Quêter, quérir, fouiller, fureter,
Froidure vide, froid dur limpide,
Morne monotonie, amère mélancolie, lamentable ennui…
Douceur subite, retour du froid,
Cette saison où je souffre le plus de respirer ;
Avec trois gobelets et deux coupes de vin clair,
Comment y résister, quand le soir vient, quand le vent s’énerve ?
Voici les oies sauvages parties,
Le plus cruel à mon coeur,
Pourtant nous étions bien complices aux temps passés.
Partout au sol les chrysanthèmes s’amoncellent,
Défraîchis et déchus
à présent, qui viendrait prendre la peine de les ramasser ?
Veillant près de la fenêtre,
Solitaire, par moi-même comment parviendrai-je à rejoindre l’obscurité ?
Au sterculier vient s’adjoindre la bruine,
Qui jusqu’au crépuscule dégoutte et dégouline ;
Et toute cette composition,
Comment le seul mot de « souci » pourrait-il en donner le sens ?
***
(Li Qing Zhào) (1084 — après 1149)
Recueil: Quand mon âme vagabonde en ces anciens royaumes Poèmes Song illustrés par Dai Dunbang
Traduction: du Chinois par Bertrand Goujard
Editions: De la Cerise
L’herbe du défilé sous un halo de brouillard s’étale,
De la Wei en remous s’entend le grondement.
Les vagues de pluie du printemps s’apaisent,
une légère poussière se répand,
On monte en selle pour partir en campagne.
Voyez là si verdoyants les saules,
Dont ici on a tiré et brisé un rameau.
On se met en branle le coeur lourd,
Qui sait en quelle saison nous serons à nouveau réunis ?
Alors, vidons encore un verre,
Chantons encore un air !
On soupire sur l’existence,
Si amer de passer d’une joyeuse compagnie aux adieux, au départ.
Aussi ne nous dérobons pas à l’ivresse profonde,
Prêtons l’oreille aux « Passes du Soleil » jusqu’au bout.
Quand nous repenserons à nos chers vieux amis,
Éloignés de cent lieues, avec eux nous partagerons le clair de lune.
***
(Kòu Zhùn) (961-1023)
Recueil: Quand mon âme vagabonde en ces anciens royaumes Poèmes Song illustrés par Dai Dunbang
Traduction: du Chinois par Bertrand Goujard
Editions: De la Cerise
Floraisons de printemps et lunaisons d’automne, quand finiront-elles ?
De ce qui fait le passé, que saisit-on vraiment ?
Lorsque sur la petite pagode la nuit dernière vint le vent d’est,
L’ancien royaume ! Je n’ai pas eu la force, baigné par la clarté de la 1une,
d’en retrouver le souvenir.
Les balustrades sculptées et les marches de jade,
sans doute subsistent-elles encore !
C’est seule la fraîcheur de notre jeunesse qui s’altère.
Dites-moi : peut-il se trouver autant de mélancolie
Que ce que tout un fleuve charrie vers l’est d’eaux printanières ?
***
(Li Yù) (937 – 978)
Recueil: Quand mon âme vagabonde en ces anciens royaumes Poèmes Song illustrés par Dai Dunbang
Traduction: du Chinois par Bertrand Goujard
Editions: De la Cerise
Grandes orgues du coeur quelle est votre machine ?
Pourquoi vos couples furieux
Forment-ils un dragon de Chine
Un archange constellé d’yeux ?
vient dans ce désordre une musique sainte
Un souffle insensible aux combats ?
Et pourquoi cette longue plainte
Si haute montant de si bas.
Moi qui n’en suis pour rien dans ma venue sur terre
Qui n’ai jamais appris les mots que pour me taire
Et marche lentement de peur de tout briser
Croyez-vous que je puisse encor vous satisfaire
Tant de mains attendues n’en valent plus la peine
Une heure d’amitié ne fait pas la semaine
Est-ce mon sang déjà qui teinte le pavé
Mon coeur découragé qui tire sur sa chaîne
A quoi bon ces matins sans hâte de l’enfance
Ces fausses libertés mes désobéissances
Les grains d’or du soleil au fond du sablier
Puisque toute ma vie est faite de silence
C’est là dans mon grenier derrière la fenêtre
Avec le ciel qui bouge au fond pour me remettre
Un instant dans le cycle effarant du passé
Que je serai tenté un soir de disparaître
Alors que vous importe un cri dans le naufrage
Le fardeau de ma joie est un maigre bagage
De la douleur, mon Dieu, j’en eus toujours assez
Mon ombre fut mon seul compagnon de voyage
(René Guy Cadou)
Recueil: René Guy Cadou Poésie la vie entière oeuvres poétiques complètes
Traduction:
Editions: Seghers
Il n’y a pas de passé.
Il n’y a qu’aujourd’hui et, dans aujourd’hui,
serrés et brûlants comme à l’intérieur d’une clochette de muguet,
tous les morts que nous avons aimés.
Il n’y a rien de caché,
tout est là sous nos yeux,
la vie passée, la vie présente et la vie future,
comme trois petites filles échangeant en riant des confidences
sur une route de campagne.
SUR UN AIR LENT (Li Qing Zhào)
Posted by arbrealettres sur 21 janvier 2023
SUR UN AIR LENT
Quêter, quérir, fouiller, fureter,
Froidure vide, froid dur limpide,
Morne monotonie, amère mélancolie, lamentable ennui…
Douceur subite, retour du froid,
Cette saison où je souffre le plus de respirer ;
Avec trois gobelets et deux coupes de vin clair,
Comment y résister, quand le soir vient, quand le vent s’énerve ?
Voici les oies sauvages parties,
Le plus cruel à mon coeur,
Pourtant nous étions bien complices aux temps passés.
Partout au sol les chrysanthèmes s’amoncellent,
Défraîchis et déchus
à présent, qui viendrait prendre la peine de les ramasser ?
Veillant près de la fenêtre,
Solitaire, par moi-même comment parviendrai-je à rejoindre l’obscurité ?
Au sterculier vient s’adjoindre la bruine,
Qui jusqu’au crépuscule dégoutte et dégouline ;
Et toute cette composition,
Comment le seul mot de « souci » pourrait-il en donner le sens ?
***
(Li Qing Zhào) (1084 — après 1149)
Recueil: Quand mon âme vagabonde en ces anciens royaumes Poèmes Song illustrés par Dai Dunbang
Traduction: du Chinois par Bertrand Goujard
Editions: De la Cerise
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