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LES BÂTISSEURS DE CATHÉDRALE (Roger Bevand)

Posted by arbrealettres sur 16 mai 2023




    
LES BÂTISSEURS DE CATHÉDRALE

Ils étaient des milliers venus de mille savoirs,
Hagards tailleurs de pierre et sculpteurs pathétiques,
Terrassiers de hasard, charpentiers faméliques,
Turbulents compagnons venus bâtir l’histoire.

S’étaient levés matin à l’appel cardinal,
Cheminant des provinces du vieux pays de France,
Ou de Gand la brumeuse ou de claire Florence,
Ils étaient les mains nues de l’art occidental.

Sous les ordres rugueux d’un vieux moine architecte,
Tour de Babel soudée par la foi catholique,
Ils besognèrent trois siècles en quatre-vingt dialectes,

Mais pour le plus grand nombre, de relève en relève,
La flèche terminale du grand vaisseau gothique,
Ne fut qu’une promesse, et même pas un rêve.

(Roger Bevand)

Recueil: Le Damier 6
Editions: France Europe

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RELÈVE (Charles Vildrac)

Posted by arbrealettres sur 16 octobre 2020




    
RELÈVE

À notre place
On a posé
Des soldats frais
Pour amorcer
La mort d’en face.
Il a fallu toute la nuit pour s’évader.
Toute la nuit et ses ténèbres
Pour traverser, suant, glacé,
Le bois martyr et son bourbier
Cinglé d’obus.
Toute la nuit à se tapir,
À s’élancer éperdument,
Chacun choisissant le moment,
Selon ses nerfs et son instinct
Et son étoile.
Mais passé le dernier barrage,
Mais hors du jeu, sur la route solide,
Mais aussitôt le ralliement
Aux lueurs des pipes premières,
Dites, les copains, les heureux gagnants,
Quelle joie titubante et volubile !
Ce fut la joie des naufragés
Paumes et genoux sur la berge
Riant d’un douloureux bonheur
En recouvrant tout le trésor ;
Tout le trésor fait du vaste monde
Et de la mémoire insondable
Et de la soif qu’on peut éteindre
Et même du mal aux épaules
Qu’on sent depuis qu’on est sauvé.
Et l’avenir ! Ah ! l’avenir,
Il sourit maintenant dans l’aube :
Un avenir de deux longues semaines
À Neuvilly dans une étable…

*

Ah ! les pommiers qui sont en fleurs !
Je mettrai des fleurs dans mes lettres.
J’irai lire au milieu d’un pré.
J’irai laver à la rivière.
Celui qui marche devant moi
Siffle un air que son voisin chante ;
Un air qui est loin de la guerre :
Je le murmure et le savoure.
Et pourtant ! les tués d’hier !
Mais l’homme qui a trébuché
Entre les jambes de la Mort
Puis qui se relève et respire
Ne peut que rire ou sangloter :
Il n’a pas d’âme pour le deuil.
La lumière est trop enivrante
Pour le vivant de ce matin ;
Il est faible et tout au miracle
D’aller sans hâte sur la route.
Et s’il rêve, c’est au délice
D’ôter ses souliers pour dormir,
À Neuvilly, dans une étable.

(Charles Vildrac)

 

Recueil: Chants du désespéré (1914-1920) –
Traduction:
Editions: Gallimard

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RONDEAU DE L’HOMME LAS DE PENSER (André Berry)

Posted by arbrealettres sur 14 octobre 2019



    

RONDEAU DE L’HOMME LAS DE PENSER

Combien de temps, tête sempiternelle,
Te faudra-t-il penser et repenser,
Tel l’aiguilleur reclus dans sa tourelle,
Guetteur raidi du train qui va passer ?
Au roulement des rapides idées
Ouvrant ou non les disques lumineux,
Combien de temps, leviers vertigineux,
Dois-je mouvoir vos tiges recoudées?
Combien de temps?

Combien de temps, radoteuse cervelle,
Dois-je sentir ta roue en moi tourner,
Virer au vent et voleter ton aile,
Et sous ta meule un grain dur s’enfourner?
Combien de temps, machine tyrannique,
De ton tiquant, de ton taquant moulin,
Où toujours entre et d’où sort un sac plein,
Me faudra-t-il servir la mécanique?
Combien de temps?

Combien de temps,
Dans la guérite où je
Me faudra-t-il garder
Tenace Esprit qui ne
nocturne sentinelle,
dois m’enfermer,
ta citadelle,
veux désarmer?
Le poing toujours sur le pommeau du glaive,
Prêt à jeter l’anxieux Qui va là,
Combien de temps, dans le trou que voilà,
Me faudra-t-il attendre la relève?
Combien de temps?

(André Berry)

 

Recueil: Poèmes involontaires suivi du Petit Ecclésiaste
Traduction:
Editions: René Julliard

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POUR CONCLURE (Menno Wigman)

Posted by arbrealettres sur 22 septembre 2019




    
POUR CONCLURE

Je connais l’affliction des copyrettes,
des hommes mornes aux journaux jaunis,
des mères à lunettes aux avis de déménagement,

l’odeur des papiers à lettres, relevés de compte,
formulaires d’impôts, contrats de location,
cette encre de rien qui dit que nous existons.

