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Poésie

Posts Tagged ‘meuble’

L’ATTENTE (Guy Goffette)

Posted by arbrealettres sur 10 mai 2023



Illustration: Serguéï Andréïévitch TOUTOUNOV
    
L’ATTENTE

Si tu viens pour rester, dit-elle, ne parle pas.
Il suffit de la pluie et du vent sur les tuiles,
il suffit du silence que les meubles entassent
comme poussière depuis des siècles sans toi.

Ne parle pas encore. Écoute ce qui fut
lame dans ma chair : chaque pas, un rire au loin,
l’aboiement du cabot, la portière qui claque
et ce train qui n’en finit pas de passer

sur mes os. Reste sans paroles : il n’y a rien
à dire. Laisse la pluie redevenir la pluie
et le vent cette marée sous les tuiles, laisse

le chien crier son nom dans la nuit, la portière
claquer, s’en aller l’inconnu en ce lieu nul
où je mourais. Reste si tu viens pour rester.

(Guy Goffette)

Recueil: Anthologie de la poésie française du XXè siècle
Editions: Gallimard

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FEMME DIURNE (Ulalume Gonzalez de Léon)

Posted by arbrealettres sur 13 avril 2023



Illustration: Maurice-Ambroise Ehlinger  
    
FEMME DIURNE

Toute la lumière est avec toi
ô reine des lampes
somme d’épisodes lumineux.
Tu t’es installée chez moi
et je suis née à nouveau dans la queue de la comète
Tu es ma première femme endormie
qui ne disparaît pas la nuit.
Tu es mon premier amour fulgurant.
Tu émets
une phosphorescence de vie qui veille.
Je m’éveille pour te regarder :
tu es pleine de fenêtres
toute meublée d’objets blancs
et ta confiance me fait honte.

(Ulalume Gonzalez de Léon)

Recueil: Poésie du Mexique
Traduction: Jean-Clarence Lambert
Editions: Actes Sud

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RETOUCHE AU POÈTE DÉCADENT (Daniel Boulanger)

Posted by arbrealettres sur 25 mars 2023



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RETOUCHE AU POÈTE DÉCADENT

Du cygne il ne montre que l’oie
gavée de vers nacrés.
Péniche
bourrée de meubles en bois de rose à jours,
avec un lit qui n’en finit plus
porté par de grosses musiques
où l’on discerne le bruit d’enfant qui tète
d’une eau sans voyage
à quai dont les pierres se descellent.

(Daniel Boulanger)

Illustration: ArbreaPhotos
 

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Parcourons la nouvelle maison américaine (Richard Brautigan)

Posted by arbrealettres sur 1 janvier 2023




    
Parcourons la nouvelle maison américaine

Il y a des portes
qui veulent être libres
de leurs gonds pour
voler avec de parfaits nuages.

Il y a des fenêtres
qui veulent être
détachées de leur
chambranle pour courir avec
les daims à travers les prés
de l’arrière-pays.

Il y a des murs
qui veulent rôder
avec les montagnes
à travers les premières
lueurs de l’aube.

Il y a des sols
qui veulent digérer
leurs meubles pour en faire
des fleurs et des arbres.

Il y a des toits
qui veulent voyager
gracieusement avec
les étoiles à travers
des cercles d’obscurité.

***

Let’s Voyage into the New American House

There are doors
that want to be free
from their hinges to
fly with perfect clouds.

There are windows
that want to be
released from their
frames to run with
the deer through
back country meadows.

There are walls
that want to prowl
with the mountains
through the early
morning dusk.

There are floors
that want to digest
their furniture into
flowers and trees.

There are roofs
that want to travel
gracefully with
the stars through
circles of darkness.

(Richard Brautigan)

 

Recueil: C’est tout ce que j’ai à déclarer Oeuvres poétiques complètes
Traduction: Thierry Beauchamp, Frédéric Lasaygues et Nicolas Richard
Editions: Le Castor Astral

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NOËL (Aksinia Mihaylova)

Posted by arbrealettres sur 24 décembre 2022



 


    
NOËL

Comme si je n’avais jamais vécu dans cette maison
qui, libérée des meubles lourds,
essaye à présent de garder l’équilibre.
Pareille à une louve qui soudain s’est retrouvée
dans une clairière, je tourne en rond
autour du sapin de Noël
incliné au milieu du salon vide.
Deux louveteaux posent en silence
leurs museaux dans la neige
et regardent les pommes sèches
et les guirlandes parmi les branches.
Mais la lumière qui rayonne de leurs yeux
lave tous les îlots boueux dans le courant
de la Voie lactée
et nous entrons avec des chaussures propres
dans une autre année.

