Rien n’est plus doux aussi que de s’en revenir
Comme après de longs ans d’absence,
Que de s’en revenir
Par le chemin du souvenir
Fleuri de lys d’innocence
Au jardin de l’Enfance.
Au jardin clos, scellé, dans le jardin muet
D’où s’enfuirent les gaîtés franches,
Notre jardin muet,
Et la danse du menuet
Qu’autrefois menaient sous branches
Nos soeurs en robes blanches.
Aux soirs d’Avrils anciens, jetant des cris joyeux
Entremêlés de ritournelles,
Avec des lieds joyeux,
Elles passaient, la gloire aux yeux,
Sous le frisson des tonnelles,
Comme en les villanelles.
Cependant que venaient, du fond de la villa,
Des accords de guitare ancienne,
De la vieille villa,
Et qui faisaient deviner là,
Près d’une obscure persienne,
Quelque musicienne.
Mais rien n’est plus amer que de penser aussi
A tant de choses ruinées!
Ah ! de penser aussi,
Lorsque nous revenons ainsi
Par sentes de fleurs fanées,
À nos jeunes années.
Lorsque nous nous sentons névrosés et vieillis,
Froissés, maltraités et sans armes,
Moroses et vieillis,
Et que, surnageant aux oublis,
S’éternise avec ses charmes
Notre jeunesse en larmes!
Matins radieux.
Jours où je désire tant de choses que je ne désire rien.
Seulement ma vie, et rien de plus. N’empêche,
j’espère que personne ne s’amènera.
Mais si quelqu’un se présente, j’espère que ce sera elle.
Celle qui a de petites étoiles de diamant
à la pointe de ses chaussures.
La fille que j’ai vue danser le menuet.
Cette ancienne danse.
Le menuet. Elle le dansait
comme on doit le danser.
Et comme elle en avait envie.
***
The Minuet
Bright mornings.
Days when I want so much I want nothing.
Just this life, and no more. Still,
I hope no one comes along.
But if someone does, I hope it’s her.
The one with the little diamond stars
at the toes of her shoes.
The girl I saw dance the minuet.
That antique dance.
The minuet. She danced that
the way it should be danced.
And the way she wanted.