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Poésie

Posts Tagged ‘rayer’

Les eaux montent (Lu Ji)

Posted by arbrealettres sur 7 décembre 2022



Illustration: Shan Sa
    
Les eaux montent

Mon service prend fin et je descends les marches du palais
Repos du soir — je gagne enfin mes appartements
L’éclair hurlant éclate dans la nuit pleine
Les flèches de lumière vive rayent les ténèbres
De noirs nuages harcèlent les tours vermillonnes
Et le vent frappe le linteau des fenêtres.
L’eau s’écoule bouillonnante par les gouttières du toit
Des flaques jaunes noient les degrés aveugles des terrasses
Les cieux dénués s’engrènent impassibles sans se déchirer
De larges voies d’eau rejoignent abondantes un canal englouti
À Liang et Ying, les cultures meurent sous les flots du ciel
Des paysans vagabonds passent devant les bras furieux du fleuve
Les eaux montent inlassables et changent nos vies en ruine marine.

(Lu Ji)

(261-303)

Recueil: Nuages immobiles Les plus beaux poèmes des seize dynasties chinoises
Traduction: Alexis Lavis
Editions: l’Archipel

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LES PETITS VOYOUS (Georges L. Godeau)

Posted by arbrealettres sur 3 septembre 2022



LES PETITS VOYOUS

Les petits voyous s’en vont à l’école.
Ils ramassent des cailloux pointus pour rayer les voitures.
Les plus belles, le plaisir est plus fort.
Les pardessus des petits voyous sont trop courts.
La mère est manoeuvre à l’usine.
Elle taille dans les vieux effets,entre onze heures et minuit.
La baraque est froide. Ses doigts sont gourds.
Les enfants sont couchés dans le même lit.
Ils ont des yeux pour voir et des oreilles pour entendre la misère.
A force, la misère, elle met des pierres dans les mains.

(Georges L. Godeau)

Illustration

 

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L’amandier sous la lune (Claude Vigée)

Posted by arbrealettres sur 23 mars 2021




    
L’amandier sous la lune

La semence nocturne a mûri dans ma tête,
dans mon nom j’ai scellé l’inconnu sans visage.
Croyant saisir le fruit, l’insecte, l’arc-en-ciel,
et sucer dans le roc l’huile vierge ou le miel,
j’ai glissé vers la nuit sur le miroir des sons :
l’écureuil encagé tourne seul sur sa roue,
au fond du puits rit le silence
où l’abîme s’ébroue.

Sur l’infime épaisseur des mots nous patinons
à reculons depuis l’enfance;
nous chantons, nous dansons
vers l’infini sans regard et sans nom.
A peine un éclair sur la glace,
dans une poésie est inscrite la trace
de l’oiseau qui raya la fragile surface.

***

(Claude Vigée)

Recueil: Anthologie
Traduction: Traduit en langue corénne par Madame Holl Han Kaa
Editions: Revue Arts et Littérature de Corée

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Je veux bien (Pierre Morhange)

Posted by arbrealettres sur 4 juillet 2020



Je veux bien que vienne une image éclatante
Comme un coup de griffe du soleil sur le ruisselet
Comme un regard qui vous donne tout le besoin d’un autre de vous aimer
Et qu’on perd au milieu des rues
Je veux bien, mais cet éclat va-t-il se dissoudre
Ou me rayer ma vie?

(Pierre Morhange)


Illustration: William Blake

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Je l’ai écrit sur une ardoise (Marina Tsetaeva)

Posted by arbrealettres sur 18 août 2019



 Illustration: Marc Chagall
    
Je l’ai écrit sur une ardoise,
Sur les papiers des éventails
Et sur les rives, et sur les berges,
Patins sur glace, anneau sur verre,

Sur des troncs d’arbres centenaires,
Afin que sache le monde entier,
Je l’ai signé en arc-en-ciel,
Oui, que je t’aime, je t’aime, je t’aime !

Comme j’ai voulu que tous fleurissent
Des siècles, en moi et sous mes doigts.
Puis j’ai barré, biffé, rayé,
Front dans les mains — des noms — combien ?