(Aksinia Mihaylova)

 

Recueil: Le baiser du temps
Traduction:
Editions: Gallimard

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Au loin disparu (Su Wu)

Posted by arbrealettres sur 13 décembre 2022



Illustration: Shan Sa
    
Au loin disparu

Le cygne déploie ses ailes agiles et laisse le vent le porter au loin.
Un air vif le rappelle au souci et il tourne la tête, incertain.
Un cheval livre ses pas lourds à la steppe désertée — les siens sont partis.
Son coeur s’enlise dans des pensées interdites comme ses sabots dans la glaise meuble.
Le destin s’abat sans pitié sur deux dragons que leurs ailes opposent.
Il reste pourtant les chants qui savent révéler les amours secrets.
À l’ami qui s’en va, je joins les mots du ruisseau où coulent mes larmes.
L’écho des tambours exalte les vertus mâles et déchire les coeurs des compagnons vaincus.
La solitude des vers alimente le brasier du souvenir
Et plombe mon âme mon âme brisée dans l’horizon des peines.
J’aimerais pouvoir entonner encore les airs de l’enfance,
Ton pays est loin désormais — il t’ignore jusqu’au trépas.
Le mal me dévisage et il pleut sur les joues des filets d’amertume.
Les cygnes volent leur vie entière deux à deux
Mais pour nous, hommes, qui ne pouvons nous envoler ensemble
Il n’y a que routes mornes aux destins séparés.

(Su Wu)

(140-60)

 

Recueil: Nuages immobiles Les plus beaux poèmes des seize dynasties chinoises
Traduction: Alexis Lavis
Editions: l’Archipel

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On la voit mal (James Sacré)

Posted by arbrealettres sur 25 janvier 2022




    
On la voit mal mais quand même une couleur un peu bleue
contre la vitre de la bibliothèque un vieux meuble
avec des appareils pour les leçons de choses dedans
un entonnoir en verre la poussière le temps
solitude ça continue, qu’est-ce qu’on attend
pour s’en aller je
sais pas où ?
j’attends rien çа continue.

(James Sacré)

Recueil: Bocaux, bonbonnes, carafes et bouteilles (Comme)
Traduction:
Editions: Le Castor Astral & Le Noroît

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De la rue on entend sa plaintive chanson (François Coppée)

Posted by arbrealettres sur 8 janvier 2021



 

Illustration: Leonor Fini
    
De la rue on entend sa plaintive chanson.
Pâle et rousse, le teint plein de taches de son,
Elle coud, de profil, assise à sa fenêtre.
Très sage et sachant bien qu’elle est laide peut-être,
Elle a son dé d’argent pour unique bijou.
Sa chambre est nue, avec des meubles d’acajou.
Elle gagne deux francs, fait de la lingerie
Et jette un sou quand vient l’orgue de Barbarie.
Tous les voisins lui font leur bonjour le plus gai
Qui leur vaut son petit sourire fatigué.

(François Coppée)

 

Recueil: Promenades et interieurs
Traduction:
Editions:

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Anachorète (Habiba Djahnine)

Posted by arbrealettres sur 30 octobre 2020




    
Anachorète

Hier j’ai regardé ses rides une à une
J’ai dévisagé les sillons de son âme
Pour dérouler le fil des ans
Qui ont tissé tant d’histoires sur sa peau.

Hier je me suis approchée de sa demeure
Frêle et éphémère
Gardant les traces de sa vie nomade
Terre meuble, qui se déplace avec ses pas.

Hier je me suis approchée de son oasis
Son dromadaire m’accueille larmoyant
Face à la dune, l’unique dune
Il veille sur les rides de l’ermite.

Il enfile ses poèmes un à un pour conter le désert
Il dit que les poèmes ne lui appartiennent pas
Les vents lui ont offert les vers
Et les tempêtes la mémoire pour les garder.

Maintenant c’est l’heure du thé
Le bois sec brûle
C’est le moment
De se souvenir du sens des vents
Les plus belles histoires
Sont celles où les êtres s’aiment dans le dénuement
Et les plus cruelles
Sont celles où les êtres se font la guerre dans l’opulence.

Hier j’ai regardé ses rides une à une
J’ai dévisagé les sillons de son âme
Pour dérouler le fil des ans
Qui ont tissé tant d’histoires sur sa peau.

(Habiba Djahnine)

 

Recueil: 120 nuances d’Afrique
Traduction:
Editions: Bruno Doucey

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Retouche à la rémission (Daniel Boulanger)

Posted by arbrealettres sur 11 juin 2020



 

retouche à la rémission

près du soir en cendre
où saute l’étincelle d’un oiseau
le caillou retient sa vie

les meubles du vent se démontent
les grands chagrins ne sont que bruit d’enseigne

(Daniel Boulanger)

 
Illustration: ArbreaPhotos

 

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