
Sous les saules d’azur pleurant au bord du soir.

Tout fuit intensément, embrassons notre songe;
Que l’heure nous oublie et pour nous se prolonge,
Et que, sans jamais s’épuiser,
Renaissent, floraisons brûlantes, nos baisers.

La cétoine s’endort gitée au coeur des roses;
Comme une hostie au fond d’un ciboire repose,
Qu’entoure un mystique halo,
Dans ton âme et ta chair tout mon être est enclos.

Et nous nous étreignons, expirants, bouche à bouche,
Pendant que les grands lys penchés sur notre couche
Y versent des parfums d’autel.
Anéantis au flux du désir immortel,

Aimons-nous, mes amours! Ayons pour seule envie,
Puisque l’heure agonise et que s’enfuit la vie,
Lèvre à lèvre, d’avoir goûté,
Dans un spasme trop bref, toute une éternité!

(Marie Dauguet)

 

 

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Libération (Marie Dauguet)

Posted by arbrealettres sur 18 novembre 2017



Illustration: F.A. Moore
    
Libération

Le soleil dans les pommiers roses
Comme une harpe a tendu ses rayons,
Et voici que passe et se pose
Parmi les fils d’or l’essaim des guêpes en tourbillons.

L’herbe se tait sentimentale
Où point la véronique imperceptiblement,
Où l’ombre changeante s’étale
Se froisse et s’envole en de translucides déploiements

Mais c’est la nuit surtout, quand au pignon des fermes
Dorment les fleurs d’abricôtiers
Et qu’étoilant la terre où palpitent des germes
S’ouvrent les boutons des fraisiers;

C’est la nuit quand l’eau sombre au bord des prés gargouille
Et que, monotone biniou,
S’élève indéfini le chant faux des grenouilles
Succédant au cri des coucous;

C’est la nuit quand survient dans sa verte tunique
La lune avec ses cheveux froids
Et que jase à mi-voix presque somnambulique
Le rossignol au fond des bois,

C’est la nuit qu’il est doux d’être un cœur qui délaisse
Sa chair comme un étroit tombeau,
Et fondu, mort d’amour, coule dans la caresse
Du vent aux blancheurs des sureaux.

(Marie Dauguet)

 

 

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En avril (Marie Dauguet)

Posted by arbrealettres sur 18 novembre 2017




    
En avril

En avril sous les bourgeons roux,
Voici le bouvreuil aux cris doux,
Voici le merle et la mésange,
Que nul vent glacé ne dérange,
Pépiant au soleil nouveau,
Pendant que d’argent clair se frange
La berge noire des ruisseaux.

Voici le vert cendré des pousses;
Étalant de bleuâtres housses,
La mousse où fleurissent dorés,
Caressés du ciel azuré
Les coucous, où les anémones
Ouvrent leurs pétales nacrés
À l’abri vaporeux des aulnes.

Voici la flûte verte et glauque
Des grives et la plainte rauque
Des crapauds en amour montant,
Des vases molles de l’étang
Et qui, bourdonnante, dévide
Son rythme par les joncs humides
Que chauffe un soleil éclatant.

Voici les trembleuses fougères
Déroulant leurs crosses légères
Et les longs iris flexueux
Qu’agite le vol anguleux
Et fantasque des demoiselles
Effleurant leurs calices bleus
Du bout transparent de leurs ailes.

Ah! Viens, mon amour, je le veux,
Viens, dans la nuit des chemins creux
Parmi les fleurs en avalanches,
Mon coeur est un nid sous les branches;
Viens, comme un doux oiseau lassé,
Dans le nid tiède reposer
A l’ombre des épines blanches.

(Marie Dauguet)

 

 

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Aurore (Marie Dauguet)

Posted by arbrealettres sur 18 novembre 2017




    
Aurore

Dans les jardins frais à l’aurore,
Rêver près des volubilis,
Coupés de lapis-lazulis
Qu’un humide rayon décoré.

Sous un vieux poirier qui s’éplore,
Et que l’aube d’un clair surplis
Habille, au soleil qui les dore
Respirer l’haleine des lys.

Voir sur les roses balsamines,
S’empétrant à leurs étamines,
Errer un bourdon diligent.

Cueillir dans la pâle lumière
Qui nimbe sa sveltesse altière,
Un œillet blanc glacé d’argent.

(Marie Dauguet)

 

 

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L´éternel mirage (Marie Dauguet)

Posted by arbrealettres sur 18 novembre 2017



 

Illustration: Josephine Wall
    
L´éternel mirage

Et le vent coulera parmi les herbes lisses,
Les tiges d’angélique et les brins de mélisse;
La mousse entourera comme un souple linceul
Les vieux rochers et les racines des tilleuls.

Je dormirai dans l’odeur triste des fontaines,
Dont le flot déroulé comme une écharpe traine,
Et je palpiterai aux sanglotants aveux
Que prodigue la brise à leurs bords vaporeux.

Je serai confondue au murmurant cantique
Des sources s’égouttant dans le bois noir, la nuit,
Infiltrant lentement leur âme fluidique
Sous la sombre bruyère où mon âme la suit.

Je serai la fraîcheur tranquille après la pluie
Des troënes et des prèles glacés d’argent,
Le silence attendri, les rayons où s’essuie
La ronce bleue au long des pentes s’effrangeant.

Je serai le reflet qui songe et qui transpose,
Le rêve frissonnant des coudriers sur l’eau,
L’âcreté des bourgeons, le miel sucré des roses,
Le baiser haletant aux lèvres de l’écho.