Et j’ai vu des cités les dortoirs mort-nés,
où sans gloire les hommes contrefont des hommes,
et presque sans défaut la rue une rue.

Qui est-ce qu’ils copient ? Qui est-ce que
je copie moi-même ? Père, mère, monde, ADN,
te voilà avec un nom radieusement tien,

dans la tête un espoir habilement calqué
de repos, promotion, progéniture et chèques.
Et moi, qui glapissant habite ces tercets,

si seulement j’avais choses nouvelles à dire.
Lumière. Ciel. Amour. Maladie. Mort.
Je connais l’affliction des copyrettes.

***

TOT BESLUIT

Ik ken de droefenis van copyrettes,
van holle mannen met vergeelde kranten,
bebrilde moeders met verhuisberichten,

de geur van briefpapieren, bankafschriften,
belastingformulieren, huurcontracten,
die inkt van niks die zegt dat we bestaan.

En ik zag.Vinexwijken, pril en doods,
waar mensen roemloos mensen willen lijken,
de straat haast vlekkeloos een straat nabootst.

Wie kopiëren ze? Wie kopieer
ik zef? Vader, moeder, wereld, DNA,
daar sta je met je stralend eigen naam,

je hoofd vol snugger afgekeken hoop
op rust, promotie, kroost en bankbiljetten.
En ik, die keffend in mijn canto’s woon,

had ik maar iets nieuws, iets nieuws te zeggen.
Licht. Hemel. Liefde. Ziekte. Dood.
Ik ken de droefenis van copyrettes.

(Menno Wigman)

 

Recueil: L’affliction des copyrettes
Traduction: Pierre Gallissaires et Jan H. Mysjkin
Editions: Cheyne

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Toutes ces mains, ces jambes, ces os (Jean-Louis Giovannoni)

Posted by arbrealettres sur 8 avril 2018




    
Toutes ces mains, ces jambes, ces os où
iront-ils après m’avoir emprunté ? Qui
prendra leur relève ?

(Jean-Louis Giovannoni)

 

Recueil: Les mots sont des vêtements endormis
Traduction:
Editions: Unes

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C’était l’été (Jacques Prévert)

Posted by arbrealettres sur 7 octobre 2017




    
c’était l’été
sous ma jupe relevée
j’étais nue comme jamais
Tout mon jeune corps
était en fête
des cheveux de ma tête
aux ongles de mes pieds
J’étais une source qui guidait
la baguette du sourcier
Nous faisions le mal
et le mal était bienfait.

(Jacques Prévert)

 

Recueil: Fatras
Editions: Le Point du Jour

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ATTENTE (Jacques Rabemananjara)

Posted by arbrealettres sur 29 août 2017




ATTENTE

Je l’ai guetté, ton pas, sur les marches du temple.
Le moindre bruit lointain résonnait dans mon coeur.
Est-ce Elle qui s’avance au-devant de mon ample
désir impérial de la prendre en vainqueur !

Ta chair est dans ma chair ; ton sang est dans mon sang.
De la synthèse naît l’âme des ordalies.
La neige fond avec l’ébène incandescent.
Contraste harmonieux ! Hautes anomalies !

L’antithèse a charmé l’augure hypnotisé.
Les rites de l’épreuve ont tout exorcisé.
Je suis l’élan jailli du flanc noir des Tropiques

Et toi, la fleur de serre au long des blancs frimas :
Le miracle nous vient de nos propres climats
D’avoir eu la beauté des rêves utopiques.

*

Nous voici de nouveau face au lac de nos rêves.
Au silence s’unit un crépuscule pur.
Ma main cherche ta main par des caresses brèves.
La lune est pleine à faire éclater tout l’azur.

Quelles vagues d’extase ensemble nous soulèvent
et nous transportent jusqu’au champ des astres d’or.
Sur terre et dans les cieux, tous les amants sont morts :
Il nous revient, ce soir, d’assurer la relève.

L’héroïne, c’est toi dont j’annonce le titre
aux siècles éblouis par ta fière beauté.
Notre amour remplit seul tout le dernier chapitre

du livre que les dieux pour l’homme ont inventé ;
et pour nous être aimés comme jamais l’on aime
ils nous marquent du sceau de leur plus bel emblème !

(Jacques Rabemananjara)

Illustration: Sabin Balasa

 

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Tandis que le matin (Gilbert Langevin)

Posted by arbrealettres sur 25 janvier 2016



Tandis que le matin procède
au relevé précis des bévues
du côté le moins éclairé de vivre
une brise fiévreuse
combat ses mauvais rêves
comme si l’univers
affrontait son contraire
Quelque chose alors de singulier
remue l’espace entier

(Gilbert Langevin)

Découvert ici: http://www.ipernity.com/blog/lara-alpha

Illustration: Andrew Murray

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