Traduction: Akié Boulard
Editions: Arichi
Posted by arbrealettres sur 19 novembre 2019
Illustration: David Alfaro Siqueiros
Ô Mort inconsolable de la bête…
Ô cri béant de l’animal humain,
Ô cri que pousse arrivant à sa fin
La chair…
Ô grand cri du Mourant divin
Quand, pour rendre l’âme, il pencha la tête.
(Marie Noël)
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Posted by arbrealettres sur 18 novembre 2019
Notturno
En cette heure-là
tu étais devant ma bouche
comme une comète.
Je saisis tes mains
comme pour une prière.
Là où notre haleine se rejoignit
se trouvaient les incendies,
qui vifs s’enflammèrent
et sans égard me soulevèrent
en une vague.
Dans le désert aucun puits
jamais encore ne me fit
courber de soif
comme le tendon de tes blanches épaules.
Ton habit ajusté
ma main a toléré
plus qu’en hôte.
Tu étais mien.
Dans aucun mot, dans ton silence uniquement
je lisais ton bonheur.
Puis tu repris pourtant
le chemin du matin gris.
Combien de fois encore immobile, le regard fixe
et rêvant, je t’exige et t’attends et t’espère
et me tourmente en pensant de nouveau à toi.
Mais comme les présents trop rares
que l’on perd, aucun jour ne te ramène.
Combien de fois aussi je t’appelle
dans les plaintes et les prières.
Ton ombre est également une lumière
qui s’étend infiniment
Un son venu des profondeurs de la mer
Sur la corde de silence un chant.
Elle est la douleur à vif, étrangère
Et angoisse dans les rêves
Elle pousse un cri en se déchaînant
Dans un lâcher d’écume bouillonnant.
Dans la plus belle des nuits étoilées
La fraîcheur tout autour s’épanouit
Et sur le monde transfiguré
Une incandescence élevée jaillit.
***
Notturno
In jener Stunde
warst du vor meinem Munde
wie ein Komet.
Ich fasste deine Hände
wie zum Gebet.
Wo unser Hauch sich traf
standen die Brände,
die hell entfacht
mich ohne Bedacht
hoben zur Welle.
Wie deiner weissen Schultern Band
so hiess noch keine Quelle
in einem Wüstenland
mich dürstend neigen.
Dein schmiegendes Gewand
duldete meine Hand
mehr, denn als Gast.
Du warst mein Eigen.
In keinem Wort, nur deinem Schweigen
las ich dein Glück.
Dann gingst du doch zurück
den morgengrauen Weg.
Wieviele Male steh ich noch und starre
und träum, verlange dein und barre
und schmerze mich in neuem Dein-Gedenken.
Doch gleich den seltenen Geschenken,
Die man verliert, bringt dich kein Tag.
Wieviele Male ich auch klag
und betend nach dir rufe.
Dein Schatten ist ein Licht zugleich
Von ungemessner Weite
Ein Klang aus einem tiefen Meer
Ein Sang auf stiller Saite.
Und ist der wunde fremde Schmerz
Und Bangigkeit in Träumen
Und jauchzt entfesselt einen Ruf
In freiem Überschäumen.
Und in der schönsten Sternennacht
Ist Kühle rings im Blühen
Und über der verklärten Welt
Entspringt ein hohes Glühen.
(Ingerborg Bachmann)
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Posted by arbrealettres sur 18 novembre 2019
Illustration: Vincent Van Gogh
QUE PENSENT LES ÉTOILES
Que méditent, à quoi pensent
Les étoiles dans leur transe
Lorsque les larmes qui luisent
Au fond des yeux s’y calcinent ?
Que pense donc, à quoi rêve
La triste source flétrie ?
Fulgure-t-elle, sa brève
Lueur parfois dans la vie,
L’éclair qui nous irradie?
Nous qui recherchons sans trêve
Dans les jours d’obscurité
Pour la pauvre humanité
Le chemin qu’elle perdit?
Que méditent donc, que pensent
Ceux-là sans cesse qui poussent
La brouette des souffrances ?
Est-ce qu’au moins sur leurs lèvres
Que pèlent et que calcinent
Les perpétuels soucis
Brille parfois un sourire ?
Un reflet de l’avenir,
D’un lendemain plus heureux
Qui nous ferait reconnaître
Dans les ténèbres des cieux
Toute dorée, une rive ?
À quoi pense la famine
Dans les caves faméliques ?
Le sommeil ne veut venir
Et la nuit n’est que silence,
Est-ce qu’au moins elle entend
Dans la paix l’écho de fer –
C’est le pas pesant des temps,
Générations en marche,
Est-ce que le ciel se fend
Parfois dans la main de Dieu ?
Est-ce qu’il voit le tonnerre,
Est-ce qu’il sait que c’est vrai?
(Itzhak-Leibush Peretz)
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Posted by arbrealettres sur 17 novembre 2019
Illustration: Itzhak-Leibush Peretz
MA MUSE
Elle n’est point bleuet, ma muse,
Qui pousse sur les visions,
Ni, voleur de baisers qui muse
Cherchant les fleurs, un papillon.
N’est point un rossignol, ma muse,
Point de trille et de mélodie,
Mais c’est une vieille commère,
Et racornie et enlaidie.