Je serai le miroir clair à travers l’espace
Et qui saisit parfois au fond du ciel serein
La trace d’une image immense qui s’efface;
Je me tendrai vers toi, ô visage divin.

(Marie Dauguet)

 

 

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Quand je mourrai! (Marie Dauguet)

Posted by arbrealettres sur 16 novembre 2017




    
Quand je mourrai!

Je voudrais pour linceul, non la toile aux plis raides,
Non point le lin blanchi parmi l’herbe des prés,
Mais un tissu plus doux aux doigts que du sang tiède,
Un lambeau d’un couchant pourpré.

Je voudrais me mêler à l’océan des seigles
Qui réfléchit le ciel en son déferlement;
Aux palpitations des sainfoins qu’un vent frêle,
En juin, berce languissamment;

Devenir l’or des blés fauchés qu’on enjavèle,
Le chaume ensoleillé où des moissonneurs las
Dressent les lourds gerbiers dont la cime étincelle
Et qu’entoure une ombre lilas.

Je voudrais, quand la lune en manteau d’améthyste
Vers le gouffre des puits se penche, m’écouler
Et sangloter unie aux plaintes de l’eau triste,
S’égouttant des joints descellés.

Je voudrais que mon âme errante s’évapore
Comme un parfum flottant de lavande et de buis,
Confondue au sourire éclatant de l’aurore,
Aux larmes que verse la nuit.

(Marie Dauguet)

 

 

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S’asseoir sur un murger… (Marie Dauguet)

Posted by arbrealettres sur 16 novembre 2017



Illustration: Alexander Nedzvetskaya
    
S’asseoir sur un murger…

S’asseoir sur un murger, les pieds dans les broussailles
Et les doigts enlacés aux rugueuses pierrailles,
Seule avec les lointains où le soleil se meurt,
Seule avec sa pensée et seule avec son coeur.

Respirer le parfum des herbes attiédies,
Ecouter la cigale aux lentes psalmodies
Vibrer parmi les brins séchés des serpolets,
Voir s’embrumer du soir le vitrail violet.

Voir s’élever du creux des placides jachères,
En arceaux imprécis, l’encens crépusculaire,
Et l’orchis opalin de la lune, aux prés bleus
Du ciel, éparpiller son pollen nébuleux.

Savourer cette odeur de la lande que baigne
Quelque ruisseau muet et filtrant sous les sphaignes,
Savourer cette odeur enivrante qui sort
Mystérieusement de la gèbe qui dort.

Goûter le souffle obscur de la forêt prochaine
Dont le frisson murmure au feuillage des chênes,
La fauve et l’âcre odeur qui vient comme un baiser
De faune sur la bouche ardemment se poser.

Et n’être que la nuit, le parfum, la bruyère,
Le tourbillon léger des derniers éphémères,
Etre le serpolet bruissant sous ma main,
Fuir hors de ce cachot qu’on nomme un coeur humain,

Mais, dans l’humilité douce des moindres choses,
Devenir l’herbe morte où le grillon repose,
Ou bien le roitelet lassé de pépier
Qui perche sommeilleux aux branches des ronciers.

(Marie Dauguet)

 

 

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Vous êtes ô Parfums (Marie Dauguet)

Posted by arbrealettres sur 16 novembre 2017



Illustration
    
Vous êtes ô Parfums,

D’une ivresse plus délectable et plus choisie
Que la caresse aux yeux, où leur splendeur s’imprègne,
Des chappes raidissant leur moire cramoisie
Et portant, d’or fané, l’agneau blessé qui saigne;

Plus naïfs et plus doux que n’est au crépuscule,
Sous des pins bleuissants embaumant la résine
Où quelque lueur d’astre en frissonnant circule,
Un champêtre duo de flûte et de clarine;

Plus somptueux et lents que le cours de l’Erèbe
Fluant son onde lourde aux plages léthargiques;
Qu’en l’honneur d’un héros, une marche funèbre
Déroulant pesamment son rythme pathétique.

Vous remplissez les coeurs d’un plus triste vertige,
D’un effroi plus aigu que l’aboi spleenitique
Lointainement d’un loup dans la nuit qui s’afflige,
Endeuillant les crénaux des donjons romantiques.

Plus que le son des cors aux ténébreuses fresques
Des forêts déchaînant le hurlement des meutes,
Parfums, vous provoquez, des désirs titanesques,
Dans l’ombre de nos coeurs les rougeâtres émeutes.

Vous êtes, ô parfums, plus comblés d’inertie
Que les violets sourds qui tombent des verrières,
Distributeurs savants de cette ataraxie
Qu’implorent nos douleurs dont le cri s’exaspère;

Plus résignés qu’ils sont en leur torpeur hindoue,
Où tout geste s’est tu, où nul désir ne râle,
Les tons silencieux dont la houle se joue,
Mer extatique, au dallage des cathédrales.

Endormeuse harmonie errante dans l’espace
Et qui bercez d’oubli nos âmes faméliques,
Vous surpassez la paix qui descend des rosaces
Quand s’unit l’orangé aux bleus mélancoliques.

Perçant l’opacité morne où nos sens résident,
Vous êtes, défiant le plus subtil orchestre,
De l’immense inconnu le langage fluide,
La voix de l’au-delà dans sa forme terrestre.

(Marie Dauguet)

 

 

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