Départ avant l’aube : les clochettes qui tintent
Ravivent la nostalgie des voyageurs –
Gîte de chaume sous la lune : chant d’un coq
Pont de bois couvert de givre : traces de pas
Tombent les feuilles sur la route de montagne
Quelques fleurs éclairent les murs du relais
Rêvant encore au pays de Du-ling
Les oies sauvages, près de l’étang, s’attardent
(Wen Ting-yun)
Recueil: L’Ecriture poétique chinoise
Traduction: François Cheng
Editions: du Seuil
Au-delà du relais de poste
Un pont en ruine
Une fleur en éclosion
Solitaire, dans l’abandon
Triste à l’approche de la nuit
Et plus encore aux caprices du vent et de la pluie
Cette fleur ne rivalise pas de beauté avec le printemps
La jalousie des autres fleurs la laisse indifférente
Une fois tombée dans la boue
Elle devient poussière
Son parfum reste pourtant intact
En voyage, on s’arrête, on descend de voiture ;
Puis entre deux maisons on passe à l’aventure,
Des chevaux, de la route et des fouets étourdi,
L’oeil fatigué de voir et le corps engourdi.
Et voici tout à coup, silencieuse et verte,
Une vallée humide et de lilas couverte,
Un ruisseau qui murmure entre les peupliers, –
Et la route et le bruit sont bien vite oubliés !
On se couche dans l’herbe et l’on s’écoute vivre,
De l’odeur du foin vert à loisir on s’enivre,
Et sans penser à rien on regarde les cieux…
Hélas ! une voix crie : « En voiture, messieurs ! »
Référence du film
Aider de façon désintéressée trois personnes
chacune d’entre elles devra passer le relais à trois inconnus
… qui en feront de même à leur tour
Le coeur est parvenu au relais des initiés
Ame et coeur contemplent les matins et les soirs
Que de choses il a vues, que d’instants il a vécus
Ame et coeur contemplent les matins et les soirs.
La terre de ces lieux, dit-on, est vert de cuivre
On dit aussi qu’il y a des arbres tout en or
On dit que tous les monts sont de pur lazuli
Ame et coeur contemplent les matins et les soirs.
Des oiseaux verts se tiennent dans les arbres
Les uns sont immobiles, les autres se déplacent
Voilà, dit-on, les très humbles créatures de Hizir
Ame et coeur contemplent les matins et les soirs.
J’ai vu là un grand fleuve qui coulait
Beaucoup d’anges tels des oiseaux sont là
Ceux qui les voient en sont émerveillés
Ame et coeur contemplent les matins et les soirs.
Les anges sont emplis d’une lumière verte
L’un d’entre eux les domine tous
Les autres sont tous à ses ordres
Ame et coeur contemplent les matins et les soirs.
Là-dessus à une mer verte je suis arrivé
j’ai vu des séraphins sur le rivage
Des vagues marines j’ai entendu le nom de Dieu
Ame et coeur contemplent les matins et les soirs.
(Mouhiddine Dolou)
Recueil: La montagne d’en face (Poèmes de derviches anatoliens)
Traduction: Guizine Dino, Michèle Aquien, Pierre Chuvin
Editions: Fata Morgana
Que te dirais-je si tu reviens
Derrière ce treillis de visages
Passé les relais de l’amour?
Je ne sais plus la romance des îles
Que je massacrais le soir
En revenant sous les tonnelles.
Un bruissement de cristal
Aux frontières délicates du repos,
Fait oublier le châtiment le plus juste,
Mais toi, comment pourrai-je t’oublier?
Un jour il faudra te dire
La blessure de la première aube
Au coeur sonore de mon enfance,
Et tu crois que je me souviendrai?