Une esseulée aux orphelins
Éparpillés de par le monde,
Miséreuse, soir et matin,
Qui jure, qui crie et qui gronde!
(Itzhak-Leibush Peretz)
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Posted by arbrealettres sur 16 novembre 2019
Illustration: Adolfo Busi
Purgatoire
La plénitude ne nous épuise donc pas ?
Dans mes mains lasses j’amasse,
j’aime, offre et accomplis
mais le jour persiste et la clarté aussi.
Je bois et vide tous les puits ;
le temps s’enfonce au plus profond des mers,
l’espace rencontre ma pesanteur
et me presse au soir de rentrer.
Comme une flèche je monte et descends les escaliers ;
il pleut des heures dans le silence,
rompant toutes les vannes, la plénitude s’élance,
je cours jusqu’à mourir éreintée.
Mais de nouveau il fait jour et la clarté persiste
– j’ai beau me tourner et me défendre, en vain –
de moi sans fin poussent des mains,
je dors et ne meurs pas.
***
Fegefeuer
Erschöpft uns denn die Fülle nicht?
Ich häufe in die müden
ich liebe, schenke und vollende,
doch es bleibt Tag und es bleibt licht.
Ich trinke aile Brunnen aus;
die Zeit rückt tiefer in die Meere,
der Raum begegnet meiner Schwere
und drängt mich in das Abendhaus.
Ich flieg’ die Treppen auf und ab;
es regnet Stunden in die Stille,
aus allen Schleusen bricht die Fülle,
bis ich mich totgelaufen hab’.
Doch wieder tagt es und bleibt licht,
-— wie ich mich wehre und mich wende –
mir wachsen unaufhörlich Hände,
ich schlafe und ich sterbe nicht.
(Ingerborg Bachmann)
Posted in poésie | Tagué: (Ingerborg Bachmann), accomplir, aimer, amasser, épuiser, éreinté, boire, clarté, courir, descendre, dormir, en vain, escalier, espace, flèche, heure, jour, las, main, mer, monter, mourir, offrir, persister, pesanteur, plénitude, pleuvoir, pousser, presser, profond, puits, purgatoire, rencontrer, rentrer, rompre, s'élance, s'enfoncer, se défendre, se tourner, silence, soir, temps, vanne, vider | Leave a Comment »
Posted by arbrealettres sur 16 novembre 2019
Illustration: Kazuya Akimoto
Levant les yeux
Qu’après une jouissance insipide
Humiliée, amère et sans lumière
Je me ressaisisse et me reprenne,
Me redonne un peu d’estime.
Je suis un fleuve
Avec des vagues qui cherchent les rives,
L’ombre des buissons sur le sable,
La chaleur des rayons du soleil,
Ne serait-ce qu’une seule fois.
Mais mon chemin est sans pitié.
Sa pente me pousse vers la mer.
Grande, sublime mer !
Je ne connais pas d’autre souhait
Que de m’engloutir en me répandant
Dans la plus infinie des mers.
Comment un désir
De saluer des rives plus douces
Peut-il me retenir
Tant que du sens ultime
Je connais l’existence !
***
Aufblickend
Daß ich nach schalem Genusse,
Erniedrigt, bitter und lichtlos
Mich fasse und in mich greife,
Macht mich noch wert.
Ich bin ein Strom
Mit Wellen, die Ufer suchen,
Schattende Büsche im Sand,
Wärmende Strahlen von Sonne,
Wenn auch für einmal nur.
Mein Weg aber ist ohne Erbarmen.
Sein Fall drückt mich zum Meer.
Großes, herrliches Meer!
Ich weiß keinen Wunsch auf diesen,
Als strömend mich zu verschütten
In die unendlichste See.
Wie kann ein Begehren,
Süßere Ufer zu grüßen,
Gefangen mich halten,
Wenn ich vom letzten Sinne
Immer noch weiß!
(Ingerborg Bachmann)
Posted in poésie | Tagué: (Ingerborg Bachmann), amer, buisson, chaleur, chemin, chercher, connaître, désir, doux, engloutir, estime, existence, fleuve, grand, humilié, infini, insipide, jouissance, lever, lumière, mer, ombre, pente, pitié, pousser, rayon, redonner, reprendre, retenir, rive, sable, saluer, se répandre, se ressaisir, sens, soleil, souhait, sublime, ultime, vague, yeux | Leave a Comment »
Posted by arbrealettres sur 30 octobre 2019
Etais-je espace ? Il poussait des murailles
Contre mon corps. Etais-je oiseau ? La terre
En s’éloignant m’initiait au vol.
Etais-je fleuve ? Auprès de moi la rive
Me dédiait ses arbres verdoyants
(Robert Sabatier)
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Posted by arbrealettres sur 18 octobre 2019
Illustration: Josephine Wall
La Terre est une vallée
où poussent les âmes.
(John Keats)
Posted in poésie | Tagué: (John Keats), âme, pousser, terre, vallée | Leave a Comment »
Posted by arbrealettres sur 30 septembre 2019
L’oiseau et l’arbre sont conjoints en nous.
L’un va et vient,
l’autre maugrée et pousse.
(René Char)
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