
Les murs ne tombent pas
[2]
Le Mal était actif dans le pays,
le Bien appauvri et triste ;
Aventure promise à un triste sort,
le Bien était gras et béat ;
le Mal-in nous poursuivait,
paré tel Jéhovah ;
le Bien était la cosse sans goût,
dépouillée de la fève de manne, de lentille
ils étaient furieux quand nous fûmes affamés
de nourriture, Dieu ;
ils ont arraché nos amulettes,
les charmes ne sont pas, dirent-ils, la grâce ;
mais les dieux voient toujours dans les deux sens,
sur les anciennes routes cherchons la présence
de la vraie-rune, la bonne formule,
recouvrons d’anciennes valeurs ;
sans écouter s’ils crient
ta beauté, Isis, Aset ou Astarté,
est une catin ; tu es rétrogressif,
zélote, rêvant des anciens lieux de plaisir ;
ton coeur, en outre,
est un chancre mort,
ils continuent, et
ton rythme est l’hymne du malin,
ton style est plongé dans le corrosif sublimé,
comment peux-tu gratter
l’encre indélébile du palimpseste
de la mésaventure passée ?
{3]
Laissez -nous, néanmoins, récupérer le Sceptre,
la verge du pouvoir :
elle est couronnée par la fleur de lis
ou le bouton de lis :
c’est Caducée ; parmi les mourants
il porte la guérison :
ou évoquant les morts,
il apporte la vie aux vivants.
***
Evil was active in the land,
Good was impoverished and sad;
Ill promised adventure,
Good was smug and fat;
Dev-ill was after us,
tricked up like Jehovah;
Good was the tasteless pod,
stripped from the manna-beans, pulse, lentils:
they were angry when we were so hungry
for the nourishment, God;
they snatched off our amulets,
charms are not, they said, grace;
but gods always face two-ways,
so let us search the old highways
for the true-rune the right-spell,
recover old values;
nor listen if they shout out,
your beauty, Isis, Aset or Astarte,
is a harlot; you are retrogressive,
zealot, hankering after old flesh-pots;
your heart, moreover,
is a dead canker,
they continue, and
your rhythm is the devil’s hymn,
your stylus is dipped in corrosive sublimate,
how can you scratch out
indelible ink of the palimpsest
of past misadventure?
Let us, however, recover the Sceptre,
the rod of power:
it is crowned with the lily-head
or the lily-bud:
it is Caduceus; among the dying
it bears healing:
or evoking the dead,
it brings life to the living.
(Hilda Doolittle)