Gravé dans l’or de mon alliance,
Serré au coeur, brûlant le sein :
Ton nom, toi seul, à l’intérieur,
— Table de Moïse — tu demeures.

(Marina Tsetaeva)

 

Recueil: Mon dernier livre 1940
Traduction: Véronique Lossky
Editions: Cerf

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LE SOLEIL ET LA LUNE (Louis Simpson)

Posted by arbrealettres sur 1 mars 2019



    

LE SOLEIL ET LA LUNE

« Si le soleil et la lune devaient douter,
Ils disparaîtraient à l’instant. »

Quand j’essaie de penser à ce qu’ils ont en commun
Je dois bien admettre que c’est la paranoïa

Une foi inébranlable en leur propre importance…
Ils voient ce qu’ils veulent.

A coup sûr, la vie est beaucoup plus simple.
Il faut être fou, tout est là.

En fait, je n’ai qu’à m’en prendre à moi-même.
Je m’assois pour écrire…

Une heure plus tard la table est couverte de mots.
Alors je les raye l’un après l’autre.

***

THE SUN AND THE MOON

« If the Sun and Moon should doubt,
They’d immediately go out. »

When I try to think what they have in common
I have to say, paranoia.

An unshakable belief in their own impo rtance…
They see what they desire.

Certainly, life would be a lot simpler.
You have to be mad, that’s the catch.

As it is, I have no one to blame but myself.
I sit down to write…

An hour later the table is covered with words.
And then I start crossing them out.

(Louis Simpson)

 

Recueil: Nombres et poussière
Traduction:
Editions: Atelier La Feugraie

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SILICE (Jacques Lacarrière)

Posted by arbrealettres sur 8 septembre 2018



SILICE

État stable du sable
après son grand tournoi contre le feu.
Si endurci
qu’il raye jusqu’à la mémoire des cavernes.

(Jacques Lacarrière)

Illustration

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La Tentation (Daniel Boulanger)

Posted by arbrealettres sur 2 août 2018



La Tentation

d’un long trait noir l’été raye son cuivre
et le soir ouvre sa forêt
le doute y va poursuivre
l’espoir vêtu de sa robe de fée

(Daniel Boulanger)

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MONTS ET MERVEILLES (René Guy Cadou)

Posted by arbrealettres sur 23 janvier 2018



    

MONTS ET MERVEILLES

Soleil dont le plateau fait pencher la balance
Le vent dans les barreaux
Le premier pas de danse
Et la neige qui fond
Les liens qui se défont
La pensée qui descend lentement du plafond
Le sourire attendu qui lézarde la face

Seigneur il fait si beau
Comment rester en place
Je vais te réclamant sur les toits bohémiens
Pour t’appeler les mots ne viennent pas très bien
Niais de mes yeux tu vois j’apprivoise les anges
Les arbres et mes bras font un curieux mélange
Toujours plus près de toi
Conseillé par les fleurs
Ta main pressant la pomme acide de mon coeur

Je t’attends
Tu n’attends jamais laissé un homme attendre
Pour t’aimer
Tu diras comment il faut s’y prendre
J’ai tant besoin d’amour
Mon Dieu, tu ne peux pas me rayer de ton cours

(René Guy Cadou)

 

Recueil: Poésie la vie entière
Traduction:
Editions: Seghers

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AVÈNEMENT (Andrée Chedid)

Posted by arbrealettres sur 3 janvier 2018




    
AVÈNEMENT

Un souffle d’éternité
Investit nos paroles
Tandis que l’homme se hâte
De vivre et de mourir

Brève parade des saisons
Flux et reflux des ombres
Précarité du chant

Nos mots chancellent
Nos raisons s’égrènent
Nos sentiers s’épuisent
Nos rêves en sourdine
Récusent l’horizon

Nous cédons
Aux gouffres impassibles
En exil d’espérance
Nous rayons l’avenir

Pourtant
Ni corps Ni coeurs
N’ont dévoilé leurs arcanes

Un monde en germe
Nous invite
A d’autres semailles
D’autres labours
D’autres récits.

(Andrée Chedid)

 

Recueil: Par-delà les mots
Traduction:
Editions: Flammarion

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